Line-up sur cet Album
Atavisma : L. : chant, paroles G. : guitares, paroles J.B. : basse G.D. : batterie Void Rot : John Hancock : guitare, chant Kent Sklarow : guitare Will Bell : batterie Craig Clemons : basse
Style:
Doom / Death MetalDate de sortie:
07 Février 2020Label:
Everlasting Spew RecordsNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9.5/10
J’aime chroniquer les splits parce que, parfois, les groupes sont tellement éloignés les uns des autres que l’on se demande comment ils font pour un jour s’accoupler pour donner naissance à un CD commun… Je me souviens notamment d’une chronique faite sur un split entre L’Esprit du Clan que l’on ne présente plus, bien de chez nous, et Cherish un groupe japonais. On peut se dire que ce genre de rencontre peut être fortuit, ou proposée par un label, ou même par le simple fait de gouts musicaux respectifs. Mais avouez que l’histoire est parfois assez emballante ! C’est ainsi que je choisis de faire la diatribe sur un split aux groupes très éloignés l’un de l’autre (tant mieux, pas de risque de covid-19 au moins). Il s’agit d’Atavisma et de Void Rot.
Faisons d’abord un peu plus ample connaissance si vous le voulez bien. Atavisma est un groupe originaire de Paris et qui a pris son envol en l’an 2013. Une formation assez récente qui a donc à son actif un split (déjà) en 2015 avec le groupe Maur qui vient… d’Indonésie ; un album sorti en 2018 appelé The chthonic Rituals, précédé d’un premier EP, et ainsi nous voilà en face du deuxième split du groupe qui, semble-t-il, aime les voyages ! Viendra ensuite, pour compléter le CD, le groupe Void Rot, qui nous vient tout droit des États-Unis, de Minneapolis pour être plus précis. Le groupe existe quant à lui depuis 2017 et a déjà sorti un premier EP qui se nomme Consumed by Oblivion. Nous avons donc deux formations relativement jeunes mais qui ont déjà fait un bon bout de chemin, dont l’une a déjà goûte à l’expérience d’un split CD, et je dois avouer que je suis très impatient de me frotter aux ambitions de nos deux groupes ! C’est parti, mon kiki !
J’ai hâte parce que l’artwork est de toute beauté ! Les couleurs me font penser à mon split préféré, et accessoirement mon CD de l’année 2019 : Atra Musica, des groupes Griffon et Darkenhöld. Ce rouge et noir fait l’effet d’une grande (Jeanne) masse sur moi [NdMetalfreak : au secours, « sauvez-moi » !]. La pochette semble nous happer dans un tourbillon fait de malédiction, de douleur et de noirceur et ce dernier nous entraînerait surement dans les tréfonds de l’Enfer. Je me retrouve aussi dans ce choix de couleurs puisque ce tourbillon me fait métaphoriquement penser au film Catacombes où, là aussi, les personnages descendaient tout au fond des entrailles de l’Enfer. Les noms des groupes apparaissent en haut et en bas et sont écrits sans leur logo pour mieux se morfondre dans l’obscurité ambiante. Typiquement, c’est le genre de pochette qui me ferait acheter le CD sans même me soucier du contenu ! Oui, oui, c’est possible, cela m’est déjà arrivé en plus. D’abord parce qu’une pochette est aussi un travail artistique complet, et ensuite parce qu’il s’agit de la première chose que l’on remarque d’un CD avant de l’écouter et qu’il doit, de fait, être attractif. Dans le cas présent, tous les voyants sont au vert (pour une pochette rouge, c’est un comble) : la pochette est redoutablement efficace et donne tout à fait envie de se plonger dans la musique, quand on aime ce genre d’ambiance abyssale évidemment.
Et la musique se veut résolument death et doom. La sécession entre les deux est nette surtout que le premier groupe à démarrer le split est Atavisma. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils n’y vont pas avec le dos de la cuillère pour nous arracher le cœur et l’âme. La musique est d’une noirceur incroyable, qui prend aux tripes et fait s’effondrer tout espoir. Un peu comme le baiser du Détraqueur dans Harry Potter et cette phrase de Ron Weasley : « je me suis senti bizarre. C’est comme si je n’allais plus jamais rire« . C’est exactement le ressenti que j’ai eu en écoutant les trois morceaux d’Atavisma.
Le point fort du groupe est de proposer un Metal fait de passages doom extrêmement noirs et lourds et de passages accélérés plus Death Metal qui, tout en gagnant en vitesse, conservent cette indescriptible noirceur. Je m’imagine volontiers dans les fameux bas-fonds de l’Enfer avec des flammes qui crépitent partout, des monstres et des démons qui m’assaillent. Je crois cependant que le point culminant de la musique se situe dans le chant qui a un mixage bourré de résonance et qui donne vraiment l’impression d’une voix intérieure torturante et oppressante. Autant la voix est parfois très profonde et basse, autant on peut entendre de véritables rugissements, comme une énorme bête au fond d’une grotte. C’est impressionnant cette palette assez large pour tantôt mettre en évidence davantage cette sombreur, tantôt de laisser éclater une colère enfouie. Je suis littéralement bluffé !
L’autre aspect qui m’a scotché est ce son. Le label nous vante le son si particulier d’Atavisma, je pensais à un énième coup marketing comme les autres qui déçoit car, nous autres chroniqueurs, on y croit dur comme fer ! Je vais d’ailleurs vous citer le passage: « The band, strongly influenced by the old school swedish sound and the riffage of the NYDM scene, add to the mix their own take of doom and dissonances to create an unique sound and dreadful sonic landscapes« . En ce qui me concerne, le fameux son old school suédois je l’adore tout autant. Mais parvenir à incorporer ses propres dissonances sans dénaturer le contenu et le sublimer comme Atavisma le fait dans ce mastering, c’est limite du génie. Parce qu’on devine assez vite que le groupe veut marier un univers d’horreur et de noirceur, dans un style de musique qui est à ma connaissance plus violent que réellement noir (je ne sais pas si je suis clair). J’avais retrouvé cette même prouesse chez le groupe Onirophagus qui fait exactement la même musique en termes de styles. Mais le degré de réussite est encore monté d’un cran avec ces trois morceaux et je ressors de la première moitié d’écoute abasourdi, sonné. De mémoire cela ne m’était jamais arrivé de me sentir gelé par l’émotion.
On devine d’ailleurs encore plus que le groupe joue la carte à la fois de la noirceur mais aussi de la lenteur très doom avec ses textes, courts mais incisifs, ce qui pour de la musique lente est un bel oxymore. Pas de grande dissertation : les phrases sont courtes, la déclamation par le chanteur est lancinante jusqu’à nous faire perdre pied. C’est d’ailleurs à se demander si, au final, le texte est vraiment important dans la façon de chanter, parce que ce dernier s’apparente plus à de la phonétique pour pouvoir rugir que de la lecture chantée on va dire.
Une première partie donc mille fois remplie dans sa mission. Atavisma m’a tout simplement mis le cul par terre avec sa musique d’une indicible terreur et son ambiance si sombre, à en faire pâlir de jalousie les différents dieux qui ont prêté leurs noms aux Enfers. Même Dante apprécierait de trouver en Atavisma la musique qu’il faut pour accompagner la lecture de son ouvrage.
Passons maintenant à Void Rot. D’ordinaire, je sais par avance que le deuxième groupe me laisse la moins bonne impression. Normal, j’ai été jusque-là toujours extasié par les premiers groupes des splits. Eh bien mesdames et messieurs, POUR UNE FOIS, ce sera exactement la même impression ! En mieux, non… mais en pareil ressenti, oui, complètement !
Void Rot est une plus jeune formation mais qui envoie déjà du gros pâté ! Le son est différent, on sent que les arrangements sont plus classiques du genre, il n’y a pas ce son original que j’ai trouvé précédemment. On est sur un mixage plus classique mais redoutablement efficace aussi. La faute aux riffs de « Ritual Invocations » qui démarrent sur une introduction à la guitare sur un son très malsain, avec une montée en puissance qui fait froid dans le dos. Le morceau démarre plus sur un Death Metal que Doom, histoire de nous mettre en bouche un apéritif de terreur et de mort. C’est en fait un constat plus général : Void Rot est plus un groupe de Death Metal que de Doom. Du coup les morceaux sont plus death old school mais avec un son malfaisant au possible.
Le chant a à peu près les mêmes arrangements que celui d’Atavisma par contre et cela fait mon grand bonheur, même si ce dernier a moins ces rugissements qui faisaient mon extase. Le chant est plus growl classique, très bas. La petite nouveauté est l’apparition en chevauchement d’un chant plus scream qui ajoute encore de l’horreur. Déjà qu’on était descendu très bas ; avec Void Rot, on est encore en train de creuser des dédales de galeries sous terre.
La chose que je trouve en plus, pour le coup, ce sont les parties un peu plus mélodiques de Void Rot : linéaires mais un peu plus mélodiques, elles ajoutent cette touche de détresse qui manquait pour ne pas tomber dans la lassitude de l’écoute. Balancer des accords, c’est bien ; y mettre un peu de mélodie ou de trémolo par-dessus, c’est encore mieux !
Retrouvant pas mal de points communs avec Atavisma, je vais avoir du mal à trouver d’autres choses à déblatérer sur eux mais je dirais que les textes sont encore plus courts que ceux précédemment cités. C’est impressionnant cette capacité de faire de la phonétique comme cela, avec de simples mots comme le fait Void Rot. Car oui, certains textes ne sont parfois composés que de mots, pas de phrases. Encore moins de fioriture, je pensais pourtant avoir atteint un stade en parlant d’Atavisma mais en fait non.
Bon. Autant vous dire que je ne suis pas sorti indemne de cette écoute mais je sais d’ores et déjà que tout amateur du genre Doom Death Metal avec de la noirceur doit absolument se procurer ce CD. C’est une pièce maîtresse et ce qui est encore plus louable est que cette pièce maîtresse est accomplie par deux groupes jeunes, avec donc une marge de manœuvre immense, une marge de progression tout autant grandiose et qui n’a probablement pas encore fait exploser son potentiel.
C’est simple de conclure cette chronique au final, parce que ce split est incroyablement bien réalisé et le mariage entre les groupes est total. A ce stade-là, on ne parle même pas de mariage mais de symbiose. Et la symbiose est juste à deux doigts de frôler la perfection, tout simplement. Pas besoin d’en dire davantage, ce CD est juste une machine de guerre.
Tracklist :
1. Atavisma – Speared Lungs (3:45)
2. Atavisma – Mold Upheaval (6:10)
3. Atavisma – Dread (5:25)
4. Void Rot – Ritual Invocation (3:39)
5. Void Rot – Necrotic Deity (6:19)
6. Void Rot – Accursed Earth (6:07)
Liens Atavisma :
Facebook
Bandcamp
YouTube
Liens Void Rot :
Facebook
Laissez un commentaire