Note du Soilchroniqueur (Lusaimoi) : 9/10

Les préjugés. On en a tous. La peur de quelque chose d’étrange(r) qui nous pousse à les condamner sans même chercher à les connaître. À la sortie de « Des Deux l’Une Est l’Autre », j’étais passé à côté d’Hypno5e, malgré les bonnes critiques qui l’ont accompagné, tout ça parce que j’avais lu quelque part les mots « Nu Metal ». qui lui étaient associés. À l’époque, le Neo et ce qui s’en rapprochait, je venais juste d’en sortir, et l’envie de m’y replonger ne me tentait pas. Mais depuis, le temps a passé, j’ai mûri, et tout comme The Ocean m’a réconcilié avec le Hardcore grâce au premier CD du diptyque « Precambrian », Hypno5e me réconcilierait peut-être avec le Neo.
Et pour briser tout suspense, je dois le dire, ce n’est pas le cas. Tout simplement parce qu’Hypno5e ne fait pas du Neo Metal.

« Acid Mist Tomorrow », c’est bien plus qu’un simple album, bien plus qu’une succession de morceaux. C’est un concept. Démarrant sur du Hardcore aux riffs originaux, complexes et osés, l’album se calme presque instantanément, il monte dans des sphères acoustiques somptueuses pour mieux nous écraser à terre ensuite.
La musique d’Hypno5e alterne entre ces deux extrêmes, passant sans cesse d’un passage ambiant – beau, onirique, lumineux et lacté ; un doux rêve nuageux dans lequel nous accompagne une voix à la sensibilité cristalline –, à une partie furieuse, tourmentée, torturée, dissonante, malsaine, parfois martiale, aux hurlements écorchés, criards, comme implorant, suppliant qui les écoute. Une véritable réussite.
Un Metal schizophrène, où le merveilleux côtoie l’horreur, la plénitude touche la folie, et tout se mélange pour forme un tout aussi dérangeant qu’attirant.

Hypno5e nous capture dans l’univers qu’il a créé. Et si la totalité de l’album fonctionne sur cette alternance entre douceur et brutalité, chaque instant est unique, à chaque instant le groupe se renouvelle, montrant une nouvelle facette de ces deux opposés, les mélangeant, pour qu’au final, l’un ne fonctionne pas sans l’autre.
Construit en cinq parties, « Acid Mist Tomorrow » est à voir comme un seul morceau, sur lequel vient se poser l’histoire d’un condamné, se référant à la poésie de Bertold Brecht. On suit alors ses pensées, comme si la musique révélait l’état d’esprit de ce cerveau malade, entre les moments rêveurs et ceux de désespoir. Tout comme le titre de l’album accole trois mots, sans rapport, sans contexte, pour que les connotations naissent dans notre esprit, tout comme le livret ne nous délivre que quelques images somptueuses sans raccord apparent hormis des tons délavés, comme un polaroid, seuls quelques éléments de cette histoire sont distillés dans les morceaux, le reste est laissé libre à notre imagination.

Les Montpelliérains n’auraient pas pu porter d’autre nom. Leur musique nous hypnotise, on y plonge et s’y perd. On se noie dans les abysses qu’ils ont créées, avec juste ce petit élément, le « 5 » de leur patronyme, qui dénote, qui dérange. La production, parfaite, ne fait qu’accentuer les sensations égrainées par les morceaux. Les passages lourds n’en deviennent que plus massifs, les envolées n’en sont que plus légères. À écouter à le faveur d’un casque, les yeux fermés, pour s’enfermer et se perdre un peu plus dans ce monde.

Avec « Acid Mist Tomorrow », Hypno5e se détache délicatement de quelconque style de Metal. Metalcore, peut-être, pour son côté saccadé, Ambiant, pour ses envolées acoustiques. Mais surtout unique.
« Acid Mist Tomorrow », un monument.

Site officiel : www.hypno5e.com