Line-up sur cet Album
- Isaiah Mitchell : guitare
- Mike Eginton : basse
- Mario Rubalcaba : batterie
Style:
Stoner / Krautrock / Rock progressifDate de sortie:
28 janvier 2022Label:
Nuclear Blast RecordsNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9/10
« La terre est une quenouille que filent lune et soleil. » Jules Supervielle
C’est marrant que je pense à la quenouille, mais je suis en plein dans la Belle au Bois Dormant, grâce à ma fille. Bref! La Terre. Cette planète à peine plus grande qu’un grain de poussière dans une ville de la taille de New-York est notre lieu de vie suprême, sujette à des fantasmes, des peurs et des entrains politiques très actuels. Maintenant que les enjeux de nos futures vies semblent cristallisés autour du sort de notre belle boule bleue, il n’en demeure pas moins que l’on vrille un peu par moment. Enfin c’est mon point de vue. Et comme en vérité je ne sais pas quoi écrire en introduction, que je me perds en palabres inutiles, je vais directement passer au vif du sujet, à savoir la chronique du groupe Earthless et de son album à paraître nommé « Night Parade of One Hundred Demons« . En fin de compte, j’ai parlé de la Terre pour deux raisons totalement raccourcies : le film Don’t Look Up que j’ai vu et adoré même s’il m’a un peu remué, et le nom du groupe qui est directement l’antipode de ce que je viens de dire d’un point de vue métaphorique.
Derrière ce nom énigmatique, il existe en vérité un groupe qui est loin d’être un débutant du bas fond de l’underground. Earthless existe depuis 2001, quand-même! Le groupe nous vient tout droit de San Diego en Californie, les États-Unis étant un vivier formidable de groupes en tous genres mais spécialement de celui-ci, cela ne m’étonne guère de découvrir l’origine de ce dernier. Du reste il s’agit du même trio de musiciens depuis les débuts, offrant donc une belle stabilité et une sensation de connivence très importante dans le processus artistique. Un groupe qui en plus s’est montré prolifique avec les années, avec pas moins de six albums avec « Night Parade of One Hundred Demons« , mais également quatre albums live, cinq splits et d’autres singles ou EP que j’ai renoncé à compter. C’est donc un groupe qui réunit tous les ingrédients pour me plaire, plaire à un public large et curieux, avide surtout de projets sérieux et compétiteurs dans le ring de la musique extrême, mais pas trop! Sur le papier, en tout cas, cela s’annonce vraiment bien.
Pour la pochette, je dois dire que je suis moins surpris parce que ce genre-là, très fourni et presque surchargé, je commence à être habitué. Néanmoins, toute la question de sens de ce patchwork visuel est encore parfois un peu floue pour moi. Aussi apprécie-je que le label ou le groupe explique pourquoi ce choix et comment bien le voir. Il suffit donc de vous citer le groupe dans son dossier presse qui dit « Il y a une ancienne légende japonaise dans laquelle une horde de démons, de fantômes et d’autres goules terrifiantes descendent sur les villages endormis une fois par an. Connu sous le nom de Hyakki Yagyō, ou le défilé nocturne des cent démons, une version du conte déclare que quiconque est témoin de cette procession d’un autre monde mourra instantanément ou sera emporté par les créatures de la nuit. En conséquence, les villageois se cachent dans leurs maisons, de peur d’être victimes de ces envahisseurs surnaturels. » Cet album est donc directement inspiré de cette légende japonaise et l’on comprend tout de suite ce truc carnavalesque, nocturne et macabre. Cette pochette illustre bien cette légende. On y voit en effet des figures démoniaques, mais aussi des monstres, des figurines typées asiatiques, des dragons, etc. J’aime bien le choix d’une représentation en noir et blanc, ou dans un ton sépia qui donne une sorte de contraste du plus bel effet. J’aime vraiment bien cet artwork qui sent bon le concept précis, et qui illustre le tout avec luxe de détails. Je pensais d’ailleurs que l’image était une œuvre déjà existante avant la sortie de l’album, comme certains font avec des tableaux, mais il semblerait que non. Mais seul regret : qu’il n’y ait pas le nom de l’album et du groupe sur le devant.
La musique est un concentré de ce qui se fait de mieux dans le genre stoner. Trois morceaux très longs, qui constituent à eux seuls une heure de musique, et qui se tournent sur un objectif commun : faire une musique sur une base profondément stoner mais avec de multiples variations. « Night Parade of One Hundred Demons » est enveloppé ainsi d’influences assurément krautrock, ou de rock psychédélique, mais ce qui transparaît le plus ce sont des passages rock progressif, avec une montée en puissante très lente et des riffs rock marqués par le sentiment que ces derniers ont été dépoussiérés d’une étagère pour être ressortis tels quels. Cette musique d’Earthless sent bon l’ancien rock, avec un swing superbe et des guitares qui sonnent comme avant si j’ose dire! Maintenant il va de soi que la démarche initiale est de mettre en musique une légende macabre, c’est ce qui m’a toujours profondément surpris, que le style stoner en lui-même qui sonne comme une musique de camaraderie et de bonhommie, soit mis au service des concepts toujours plus sombres comme cela. J’ai surtout beaucoup aimé la dimension progressive qui est manifeste avec comme je disais trois pistes qui ne sont que des montées en puissance avec un riff à une guitare au début, puis l’arrivée tout doucement des autres instruments pour finir avec un ensemble instrumental franc et plus viril. Pas de chant dans « Night Parade of One Hundred Demons » comme sur la majorité de la musique d’Earthless. C’est un album qu’il convient de parer d’une mise en garde pour ne pas désarçonner l’auditeur, car un album qui propose un stoner aux forts accents rock voire krautrock et qui est construit sur une base progressive, ce n’est pas permis à tout le monde. Mais pour ma première écoute je dois admettre que j’ai bien accroché mais c’est normal, j’aime bien les trucs bizarres en musique.
La production est franchement bonne aussi, il faut se souvenir qu’il s’agit d’un trio de musiciens donc avec une base instrumentale réduite au strict minimum. Cela pourrait s’apparenter à une forme de simplicité dans un travail en studio mais il n’en est rien car en musique extrême, ou tout du moins saturée, il faut compenser la perte d’épaisseur. C’est donc un boulot important qui a été fait pour ce « Night Parade of One Hundred Demons« . Le son est impeccable, la guitare est bourrée d’effets d’où le côté krautrock ou rock psychélédique, la basse est omniprésente et l’on reconnaît facilement la patte stoner derrière, et la batterie fonctionne comme un vrai marqueur progressif, avec cette montée en puissance technique et rythmique, qui va crescendo et qui finit par s’agiter avec frénésie même l’espace d’un court instant. Non, sans exagérer c’est une très bonne production, j’aime ce principe de compensation quand il doit avoir lieu parce que c’est là que l’on voit tout de suite l’expérience et le sérieux du groupe. Earthless n’en manque manifestement pas!
Honnêtement je suis trop fatigué pour creuser davantage la chose, aussi vais-je conclure ici d’autant que l’album est instrumental. Une seule écoute de cet album, le sixième du groupe Earthless, « Night Parade of One Hundred Demons » est en tout cas un bel ouvrage, technique et complexe, sinon progressif. Un stoner aux frontières avec le rock psychédélique, le krautrock et le rock progressif, un album qui se veut ainsi énergique et posé aussi. Je considère ce sixième album comme une sorte de perpétuation d’une consécration déjà en marche pour nos amis américains, même si la pandémie a quelque peu gâché quelques cartouches de motivation et d’espoir. Néanmoins, le trio nous assène cet album comme une opération de rappel qu’ils existent, qu’ils sont connus et que ce n’est absolument pas pour rien! « Night Parade of One Hundred Demons » est un excellent album qui mérite d’être vécu, c’est certain.
Tracklist :
1. Night Parade Of One Hundred Demons (Part 1)
2. Night Parade Of One Hundred Demons (Part 2)
3. Death To The Red Sun
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