Cavus – Fester and Putrefy

Le 23 décembre 2010 posté par Gwenn

Line-up sur cet Album


W - Vocals
J.K - Guitar
B.P - Guitar
A.R.G - Bass
T.T.T - Drums

Style:

Black Metal

Date de sortie:

30 Septembre 2010

Label:

Listenable Records

Note de la Soilchroniqueuse (Gwenn): 9,5/10

Une demi-heure pour garer la voiture sur ce parking dégoûtant. Il est presque 16h, 22 Décembre 2010. C’est Noël depuis un bon mois maintenant. Besoin sans doute d’aller chercher du PQ et une pizza pour ce soir, j’ai mis trois bonnes heures à me décider à affronter le monstre commercial Noël dans toute son horreur. Coupant le contact moteur, je garde celui de la batterie afin de me donner du courage, et ça s’appelle Cavus. Découvert en Live durant la tournée Gorgoroth sur la date de Caen, j’avais été soufflée, transportée, hallucinée par une telle puissance sonore et visuelle. Les néophytes penseront à du brouillon scandinave, les autres à quelque chose de réellement intéressant en matière de Black Metal. La scène scandinave regorge de nouveautés grasses, parfois inaudibles ou peu travaillées, Cavus bénéficie d’un excellent enregistrement, et d’arrangements haut de gamme. Ce n’est pas la première fois que le public aura eu affaire à Cavus, ils ont déjà tourné avec… Mayhem, on comprendra donc sans peine les influences qui ressortent de « Fester and Putrefy », et je ne parle là que d’influences, tant la griffe sanglante et personnelle de W. et sa bande se plante fort dans mes tympans.

Me retournant dans la voiture, j’assiste à la procession des gens qui affluent et se pressent devant des portes en verre enguirlandées, qui s’ouvrent et qui se ferment. Les visages sont tendus, les portefeuilles semblent gonflés dans les sacs et les haut le cœur m’envahissent déjà, j’ai envie de faire demi-tour et plonge mes yeux sur la pochette de « Fester and Putrefy » de couleur ocre, terreuse. Un démon à multiples visages nous propose, assis sur son trône de pierre, un serpent à trois têtes, une épée, des flèches. Sa crinière n’est que serpents qui poussent, le tout est dessiné de manière simple et à l’ancienne. J’apprécie cette esthétique et ce travail soigné.

Le Mp3 sur les oreilles, peut-être qu’il n’y a-t-il que comme ça que je vais pouvoir chasser mon repas de ce soir. Une fois sortie, respirant un bon coup, je rejoins la foule, les pas hésitants. J’évite soigneusement de croiser des regards vides, avides de lumière, de vins gras et de cadeaux inutiles. L’intro « Sea of Todgues » et W. éructe sombrement dans mes oreilles et pose son atmosphère diabolique sur le carrelage du supermarché. Des montagnes de chocolats de toutes les couleurs appellent rapidement mon regard et je lève la tête, étonnée de la hauteur des piles. « Fist of a Titan », le premier morceau cataclysmique de Cavus atomise de manière très directe mon esprit. Construit, épique, bourré de petites choses qui apportent cette profondeur que je cherche tant dans le Black, Cavus n’éprouve apparemment pas le besoin de monter dans cette chronologie de la qualité, où le premier morceau serait moyen, le dernier intéressant.

Ecoeurée déjà par les innombrables chocolats, je monte le son afin de ne pas percevoir ce « Jingle Bells » hurlé dans tous les rayons. Montagnes de jouets, de peluches et de poupées, de jeux de société, d’écrans de tailles gigantesques, des jeux vidéo, consoles, lumières et bouquins colorés, sont posées au milieu des gens qui paraissent embrasser amoureusement chaque chose, chaque objet de leur convoitise. Mon plaisir est maintenant dans l’écoute de « Discovering through suffering », un excellent martèlement musical venu tout droit de l’inspiration scandinave. La voix n’est pas trop présente, plutôt profonde. A partir de ce morceau on ne peut plus arrêter l’effet Cavus. « Hords of Gold » me met dans des rythmiques plus rapides et plus agressives, et ce son bruité et parfaitement collé à l’esprit, les images du live me reviennent sans peine, le souverain W. glissant son regard noir sur son public.

Arrivée au rayon « surgelés », je suis agressée, assaillie de boîtes de sushis pas frais dont l’étiquette révèle un prix complètement ahurissant. Par terre, quelques morceaux de poissons écrasés, noircis de crasse, gisent. « Death Rattle » m’accompagne dans ma recherche de pizza. Evidemment, une pizza épique, c’est un morceau de tout premier choix construit pour le Live. W. communique ainsi son opus à son public, vociférant avec conviction son « Fester and Putrefy ». Moment unique et découverte également de « The Eveless Gaze » dont le clip que je m’en fais sera tout un tas de fois gras frais attendant le client, dans leurs emballages sous vide lisses. Certains sont ouverts, et puent sans complexes. Le morceau ralentit, me met dans un suspense musical délicieux, jusqu’à sa fin.

Les viandes, « Scorched Flesh and Ravaged Souts », n’ont pas meilleur aspect. Les dindes pleurent et les pruneaux autour font la gueule, alors que quelques rôtis confectionnés pour les fêtes transpirent déjà le sang pas frais. Le morceau par contre est extraordinaire de puissance et s’il fallait que je définisse le Black Metal de Cavus, ça serait à l’aide du partage de ce titre où la maturité prometteuse des finlandais s’exprime avec force, rythmes puissants et masculinité exacerbée. J’arrive à la caisse munie de ma pizza et de mon PQ sur « Sacred Profane » et ses riffs terribles accompagnent les bousculades, et les yeux hagards des gens. Cavus ne joue pas en maternelle et nous tue encore avec cette batterie et ce Black Metal profond et enivrant. « Possessed by the Debits Stood » marche avec les mêmes outils aiguisés. Mes pas dans la galerie commerciale pleine de magasins de téléphones portables et autres produits de consommation sans intérêt s’accordent avec la rapidité de cette composition complexe et d’une cohérence impressionnante. Je reprends ma respiration avec « Worship and Rot », à l’extérieur du magasin affamé de consommateurs. Me retournant j’associe la voix de W. à cette image réellement agressive, le commerce et la suffisance qui va avec. Encore une conclusion excellente, effrénée, contrastée et très bien posée à la fin de l’opus, qui achève ma marche vers la voiture.

En rentrant, je réécoute cet album qui ne s’arrête jamais, qui associe rapidité et qualité, qui sort de la scène scandinave par une personnalité que n’est plus à prouver. Un cadeau de fin d’année à tous, Cavus, et à écouter en famille (rires).

Myspace: http://www.myspace.com/cavusmusic/

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