En cette semaine d’Halloween tant chérie par nos amis d’outre-Atlantique, ou horreur et festivités se mêlent en un effarent carnaval bariolé, c’est fort logiquement que nous nous pencherons sur l’une des sortie les plus gores et les plus malsaines de ses derniers jours, à savoir le second opus d’Agua De Annique emmené par l’ensorcelante Anneke Van Giersbergen. Je vous surprends ? Et elle donc, mes enfants … Et elle donc ! Car si l’ancienne frontwoman de The Gathering nous avait amadoué avec son premier opus solo aux penchants rock, puis définitivement charmé avec sa sortie acoustique suivante, c’est sans aucune gêne ni aucune pudeur que la divine hollandaise s’invite cette fois-ci dans votre chambre, avec un disque bourré d’accents résolument pop-rock.

‘You don’t really know me‘, nous chante t’elle d’un air enjoué mi-candide, mi provocateur, sur le refrain de ‘Pearly‘, le titre d’ouverture. Et nous ne pourrons que lui donner raison. En effet, le style surprend, voire déstabilise aux premières écoutes, tant nous avions pris l’habitude d’assimiler la belle à un registre rock posé, tantôt intimiste, tantôt mélancolique, en omettant goujatement sa pétillante personnalité. Ainsi, remis de notre surprise, nous en viendrons à déceler ça et là quelques intonations dignes des Cardigans (‘Hey okay !‘, ‘I want‘, ‘Wide open’) ou de scène pop-folk américaine (‘Sunny side up’), à la fois joyeuses et totalement insouciantes, sur lesquelles plane ce chant, ce timbre, reconnaissable entre tous. Toute aussi ensoleillée, cette étonnante collaboration avec l’hyperactif Devin Townsend (Strapping Young Lad, Devin Townsend Band et autres) sur ‘Just fine‘, s’inscrira parfaitement au rendu général de l’album, en penchant, cette fois-ci, vers des sonorités plus proches des Cranberries, voire des Smashing Pumpkins. Enfin, tout en le saluant, que dire de ce hit en puissance qu’est ‘Physical‘, hommage fortuit ou clin d’œil assumé à l’intemporel ‘The Logical Song‘ de Supertramp ?

Cependant, et c’est là l’apanage des grands, Agua De Annique sait judicieusement varier les tempos et les ambiances, passant d’une rythmique guitare/basse punchy résolument folk à des atmosphères plus feutrées, propices aux grands élans nostalgiques, comme sur un ‘Home again‘ au joli pont piano/guitare sèche, ou un ‘Wonder’ au délicat piano distillant subtilement ses notes cristallines. Soutenus par un chant émouvant au possible, toujours sur le fil, donnant une telle impression de fragilité que nous craignons à tout moment, le cœur près à chavirer, qu’il ne se rompe, ces morceaux ne pourront pas laisser indifférent et raviront les inconditionnels de la miss. Du trip hôtesse de l’air du premier album, seul le planant et cotonneux ‘Longest day’ subsiste, pour quelques minutes en apesanteur.

Anneke et Agua de Annique, en élèves appliqués et consciencieux, nous rendent donc, à l’image du relookage de la chanteuse, un disque soigné, très agréable à l’écoute, peaufiné dans ses moindres détails si l’on en juge au travail sur les secondes voix, les arrangements … Mais pourtant, les doutes de la première écoute, vite balayés par la bonne humeur communicative se dégageant de l’œuvre et le plaisir de voir rayonner et s’amuser la facétieuse hollandaise dégagée de ses obligations au sein de l’Assemblée batave, ne se dissiperont pas totalement et continueront à planer en une indicible et presque imperceptible crainte naissante, celle que la charismatique chanteuse, en simplifiant ainsi sa musique, n’aurait peut être plus beaucoup de messages à faire ou de sensation à véhiculer. Mais halte aux élucubrations, prenons simplement ce « In Your Room » comme un cliché de la carrière de la donzelle en cette année 2009, et laissons là, ce que le futur nous réserve.

Bodom