Line-up sur cet Album
- Phil : chant
- Jé : guitare
- Mat : basse
- Twist : batterie
Style:
Rock Américain vintageDate de sortie:
29 janvier 2016Label:
Doweet RecordsNote du SoilChroniqueur (Lusaimoi) : 9/10
Un nouvel album de Mallory, c’est un peu comme faire un resto avec une connaissance que n’on ne voit pas souvent mais qu’on est heureux de retrouver. Une personne dont on ne sait pas grand-chose mais qui nous semble étrangement proche et avec laquelle il est si facile de discuter. C’est d’autant plus vrai que les albums du groupe retracent la vie d’une personne, cette femme, Mallory, qui, assoiffée de liberté, a choisi de quitter l’homme qu’elle vient d’épouser. Une biographie musicale qui se faufile jusqu’à nos oreilles par un Rock Américain clamant haut et fort son amour pour les grands noms du genre, The Doors en tête. Un style parfaitement adapté à cet appétit d’évasion ainsi qu’à l’optimisme d’une époque et d’un style de vie. Un optimisme néanmoins absent de Sonora R.F. Part 1.
En effet, si Honey Moon et 2 nous racontait l’histoire de cette femme par le prisme de son envie de dévorer la vie, ce troisième chapitre s’étale sur l’une des conséquences de la voie qu’elle a choisie : son séjour carcéral.
La musique de nos Parisiens se montre alors sous un autre jour. Dès « On the Shelf », après l’annonce au haut-parleur de cette voix mexicaine, quelque chose de plus mélancolique et Bluesy nous accueille. En fermant les yeux, on voit Mallory, sous les yeux de ses gardiens, traverser les grilles et les couloirs ternes, doucement, menottes aux poignets et aux chevilles. On imagine chaque étape de son entrée dans le monde carcéral, de son arrivée à la cellule dans laquelle elle va être enfermée. On sent son désespoir, ses incertitudes et sa peur dans chaque note, dans chaque seconde. Pas un élément ne vient nous sortir de cette prison, rien. La production, parfaite d’authenticité, le rythme, volontairement lent, la mélodie, simple et subtile, ou encore le chant, toujours aussi parfait, sensible, éraillé, habité, écorché, tout nous met dans la peau tremblante et fragile de Mallory. C’est pourquoi on est d’autant plus étonné par l’aspect plus sautillant de « Zéro », ou par les ambiances cheveux au vent de « Overwhelmed ». Une marque d’espoir – des souvenirs heureux peut-être – dans tout cet univers gris. Une simple illusion. La rage revient bien vite, avec ces refrains saturés emplis d’une colère matérialisée par cette voix qui, mix parfait de maîtrise et d’émotion, ne cesse d’impressionner. Il n’est plus question de fureur de vivre, mais d’une aigreur accumulée qui ne demandait qu’à éclater.
Ainsi, Sonora R.F Part 1 oscille entre cette tristesse et ces explosions de haine – contre la gent masculine, notamment – sans jamais se répéter.
La liberté est toujours là, dans le désir, le besoin, mais elle est cachée par ces quatre murs de béton et le désespoir qui habite maintenant Mallory. Un album plus noir, assurément, jusque dans son artwork, résolument le plus réussi du groupe. Avec ses jeux sur le contraste et la netteté, magnifiant sa quasi-bichromie, il en devient aussi le plus signifiant.
Ambiance. Il n’est, jusqu’à maintenant, presque question que de cela dans cette chronique. C’est aussi parce que c’est un élément central de cet album. Pourtant, il ne faut pas oublier ce qui en fait une réussite totale : le songwriting. Les morceaux sont une nouvelle fois de véritables bijoux de composition, que la lenteur de certains ne fait que sublimer. La saturation peut sembler plus rare, mais lorsqu’elle apparaît, c’est pour mieux hérisser de plaisir les poils des bras (« Shu », « Mille et une Femmes »…).
Sonora dévoile un groupe qui poursuit son chemin en prenant de l’assurance. On le remarque aussi à travers les paroles, où le français gagne de plus en plus de place. Un titre sur deux, en excluant les deux instrumentaux « Day 31 » et « Day 89 ». Inspirées, poétiques et violentes. Elles témoignent d’une maîtrise formidable. Si peu de maladresses, bien excusables, là où nombre de formations se plantent. Le nerveux et hypnotique « Silex », « Mille et une Femmes » et surtout le sublime « Cellule 7 » sont là pour en témoigner. Ce dernier, mélangeant la ballade de Rock américain à la langue de Molière, donne ce qu’il se fait de mieux dans le genre. La formation semble planer au-dessus des références de nos contrées (oui, Noir Désir) et enterre six pieds sous terre « nos » « rockeurs » « nationaux » pour vieux, qui auraient mieux fait de prendre leur retraite il y a plus de 50 ans.
Néanmoins, malgré ce gain d’assurance, on ne va pas faire l’insulte de parler de « l’album de la maturité ». Mallory ne s’est pas calmé. C’est toujours ces quatre jeunes avides de croquer la vie, de la brûler et d’en savourer le moindre moment. Les responsabilités, les contraintes, ils laissent ça aux autres, et ils ont raison.
Honey Moon était un très bon album de Rock Américain vintage, sincère et habité. 2, dans la continuité, enfonçait le clou. Sonora R.F Part 1, bien différent sans renier son héritage, passe encore un cran. On est passé de CDs qui revenaient régulièrement dans mes oreilles, lorsqu’une envie nostalgique se faisait ressentir, à un album que je n’arrive plus à quitter. Lorsque ses dernières notes arrivent, ne vient qu’une seule envie : m’y replonger. Ces disques-là sont rares, d’autant plus que celui-ci n’évolue pas dans un de mes styles musicaux de prédilection. Ils sont rares et précieux.
Tracklist :
01 : On The Shelf
02 : Zero
03 : Overwhelmed
04 : Day 31
05 : Cellule 7
06 : Shu
07 : Suzanne
08 : Day 89
09 : Silex
10 : Mille Et Une Femmes
Site Officiel : www.malloryband.net
Facebook : www.facebook.com/mallory.rockband
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