Ars Moriendi – Lorsque les Cœurs s’Assèchent ...
Line-up sur cet Album
Arsonist - Tous les instruments, chant
Style:
Black Metal Atmosphérique / ProgressifDate de sortie:
04 août 2023Label:
Archaic SoundNote du SoilChroniqueur (Seblack) : 9/10
Sorti début août, chez Archaic Sound, ce nouvel album d’Ars Moriendi m’a, dans un premier temps, surpris, pour ne pas dire décontenancé. Commençant un peu à me connaître, j’ai donc préféré le mettre de côté dans un coin de ma tête pour revenir dessus à un moment où je pourrais lui accorder toute l’écoute et le temps qu’il faut accorder à ce genre d’opus.
Car non, “Lorsque les cœurs s’assèchent” n’est pas le genre d’album qui s’appréhende vite fait – bien fait entre deux albums de black de seconde zone. Dès l’ouverture de l’album, avec le long morceau éponyme, on comprend qu’Arsonist va aller encore plus loin que d’habitude en enrichissant sa musique de sonorités insoupçonnées ou, en tout cas, inattendues. L’introduction de cette piste tout en chant clair, accompagnée de quelques notes, donne le ton, en quelque sorte. Une composition haletante qui va se dérouler en plusieurs vagues, tantôt plus calmes, tantôt plus tempétueuses, mais toujours avec ce côté progressif propre à Ars Moriendi. De plus, en chant clair ou saturé, les paroles sombres et mélancoliques s’avèrent parfaitement audibles et compréhensibles, ce qui permet d’apprécier d’autant plus les qualités d’écriture de son auteur.
Mais en terme d’étonnement, c’est un peu plus loin dans l’album que le one man band clermontois nous cueille. C’est particulièrement le cas avec le dernier morceau “Nous sommes passés” qui a un petit air de musique un peu pop sombre, limite gothique, qui m’a beaucoup fait penser à ce que le duo Farmer / Boutonnat était capable de présenter à la charnière des années 80-90. Tout en chant clair avec un ton légèrement désabusé, cette piste associe aussi bien des beats électro, une ligne de basse répétitive, que des claviers ensorcelants. Etonnant mais intéressant, surtout pour refermer un album qui ne manque déjà pas de surprises.
Plus frappantes encore sont les ambiances “néo médiévales” qui hantent “Voyage céleste”. Là, on se retrouve plongé dans un univers musical qui n’est pas sans rappeler Dead Can Dance ou Enigma avec ses chants grégoriens… ou pourquoi pas certaines parties de la B.O du « Nom de la Rose ». Ces ambiances, on les retrouve aussi un peu dans le morceau “Le blasphémateur” consacré au Chevalier de la Barre, exécuté en 1766 pour blasphème.
Ars Moriendi ne perd toutefois pas sa dimension extrême et black metal, loin de là. Il ne perd pas non plus son côté progressif qui s’affirme peut-être plus encore ici avec des mélodies et des structures de morceaux toujours plus travaillées. Là encore, les clins d’oeil, voulus (ou non), sont assez nombreux. “Le ver est dans le fruit” a ainsi un petit côté symphonique / gothique qui n’est pas sans rappeler le Cradle of Filth des Nineties. Il m’a aussi semblé distinguer quelques accent épiques et mélodiques (“Le ver est dans le fruit”, “Quand tout est bruit, fureur et haine”) que n’aurait pas renié la Vierge de Fer sur ses morceaux de bravoure et progressifs, je songe notamment aux ambiances d’albums comme « Piece of Mind » ou « Seventh Son of a Seventh Son ».
Alors voilà, toutes ces remarques mises bout à bout pourraient laisser penser que l’album est un peu décousu et va un peu dans tous les sens. C’est un peu le sentiment que j’ai éprouvé aux premières écoutes. Mais chemin faisant, je me suis ravisé. Oui, dans “Lorsque les cœurs s’assèchent”, Arsonist explore de nouvelles directions, mais tout cela est tenu par un fil conducteur qui tient à la sensibilité, à la culture (étendue) de l’artiste et cela dépasse largement le simple domaine musical.
Ars Moriendi puise ainsi dans un répertoire musical, certes varié, mais qui reste cohérent par ses intonations sombres. Tout cela donne à cet album des teintes gothiques, ambient, voire électro qui ne dépareillent avec le black metal déjà atypique du one man band. On retrouve par ailleurs, une inspiration qui continue de puiser aussi beaucoup dans l’histoire avec une appétence toujours affirmée pour les aspects tourmentées de la spiritualité. L’artwork parle de lui même, les chants grégoriens aussi, tout comme l’évocation du Chevalier de la Barre dans « Le blasphémateur ». Avec un style d’écriture toujours plus affiné, chaque chanson laisse le sentiment d’être un récit avec ses variations de rythme et d’intonation.
Passé un certain étonnement, “Lorsque les cœurs s’assèchent” se révèle comme un album foisonnant d’idées et d’audaces. Avec la finesse qui lui est coutumière, Ars Moriendi livre ici une œuvre singulière, sans pour autant chercher l’expérimentation pour l’expérimentation. On sent un musicien content d’avoir osé emprunter de nouvelles directions tout en restant dans son univers., bien joué monsieur Arsonist.
Tracklist :
1) Lorsque les cœurs s’assèchent (11:18)
2) Quand tout est bruit, fureur et haine (09:58)
3) Le voyage céleste (08:37)
4) Le ver est dans le fruit (07:30)
5) Nous sommes passés (05:31)
6) Le blasphémateur (12:09)
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