Line-up sur cet Album
- Emma Härdelin: Chant, Violon
- Stefan Brisland-Ferner: Violon, Viola, Vielle à roue, Claviers, Talharpa, Kantele, Moraharpa, Guimbarde, Arrangements, Guitare électrique, Mandoline, Choeurs
- Gotte Ringqvist: Guitare acoustique, Violon Hardanger, Choeurs
- Rickard Westman: Guitare électrique, basse
- Jens Höglin: Batterie, Percussions, Programmation
- Guests:
- Maria Franz: Chant sur ”Två Systrar”
- Anders Norudde: Moraharpa sur ”Ramunder”
- Ulf Gruvberg: Chant sur ”Lussi Lilla”
Style:
Musique Folklorique / Dark WaveDate de sortie:
06 novembre 2020Label:
Season of MistNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9/10
“La poésie est une union avec tous ou quelques-uns, et c’est aussi hélas ! une solitude sans frontière.” Alliette Audra
La vérité c’est que la musique est une union sans frontière. J’avais une conversation intéressante avec des ingénieurs sons, et des ingénieurs studio, qui m’expliquaient que la musique est comme un arbre gigantesque avec des ramifications infiniment plus grandes et toujours plus nombreuses. Du genre à avoir sa propre planète entière rien que pour elle. Et il est vrai que ce n’est pas rare, encore à des âges avancés (ce n’est pas mon cas non plus) d’être encore surpris. Parce que probablement que la musique est le style artistique où les possibilités de création, d’évolution et d’innovation sont infinies. La musique a traversé les millénaires, et parvient toujours à nous estomaquer. Celui qui se dit « épuisé » par la musique ou qui tourne en rond n’est en fait qu’un camouflet à son manque criard de savoir-découvrir! Pour ma part, en trente ans, je pense avoir déjà découvert des styles de musique totalement bizarres, innovants parfois, et même des fois jusqu’à toucher du doigt le génie artistique. Je ne suis pas loin, ce jour, d’être à ce stade avec un groupe que je connaissais de nom, que j’ai confondu avec un autre lorsque j’ai opté pour faire la chronique de son dernier album, confusion que j’ai fini par bénir des Dieux tellement cette découverte valait le détour! Il s’agit du groupe Garmarna et de son dernier nouveau-né appelé Förbundet.
Du groupe, je connais l’album Guds Spelemän puisque je l’ai à la maison et que j’adore cet album. Mais ma découverte est plutôt récente, aussi ne connais-je que peu de choses sur le groupe. Je sais simplement que Garmarna est suédois, que la formation musicale existe depuis… 1990, soit l’année de ma naissance! Et qu’à l’heure actuelle, après trente années d’existence, que le groupe fête indirectement avec la sortie de Förbundet, il y a huit albums, dont une réédition de la démo éponyme sortie en 1993 qui ont vu le jour. Je trouve que pour trente années, il y a peu de sorties. La faute à un trou dans le curriculum vitae de 2001 à 2016. Un silence musicale anormalement long, inexpliqué à ma connaissance, et qui laisse un peu dubitatif. Pour le reste, on notera que Garmarna est une « vraie » formation musicale avec une équipe de six musiciens et de trois invités sur Förbundet. J’ai juste écouté par acquis de conscience, l’album 6 pour me donner une idée de ce soudain retour aux affaires pour nos amis de Sundsvall, et je vous dirai plus bas mon constat sur l’avant et après.
On va, une fois n’est pas coutume, commencer par la pochette. Alors, on va être clair dès le début, histoire que le décor soit planté et que vous ne soyez pas surpris par ce que je vais dire : Garmarna n’a jamais brillé avec ses pochettes d’albums, c’est le moins qu’on puisse dire. Je n’ai pas choisi Guds Spelemän pour son artwork, mais bien pour sa musique. Il y avait de ce temps-là l’excuse des années on peut dire, disons qu’à l’époque les artworks n’étaient pas aussi bien travaillés que maintenant surtout dans la branche musicale qu’occupe Garmarna. D’ailleurs, quand on connait le style, on est même bien en peine de comprendre ces choix… Donc, Förbundet, qui pourtant est produit par Season of Mist, ne déroge pas à la règle en vigueur chez les suédois. La pochette est franchement moche, avec cette femme qui me fait penser à Morticia Addams mais en plus laide, sur ce ton gris franchement prononcé. Les cheveux, ou des ramifications qui sortent de la tête c’est selon, surfent sur le cliché éternel que je ne citerai même pas ici… Un œil rouge, un œil gris, un fond noir tout basique, le nom Garmarna écrit en rouge grossièrement et le nom de l’album en blanc. L’ensemble me fait penser à ces images réalisées sur Paint, que l’on a trop agrandi et qui ne sont plus du tout nettes! J’en viens à me dire, peut-être pour dédouaner le groupe, qu’ils font exprès de faire des pochettes aussi loupées. Mais ici, le doute n’est pas un bénéfice du tout. Je continue à ne pas aimer les artworks, il n’y a aucun changement depuis l’avant… Garmarna est, et restera, le groupe de musique qui, heureusement, sauve son concept par sa musique, sinon ce serait bien terne comme imagerie…
Le décalage intervient d’ailleurs très nettement avec la musique et donc, les fameuses pochettes toutes laides. Garmarna a quand-même remporté en 1997 un Grammy Awards suédois pour l’album que j’adore, ce n’est pas rien! Pour l’anecdote il avait été renommé en 2000 mais n’avait cette fois-ci pas remporté le trophée pour la chanson folk de l’année. Car oui! Le groupe produit une musique résolument folklorique. « Néofolk » serait même le style idoine mais comme le groupe existe depuis bien longtemps avant l’officialisation d’un style néofolk, on ne peut pas réellement l’étiqueter comme tel. Ou si! Mais il faudrait donc les considérer comme des créateurs, carrément. Bref! La musique de cet album n’a pas pris une ride puisque je retrouve, après une première écoute, la base séculaire qui m’a tant plu. A savoir une musique folklorique, avec peu d’incorporations autres, plein d’instruments traditionnels qui sont listés dans le line up et qui sont nombreux. Garmarna fonctionne en fait comme une sorte de troupe médiévale qui écume les marchés et les fêtes. La différence fondamentale avec d’autres groupes de folk est que les suédois utilisent des éléments industriels certes en petite quantité, mais tout de même suffisamment pour amener un vent de nouveauté dans leur musique et de modernité, et cela, c’est totalement nouveau! Guds Spelemän était purement et simplement si j’ose dire du folk. Förbundet a amorcé un changement radical mais qui me plait beaucoup : un passage vers une musique plus dark wave. Et ça, ça! Cela me sied énormément. J’adore la première écoute, elle est bien loin de me décevoir.
La chose qui ne change guère, mais qui fait mon bonheur, c’est la production. On dirait bien que Garmarna tient à conserver cet univers folklorique et un peu vintage dans le son car lorsque vous écoutez un album de l’avant pause et de l’après, vous entendez rapidement qu’il y a peu d’évolution. Certains diraient, comme moi parfois, que c’est une mauvaise chose d’être figé dans le passé. Mais c’est là que vous détectez les meilleurs groupes si l’on peut dire. Et je crois que Garmarna a trouvé le son qui lui correspond le mieux. L’enjeu principal étant désormais d’intégrer les fameuses instrumentations industrielles qui jonchent l’album et qui sont redoutablement efficaces. Elles sont d’ailleurs plus là en appui des mélodies principales, rendant la tâche en studio particulièrement importante car il faut parvenir à réunir des instruments qui n’ont pas grand-chose à voir entre eux. D’un côté des parties traditionnelles en acoustiques, et de l’autre des parties saturées et électroniques. Au vu du résultat final, il serait primordial de souligner que ce travail de production, accompagné par Season of Mist, déjoue tous les pronostics et fait de ce Förbundet un excellent album rien que pour le son qui découle. Un très gros boulot fait en studio que je salue comme il se doit!
C’est donc bel et bien un virage musical important qu’a amorcé Garmarna. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il fallait oser cette entrée dans l’univers tant décrié de la dark wave. J’adore cet album, d’une parce qu’il maintient ce qui fait la force de la dark wave en matière conceptuelle – heroic fantasy, gothique, horreur, etc. Ici, folklorico-fantaisiste voire mythologique – et de deux parce que l’album est très intelligemment préparé. Les compositions sont bel et bien construites, jonglant entre des parties folkloriques que l’on connait bien chez nos musiciens suédois, et des parties un peu plus électro indus qui ajoutent une touche plus nouvelle. Rien n’est abondant, rien n’est trop, tout est bien installé, bien rythmé quand il faut et bien planant quand il le faut aussi. Trente années d’expérience, cela s’en ressent vraiment. Garmarna est une valeur sûre pour son expérience du studio, sa créativité sans faille et sa capacité à se remettre en question pour pondre une musique nouvelle, et ce malgré le fait qu’il ait d’abord fallu attendre 15 ans, puis quatre pour ce nouvel album. Mais franchement, allez-y gaiement dans son écoute, si vous aimez la dark wave et les musiques traditionnelles, vous ne serez pas déçu du tout!
Il serait impromptu de ne pas préciser que les musiciens sont évidemment très talentueux et que le chant répond largement à mes attentes. J’aime la voix féminine et unique, hormis quelques accompagnements de chorale, d’ Emma Härdelin. Elle a cette voix qui me fait étroitement penser à celle de Heilung, mais avec des textes. Celles de Heilung sont plus des déclamations scaldiques ou des jeux de sonorité gutturaux, ici Garmarna utilise de vrais textes, écrits en suédois, qui est une langue très sonore avec énormément de jeux sur les consonnes et les voyelles. Une vraie langue de poésie et d’histoire que dame Härdelin parvient à retranscrire avec un talent vocal qui frôle la perfection. Je ne prends pas la peine de faire deux paragraphes comme je fais d’habitude parce que ce serait offense que de chercher à vous convaincre que ce groupe qui a trente ans d’expérience, et qui a vu peu de changements de line up, a encore ses preuves à accomplir. Clairement non. Tout est concordant, et rien n’est laissé au hasard, rendant la musique portée par le talent et le vécu. Rien à redire!
Je finis cette chronique sur un constat qui coule tellement de source que j’en viens à me demander pourquoi un groupe comme Garmarna a encore besoin que l’on prenne plusieurs écrits pour dire ce qu’ils sont, et qui sautent littéralement aux yeux. Quoi donc? Eh bien, que nos suédois sont des pionniers du genre folklorique, sinon qu’ils en deviendront un du genre dark wave avec ce nouvel album, « que » le septième. On pourrait même se dire que sept albums, venant d’un groupe aussi talentueux et sérieux, c’est finalement un gage de réussite certain. Définitivement l’un de mes groupes préférés en matière de folk, et je suis définitivement heureux que le groupe n’ait finalement pas arrêté sa route en 2001. C’est donc un immense oui pour ce nouvel album qui mélange nouveauté, innovation et nostalgie heureuse comme disait Amélie Nothomb. Ma seule question, sachant que je fais fi de la pochette moche, sera : mais que vient faire un groupe de cette envergure dans un label metal ? Sachant qu’ils vont sur des plates-bandes dont ils ne sont pas certains que l’herbe sera bonne connaissant l’avis tranché du public metal, quoique bien empreint de néofolk, pourquoi cette prise de risque ? J’espère sincèrement que ce n’est pas une erreur parce que ce groupe mérite sa réputation et que l’on le respecte ardemment.
Tracklist :
1. Ramunder (04:58)
2. Två Systrar (05:53)
3. Dagen Flyr (03:51)
4. Sven i Rosengård (05:24)
5. Ur världen att gå (04:52)
6. Vägskäl (04:56)
7. Lussi Lilla (04:35)
8. Avskedet (05:27)
9. Din Grav (01:56)
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