Line-up sur cet Album
- Zach : batterie
- Ben : guitare, chant
- Phil : guitare, chant
- Guest :
- Ben : basse, guitare, chant
Style:
Doom MetalDate de sortie:
03 novembre 2021Label:
Nuclear BlastNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 8/10
“La déception est un sentiment qui ne déçoit jamais.” François Mauriac
Bon, j’avais prévu autre chose en introduction mais comme je suis chroniqueur depuis maintenant quatre ans, je ne peux que vous partager ce ressentiment qui m’a pas mal de fois animé en période d’écoute et d’écriture. Curieusement, beaucoup moins en étant dans la peau d’un auditeur normal, qui achète des CDs au petit bonheur la chance des fois selon si la pochette est belle ou si le bouche-à-oreille qui me rend d’ordinaire plus sourd qu’autre chose a fonctionné. La déception. Alors, étymologiquement parlant, cela vient du mot latin deceptio qui signifie « tromperie ». C’est assez étonnant de mettre une connotation humaine dans un registre totalement métaphysique. Ce que je veux dire c’est que la déception peut tout aussi bien venir de l’ordre de l’inconscient, de l’invérifiable, aussi suis-je surpris de voir qu’au départ, le mot relève de la stricte condition humaine. J’adore l’étymologie pour ça ! Pour le côté plus terre-à-terre, c’est un sentiment qui ne nous quitte guère quand on fait des chroniques, voire des reports de concert. Car cela nous force à une certaine remise en question, un retour dans une objectivité plus sereine, sinon nous basculons dans un truc plus sentimental et nous nous retrouvons emprisonnés dans nos faux semblants. Voilà pourquoi l’exercice de la chronique est un péril à part entière qui décourage vite. Certains d’entre nous, ce que nous appelons vulgairement nos « fantômes », sont très souvent en sommeil d’ailleurs à cause du fait d’être sur un album qui les déçoit et qu’ils ne parviennent pas à surpasser pour malgré tout écrire dessus. D’autres, surtout ceux qui débutent chez nous, viennent nous voir en disant « oui, j’ai fini ma chronique mais je ne trouve rien de franchement bien dans l’album, tu peux jeter une oreille ? Ou me relire stp ? » Cela, c’est très courant ! On apprend alors à nos chers et chères collègues à dégonfler le ballonnet et à écrire de la manière la plus analytique et objective qui soit. Et puis, parfois, il y a ceux comme moi qui disent les choses. Qui ne supportent pas le mensonge, qui considère que c’est trahir l’interlocuteur en face. Aussi, je dis les choses et j’assume. Même pour les grosses productions comme ici avec Khemmis et son album nommé « Deceiver« . Vous voyez venir le truc ? Vous avez raison.
Khemmis, avant d’être un groupe, est également le nom d’une ancienne ville égyptienne à l’époque Antique, qui s’appelait plutôt Akhmin. Elle avait la particularité d’être l’une des rares cités où l’on vénérait le dieu ithyphallique (ça va plaire à Antirouille tiens) Min. Du reste, pour nous autres contemporains, Khemmis est aujourd’hui un groupe américain, de la ville de Denver dans le Colorado. Existant depuis l’année 2012, le groupe sort cet album pour la première fois chez un label mythique, l’un des plus gros actuels : Nuclear Blast. Avant, les trois précédents albums étaient sortis chez le label plus underground mais bien connu de notre webzine 20 Buck Spin. Un vrai pas en avant d’enfer pour le trio américain, qui progresse donc de plus en plus et s’est même vu le droit de participer à une tournée avec Mastodon et Opeth. Excusez du peu ! Cela n’enlève en rien que pour un groupe qui existe depuis 2012, la discographie est un peu fainéante. Quatre albums avec ce dernier nommé « Deceiver« , ce n’est pas extraordinaire. Bon, il y a tout de même trois EPs, trois singles et un split de reprises sorti en 2017 avec le groupe Spirit Adrift. Je dois faire partie des rares chroniqueurs à se contredire tout seul dans ses écrits, on ne peut pas me taxer de malhonnêteté au moins. Quoiqu’il en soit, qui dit Nuclear Blast dit grosse production, on ne doit donc pas attendre un truc raté ni trop chiadé. Une production mainstream, de temps à autre ça ne fait pas de mal à une mouche.
Bizarrement, l’artwork de cet album me fait un peu mentir. Juste un peu, il ne faut pas déconner non plus. Mais je m’attendais à une pochette de ce qui se fait de plus moderne, je ne saurais d’ailleurs pas tellement l’expliquer. Et quelle ne fut pas ma stupeur en voyant cet artwork d’abord plutôt beau, ensuite où on sent qu’il y a quelqu’un derrière ce projet qui a mis sa griffe avec ferveur, et surtout d’avoir le sentiment que la dite pochette est aux antipodes de ce que le label sort habituellement. On croirait que le groupe est parvenu à imposer son créateur ! En tout cas, c’est une belle revanche. L’artwork est de style graphique qui fait penser à des représentations asiatiques. On reconnait très vite que le personnage central, le seul d’ailleurs à être mis en couleur, est The Witcher ou tout du moins un personnage qui lui ressemble beaucoup. Le reste derrière semble être des créatures fantomatiques, assez différentes puisque l’on a un soldat en squelette, une sorte de cardinal mort, un mage noir, un truc qui ressemble à un troll et un dernier larron qui me fait penser à un Nazgul dans « Le Seigneur des Anneaux ». Du reste, ce mélange de références, si tant est que ce soit réellement ces références, je trouve cela intéressant. Le nom de l’album étant suffisamment lambda pour donner lieu à toute sorte d’inspiration, on pourrait supposer que tous ces personnages, The Witcher y compris, soient des dupeurs selon la traduction du nom « Deceiver« . Je ne saurais moins interpréter cette main qui sort de l’eau comme si quelqu’un se noyait. On pourrait croire que le fameux vrai ou faux The Witcher « se noie » volontairement pour laisser place à un versant plus noir, méchant. En tout cas, je suis agréablement surpris ! Cette pochette m’a fait mentir et je suis content de voir que Khemmis a su conserver un semblant de décision sur son quatrième album. Si vous voyez ce que je veux sous-entendre sur les gros labels. En tout cas, pas mal ! Pas mal cette pochette, intéressante.
Pour la musique en revanche, on est effectivement sur ce à quoi je m’attendais, soit quelque chose d’assez mainstream. Difficilement reconnaissable tant la musique ressemble à des productions beaucoup plus grosses, à commencer par Amorphis en effet. On a donc un album de doom metal avec de fortes accentuations heavy metal. Par moment, on devine que le groupe s’aventure sur un registre un peu plus extrême en prenant quelques parcimonieuses miettes de black metal ou death metal, même si ces dernières restent quasiment exclusives au chant. Il n’y a pas réellement de grandes innovations en fin de compte, j’ai bien aimé le peu de soli que l’on retrouve pas mal en fin de piste, mais l’ensemble demeure assez commun, déjà entendu et sans réelle expérimentation. On devine que les intentions du groupe Khemmis sont surtout de l’ordre du commercial et cela ne m’étonne guère au vu du contexte de sortie de ce « Deceiver« . Après, que l’on aime ou pas, cela n’enlève en rien la qualité intrinsèque et générale de cet album. Pour le bien d’une démarche commerciale, il fallait pondre un son de qualité, c’est fait. Des riffs qui parlent au plus grand nombre d’entre nous, c’est sûrement fait. Et j’irai jusqu’à dire que les textes sont aussi très réchauffés. Si vous voulez apprécier comme j’ai pu le faire cet album, il faut donc le prendre dans son aspect le plus mainstream : divertissant. Sinon, si vous aimez l’analyse également comme moi, vous allez forcément être rassurés car vous n’aurez pas grand-chose à creuser, votre chronique sera courte (LOL me concernant) et tant mieux ! Retenez-donc que cet album, en première écoute, fonctionne bien. Il n’y a rien d’exceptionnel, n’étant pas fanatique du groupe en amont – chose très importante pour je pense avoir le recul sur ce genre de productions – je suis resté assez peu enthousiasmé. C’est un bon album à n’en pas douter, mais qui ne m’a pas branché en première écoute.
Bien entendu, la production a le mérite d’être excellente mais qui en aurait douté ? Sincèrement. Le son est très propre, on sent que derrière l’intention doom metal se cache un léger relent de death metal notamment dans le son des guitares, et comme le groupe place habilement quelques accélérations, on pourrait hésiter un peu entre du death metal mélodique et du heavy metal avec un son plus lourd. D’où le côté très Amorphis d’ailleurs. Pour le reste, comme je disais et sans suspense, la production est impeccable pour ceux qui adorent les sons modernes. Moi, j’aime bien même si ça dépend de qui. Ici, on peut reconnaître qu’au moins le groupe Khemmis assume pleinement sa démarche mainstream, ce qui lui enlève l’épine de la malhonnêteté. Ce genre de sons ne m’inspire guère plus d’analyse, aussi vais-je arrêter en vous disant que si vous aimez les grosses productions actuelles, vous allez forcément aimer « Deceiver« . Tout est nickel : guitares, basse, batterie, chant(s). Un ensemble instrumental bien mixé, bien masterisé, tout propre tout beau pour un album qui se veut le plus clean possible. Voilà de quoi entrer dans la cour des grands même si ce fut déjà amorcé !
Comme on est sur un album ultra « pour-tout-le-monde », je n’ai pas grand-chose à dire de plus. Je suis bien en peine de trouver un truc qui démarque « Deceiver » du reste des nombreuses sorties de gros calibres qui émanent l’année 2022, année de reprise de la culture dans sa résurrection. Etant plus attaché à des productions plus modestes, je n’ai pas été enthousiasmé par Khemmis. Je pense qu’il y a même mieux dans le genre doom metal, y compris chez des groupes plus discrets. Donc, sur un plan purement objectif, je dirais que « Deceiver » est un bon album, qu’il convient d’écouter ne serait-ce que pour donner à la formation une place qu’elle mérite sûrement au regard de l’abattage de moyens qu’il y a autour de ce disque, et que si c’est le cas, j’en serais le premier ravi. Définitivement je ne suis pas prêt à me pencher sur cet album, encore moins sur la discographie du groupe, non pas parce que je trouve Khemmis mauvais ou quoi que ce soit du genre, mais parce que je trouve mon compte ailleurs. Voilà !
Les chants sont très certainement le seul motif réel de satisfaction que j’ai sur cet album. Pourquoi ? Parce qu’au moins, le groupe, en trouvant deux voire trois voix différentes (dont une en invitée), au moins le doom metal se veut légèrement modifié par endroit. D’habitude je pourrais trouver cette alternance de chant particulièrement redondante et dénaturante, mais ici c’est tout le contraire ! J’aime beaucoup l’idée d’avoir un chant en growl, avec néanmoins une nuance apportée sur le peu de maitrise technique sur la voix en high scream qui est franchement mauvaise. Mais le chant clair, très heavy metal et celui qui est majoritaire de facto, est très bon. Un des rares motifs de bienveillance pour moi qui aime bien les chants clairs qui ne partent pas dans des envolées lyriques toutes les minutes. Au moins ici, le chant est propre, plus calme et posé et fonctionne à merveille avec la lenteur usuelle du doom metal. Un truc assez classique puisque des formations de doom metal alliant du chant heavy metal, il y en a des pleines brouettes. Mais je suis toujours content ! Cela reste une de mes constantes. Vous voulez me seoir ? C’est simple. Vous chantez en mode heavy metal tranquille sur du doom metal, et le compte est bon Laurent. Voilà au moins l’un des rares éléments que j’aurais su mettre en exergue ici, c’est bien. Je suis moins frustré du coup !
Voilà ! Ainsi vais-je terminer cette chronique qui, ma foi, fut assez courte à écrire, cela me change. Khemmis, groupe montant semble-t-il de la scène doom metal internationale, propose un quatrième album du nom assez passe-partout de « Deceiver« . Une sortie qui fleure bon le commercial puisque le groupe est signé pour ce méfait chez Nuclear Blast. C’est un peu ce que j’expliquais plus haut et qui fut le fil conducteur de ma chronique : ce genre de sortie, quand je ne connais pas le groupe avant, je n’accroche pas. Pourtant, tout devait me plaire. Un doom metal avec de fortes colorations heavy metal, quelques petites touches discrètes de black metal et de death metal, voilà de quoi normalement me réjouir. Sauf que, quand on découvre un groupe, que vous aimez l’analyse et que vous tombez sur ce genre de production mainstream à outrance, sans réelle saveur autre que celles qui plaisent à tout un chacun, vous n’arrivez pas à pénétrer pleinement dedans. Donc, on retiendra que ce genre de sortie ne peut que tenir des promesses, de grandes promesses d’avenir même, mais qu’à ceux qui y croient. Ce qui n’est pas mon cas. Vous vous ferez votre idée j’espère.
Tracklist :
1. Avernal Gate 07:10
2. House of Cadmus 06:46
3. Living Pyre 05:12
4. Shroud of Lethe 08:25
5. Obsidian Crown 05:48
6. The Astral Road 08:23
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