Note du SoilChroniqueur (Kenpachi) : 8/10

Fribourg, le canton Suisse qui fait immédiatement penser à : Gruyère, crème double de la Gruyère et ses meringues au feu de bois, fondue moitié-moitié, vacherin fribourgeois, cuchaule, moutarde de bénichon ou ses vastes paysages bucoliques que l’on retrouve sur les cartes postales de Suisse, avec du bétail un peu partout. Mais c’est aussi un lieu où il fait bon vivre, une verdure chatoyante, du chocolat, et j’en passe… Hé, dans toute cette description, je n’ai parlé de musique nulle part ! Et bien, c’est peut-être bien parce que la scène fribourgeoise, à l’inverse de la scène suisse, est bien méconnue… Il fallait bien y remédier, parce que Darius apporte un peu de couleur au drapeau noir et blanc fribourgeois, avec ce nouvel EP !

Soyons clairs tout de même : lorsque je parle de couleur, ce n’est pas du rose à paillette qui sera lancé mais un arc en ciel de textures, plus que de couleurs éclatantes : effectivement, cet EP retrace bien le noir et blanc du drapeau fribourgeois ! Entre obscurité et lumière, calme et tempête, le quintette fribourgeois nous emmène au travers de quatre titres muets mais qui savent raconter des histoires au bon-vouloir de l’auditeur qui se laissera transporter par cette musique. Sur fond de Cult of Luna, Russian Circles ou encore Envy ou Bossk, Darius voyage entre le Post Metal, le Post Rock et le Post Hardcore en n’ayant guère envie de s’affranchir des limites imposées par chacun de ces styles, navigant de l’un à l’autre en laissant glisser leur musique entre douceur et chaos. Cela pouvait paraître un tantinet présomptueux que de présenter trois guitares pour un groupe proposant ce genre de musique mais il faut avouer que je n’en suis pas à ma première fois : m’étant déplacé pour voir Unfold il y a quelques mois de cela, les Lausannois d’Orso étaient présents pour effectuer leur première partie, un groupe de Post Metal/Post Rock qui m’était absolument inconnu jusqu’à leur arrivée sur scène ! Encore une fois, le même schéma : une batterie, une basse, trois guitares et une musique muette. Quelle ne fut pas la claque que j’ai prise avec cette puissance et ces émotions délivrées, une musique qui m’a vraiment pris aux tripes ! Et je n’étais pas seul : Dans la salle, un nombre non négligeable de spectateurs laissant leurs nuques danser de haut en bas, lèvres closes, les yeux grands ouverts… Le respect était imposé. Et si les natifs de Lausanne avaient su faire cela, il m’était absolument urgent de jeter une oreille sur le combo qui proposait un même schéma quant à leur line up. Et je dois bien avouer que je ne suis pas déçu du tout de la part de Darius, qui nous avaient déjà délivré un magnifique Grain en 2015.

A l’image des Lausannois, c’est une musique sobre, et pourtant loin d’être glaciale, bien au contraire ! D’un point de vue technique, ils ne sont pas là pour en faire des caisses, ils ont bien compris que la beauté se trouvait bien souvent dans la simplicité et le beau jeu, dans ce que la musique transmet directement. Et c’est au travers de ces quatre morceaux simples mais efficaces, entre des passages lourds et sombres, d’autres plus chaotiques et énervés, tout en passant par des passages plus calmes et lumineux, que le quintette nous transporte au travers d’une musique épique et qui relate des histoires individuelles à chaque auditeur selon son imagination, son ressenti, son humeur. Entre une batterie martelant parfois un rythme puissant et lourd, et délicate, des guitares distinguables, une harmonie des sonorités et des changements rythmiques, des murs du son dressés, explosant pour laisser place à toute la délicatesse d’un repos mérité, ils ont su trouver leur voi(x)e : celle de leurs instruments. Les sorties « post- » sont nombreuses et fleurissent plus que jamais aujourd’hui, toujours avec les mêmes patterns prévisibles et ne sachant pas se démarquer, voulant en faire des caisses techniques bien trop souvent ou allier des sons afin de pousser l’exploration musicale, quitte à ce que cela devienne trop ; mais, ici, Darius a su se canaliser et proposer une musique aussi brute que douce, un beau chaos maîtrisé. Quatre titres tout à fait distinguables et racontant chacun une nouvelle histoire, avec un lyrisme dévastateur.

Les Fribourgeois ne sont pas que de fins gastronomes, ils savent aussi nourrir les oreilles de celui qui les écoute, laissant place au blanc et noir de leur écusson, en voyageant au travers de leurs belles contrées, au travers de l’imagination proposée par leur musique.

Tracklist :

1. Glaucal
2. Charlotte
3. Pipistolet
4. Trace

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