Line-up sur cet Album
- Olle "Bull" Mårthans : batterie
- Johan Rockner : basse
- Tommi Holappa : guitare
- Fredrik Nordin : guitare, chant
Style:
StonerDate de sortie:
12 février 2021Label:
Heavy Psych Sound (réédition)Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 8/10
“Décrire les passions n’est rien ; il suffit de naître un peu chacal, un peu vautour, un peu panthère.” Comte de Lautréamont
Vous savez que c’est une galère sans fin de chroniquer des groupes de stoner? Parce que c’est le style sur lequel notre grande archive du metal qui se nomme sans suspense Metal Archives bute souvent. Il est vrai que la nuance entre rock et stoner est parfois, comme je l’expliquais dans d’autres chroniques, infime. Et que notre archive Internet préférée a du mal à répertorier autre chose que du metal. Ainsi par exemple, lorsque je devais faire la chronique de Dune Sea, impossible de trouver des informations tangibles sur Metal Archives! Pourquoi? Parce que s’il y a effectivement des tons stoner évidents, il y a aussi et surtout des tons rock bien marqués, voire dominants. Donc, patatra! Pas d’information pour moi, surtout que dans la moitié des cas, les groupes ou labels ne nous envoient que les morceaux en mp3, et démerde-toi pauvre chroniqueur pour écrire dessus. Tout cela, c’est vrai! Ce ne sont pas racontars! Et puis, l’autre extrémité consiste à trouver des informations sur les groupes de stoner comme Komatsu ou Appalooza, tout cela parce qu’ils sont plus estampillés metal (et encore…). C’est un vrai casse-tête, mais qu’importe. J’aime le style de musique stoner, et je suis prêt à faire des recherches tant qu’il le faudra pour faire les chroniques dues. Et le mieux dans l’affaire, c’est que pour la chronique du groupe Dozer, je n’ai même pas eu besoin de forcer puisque non seulement il existe une page dans Metal Archives, mais qu’en plus le dossier presse était impeccable. C’est parti!
Pour la petite histoire, cette chronique est en fait une réédition vinyle du dernier EP appelé Vultures qui était sorti… En 2013! Huit ans après donc cette dernière sortie, hormis cette réédition, pas d’autres CDs à l’horizon! En fait, Dozer est un groupe qui a eu comme qui dirait déjà quelques vies. Pas neuf comme les chats, mais pas loin. Dozer a vu le jour en Suède à Falun en 1995, a splitté plus ou moins en 2009, avant de revenir aux affaires en 2012 et donc cette sortie. Et puis, nada. Il faut savoir que ce groupe composé de quatre musiciens, les mêmes depuis le début, n’a sorti « que » cinq albums, et surtout fait inhabituel, huit splits! Un parcours atypique, ponctué par une pause de quelques années, avant de ressortir ce qui ressemble à un ultime EP en 2013, silence radio depuis et pour le 12 février, une édition vinyle chez Heavy Pysch Sound Records. Etonnant! Cela me laisse dubitatif, je me demande bien si cette sortie, au demeurant contestable dans son utilité, n’est pas une tentative désespérée pour raccrocher les wagons mais pour repousser le déraillement du train. Quoiqu’il en soit, je dois faire la chronique de ce Vultures, qui se fait vieux mais qui a subi, tout le paradoxe est là, un coup de jeune dans le format de disque le plus vieux qui soit. Curieuse sortie donc.
En faisant mes recherches, j’ai découvert que la pochette a changé. Avant, l’EP se pâmait d’une pochette au décor sépia-vert kaki d’un paysage brumeux, une sorte de petit butte avec deux pauvres arbres à moitié morts, le tout parsemé de tâches rouges qui font naturellement penser à du sang. On imagine bien qu’il n’y a pas un peintre ayant lâché son pinceau nappé de rouge dans ce décor! En dessous était écrit « pre-production demos from Through the Eyes of Heathens« , un précédent album sorti en 2005? Bon, comprendra qui le veut bien, je trouve cet artwork-ci plutôt pas mal, assez classique, avec des tons que j’ai déjà vus ailleurs comme sur Rengeteg de Thy Catafalque par exemple. Celui qui compose cette réédition est un peu plus recherché pour moi. Du moins, il prête plus au questionnement quoi. On a en effet une tête d’ours entourée d’ailes qui semblent être celles de vautours (logique), le tout sur un style assez travaillé de pointillisme qui donne un charme certain. Je préfère de loin celui-ci! La part de mystère intervient dans la présence de trois yeux sur la tête d’ours. J’ai cherché, j’ai juste trouvé des motifs de tee-shirts où il était écrit « l’esprit de l’ours à trois yeux » avec des attrapes-rêves. Sinon, je n’ai rien trouvé d’autres. Je pensais qu’il s’agissait d’une légende amérindienne par exemple, un truc du genre. Mais non! Même pas. Mais je suis resté sur la signification ésotérique (merci madame Quantum), qui symbolise la connaissance de soi et qui est traditionnellement posé- je vous le donne dans le mille – au milieu du front. Ce serait donc, selon moi, une représentation animale que l’on peut avoir lors de méditations transcendantales avec l’apparition de l’animal totem qui serait donc, ici, un ours. Voilà! J’aime ce genre d’artwork qui me fait cogiter, c’est bon les amis! Validé!
Sans surprise puisque j’en parlais dans mon introduction, la musique est bien stoner! Avec toute la panoplie significative qui va avec, à savoir une basse extrêmement forte, DES basses extrêmement fortes, des guitares avec un son bien garage et limite un peu sale, des rythmiques qui oscillent entre le bourrin et le rock énergique, et enfin un chant enraillé sans être exagérément amplifié. Cette réédition me permet en tout cas de constater que, si l’on part du principe que le son n’a pas bougé depuis 2013, ce dernier n’a donc pas pris une ride puisque c’est la recette qui fonctionne le mieux dans le stoner. L’émergence de basses fréquences bien viriles, avec quelques riffs rock et des soli bien ficelés quoique courts, il y a une part entre la sophistication et le côté brut de décoffrage qui m’a toujours laissé béat. C’est comme si vous preniez un bon gros biker bien biberonné au bitume et à la bière (notez la répétition de « b », cela se nomme une allitération) et que d’un seul coup il vous danse la macarena avec un déhanché sublime. C’est un peu ce que je ressens à l’écoute de cet EP de Dozer et qui fait que tout fonctionne à merveille : la sophistication et le brut de décoffrage en même temps. Un alliage efficace pour un résultat garanti. Chouette découverte pour moi dans cette première écoute.
Il y a juste un petit truc qui colle moyennement, sans être rédhibitoire mais suffisamment audible pour qu’on en parle, c’est la production. J’ai vu qu’en 2013, Dozer avait autoproduit son EP et cela s’entend. Il y a les qualités d’authenticité qui vont avec, et les défauts de cette dite authenticité. A savoir que le son est trop épais, trop gras. On n’entend trop les basses fréquences, du coup les guitares sont masquées, et la batterie n’est pas audible partout. Je précise que mon casque audio n’est pas bourré de basses fréquences comme à l’accoutumée, donc qu’il s’agit du son d’origine légèrement retouché. Et bien que légèrement, le son apparaisse comme beaucoup trop gras. En fait, je pense qu’il y a un problème dans l’arrangement de la basse. Soit il y a un effet en trop, soit elle est trop forte. Mais en plus, comme elle est usitée comme une guitare dans le cas de Vultures, ce serait un peu étonnant que ce soit un problème d’effet. Je pencherai donc plus sur un souci de mixage. Du coup, si vous voulez ne pas être trop choqué par le son, il ne faut pas écouter l’EP trop fort. C’est un peu frustrant quand-même… Dommage de ne pas avoir profité de cette réédition pour rééditer aussi la production. Et le plus curieux étant que ce défaut sonore disparaît selon les accords de guitares et basse, soit lors d’un morceau sur deux presque. C’est carrément dommage.
J’ai envie de dire, heureusement que les compositions sont bien aguicheuses, sinon on se lasserait vite de cette montagne russe sonore. Et j’en viens à me dire qu’il y a un gros potentiel chez ce groupe qui a lui-même fait le yoyo dans sa carrière. On reste sur du potentiel et ce, malgré les années d’existence (1995 ce n’est pas rien tout de même), parce que j’ai le sentiment que le quatuor suédois n’a pas encore atteint son apogée, son anoblissement. Pourtant, cet EP Vultures donne des bases certes old school, mais déjà très solides! Je pense qu’il doit manquer quelque chose de l’ordre de la motivation chez Dozer pour atteindre un summum particulier. Comme si le groupe s’épuisait depuis toutes ces années et en venait à faire de la musique sans motivation. Franchement, avec cet EP, il n’y a pas du tout de quoi se sous-estimer! Il est extrêmement plaisant, les compositions sont dignes des grands groupes du genre, et il manque ce supplément de motivation pour faire un groupe génial. On reste sur du très bon, j’ai beaucoup aimé les différentes écoutes que j’ai faites, cela inaugure forcément du bon pour la suite, en espérant que le groupe n’est pas définitivement fini… On verra dans deux jours.
D’autant que les musiciens ont du talent, c’est indiscutable! Les riffs sont très bons, entrainants et bien rythmés comme il faut. Chaque morceau jette une histoire comme une longue route avec des paysages différents, ce serait presque un appel au voyage. La méditation en musique est quelque chose de réel là encore, mais il faut vraiment la vouloir cette réalité. Les mecs, vous avez tout ce qu’il faut! Vous êtes bons, vous avez envie de faire de la musique rien qu’entre vous, l’alchimie fonctionne encore et cela s’entend dans chaque morceau. Foncez quoi! Proposez nous un album digne de votre talent, depuis 2013 il y a eu suffisamment de recul et de temps qui passe, pour nous pondre un superbe album de stoner. Il vous manque vraiment pas grand-chose pour réussir, je suis convaincu que vous pouvez le faire. Bon je leur parle directement, c’est assez rare de ma part et je ne suis pas certain qu’ils lisent ma chronique. Mais enfin, pour une fois je parle avec mes entrailles. J’ai un profond sentiment de gâchis qui s’installe, et cette réédition est certes une mise en lumière d’un EP qui est extrêmement bien construit et qui a eu peu de retentissements, mais elle est plus le reflet de ce que je martèle depuis le début : qu’il faut passer à autre chose.
Et le chant est très bon, un peu trop retouché par moment, surtout qu’à mon avis les retouches en question contribuent plus à dénaturer le spectre sonore et à l’envahir de parasites en basse fréquence. Mais la qualité vocale est totalement au rendez-vous, et comme on est bientôt à la Saint-Valentin, il se pourrait qu’à défaut d’avoir le priapisme compulsif de mes camarades Village Popole Antirouille et Ascirias, je tombe amoureux. Sérieusement, le chant est d’une belle puissance, avec ce côté rocailleux mais sans en rajouter des tonnes que j’aime beaucoup. Les voix rock’n’roll associée à la puissance, c’est toujours un résultat satisfaisant. La principale source de satisfaction, à ce sujet, intervient aussi dans le choix intelligent des mélodies refrain. Elles sont peu variantes mais redoutablement efficaces, et lorsqu’elles sont répétées comme un refrain classique, j’adore. Autant j’aime les variations de chant à outrance, autant avoir un EP qui propose des lignes de chant plus constitutionnelles, cela fait un bien fou. La simplicité, c’est décidément mon pêché préféré.
Je finirai cette chronique en vous disant que cet EP, qu’il fut sorti en 2013 ou bientôt en format vinyle, vaut largement le coup de s’y intéresser. On peut dire que l’âge favorisant le vin, cet EP a su se bonifier avec le temps et montre que la recette pour fabriquer du stoner est toujours d’actualité et qu’en plus de cela, elle fonctionne bien. Après, le souci de Dozer intervient dans sa motivation profonde à faire de la musique. Je pense que le groupe doit urgemment trouver cette motivation qu’il a perdue, pour atteindre enfin la reconnaissance qu’il mérite. Je suis partisan d’une réédition d’un EP ou d’un album si celui-ci a bien fonctionné comme c’est le cas pour Vultures, et qu’il y a une demande en amont de la part du public. Ici, on n’est plus sur une réédition sans réel but derrière, comme une sorte de lassitude ambiante. Alors, je finis sur un constat très bon, et je conseille vivement aux lecteur(e)s que vous êtes de vous pencher sur ce groupe et cet EP, et lui offrir la visibilité qu’il mérite. Mais pour ma part, j’attends le quatuor suédois au tournant.
Tracklist :
1.The Blood Is Cold (05:12)
2.The Impostor (04:11)
3.Last Prediction ( 03:21)
4.Vultures (03:42)
5.Head Ghosts (04:45)
6.To the Fallen (05:07)
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