Note du SoilChroniqueur (Metalfreak) : 7,5/10

“Chat échaudé craint l’eau froide” (proverbe populaire depuis le XIIIe siècle)

Lorsqu’au printemps dernier, Ministry présentait la vidéo d’“Alert level” sur Youyoute, c’est la première sensation qui m’a traversé l’esprit. Un nouvel album de Ministry ? La belle affaire ! C’est que, depuis sa première reformation en 2011, on ne peut pas dire qu’on ait frissonné de plaisir en écoutant les “Relapse” (2012), “From Beer to Eternity” (2013) et “AmeriKKKant” (2018) du même groupe qui nous a un jour créé les géniaux “Rio Grande Blood” (2006), “The Last Sucker” (2007), “ΚΕΦΑΛΗΞΘ” (1992) ou “The Mind is a Terrible Thing to Taste”.

Même si l’album de 2018 laissait entrevoir un Ministry sur la pente enfin ascendante – sans pour autant crier au génie – le père Jourgensen avait quand même osé pousser le vice à nous balancer un “Surgical Meth Machine” de son projet du même nom que je n’aurais même pas osé offrir à mon pire ennemi. Après tout, son ennemi politique juré Deubeulviou n’étant plus à la maison blanche, n’avait-il plus personne à critiquer / dénoncer de façon aussi véhémente que sur les albums comprenant la période de 2001 à 2009 ? Y avait pourtant matière à !

Mais ce ne sont pas les trois successeurs à “The Last Sucker” qui proposaient une inspiration démentielle au génie du metal industriel !
Maintenant, si le Ministry millésime 2018 a commencé à débuter un semblant d’optimisme quant à la vivacité créative du maître Jourgensen, il n’y avait pas encore de quoi procurer une satisfaction à se taper le fessier au sol ! Ni même à sortir de son fauteuil lors de l’écoute d’“AmeriKKKant”. Non, pas de quoi envoyer ses charentaises au plafond… mais on se rassurait quand même… un peu !

Parce que, pour ma part, l’ère post-“The Last Sucker” a été un festival de déceptions de la part d’un artiste qui était pour moi une icone, capable de créer des albums absolument monstrueux à tout point de vue. Merde, “Rio Grande Blood”, je me le colle encore entre les oreilles régulièrement ! Alors on ne va pas se mentir : plus jamais il ne créera d’album aussi furieux… faut être lucide sur la question. Et quand on écoute ce petit nouveau, “Moral Hygiene”, on restera dans nos certitudes. Malgré tout, il apparait comme bien meilleur que tout ce qui a été sorti depuis 2007, même si on ne se relèvera pas la nuit pour aller s’écouter une nième fois cet album, on a enfin la sensation de se réécouter du Ministry… je veux dire, du bon Ministry !

Al Jourgensen semble avoir retrouvé (une grande partie de) sa hargne et de son inspiration : il faut dire que les évènements depuis deux ans pousse à gueuler très fort ses envies de contestations ! Alors pourquoi se priver ?

C’est avec un line up remanié que Ministry revient ! Si Al Jourgensen reste accompagné de John Bechdel aux claviers, du guitariste Cesar Soto depuis 2015, du batteur Roy Mayorga déjà présent sur l’album précédent, on a droit à un nouveau bassiste en la personne de Paul D’Amour (Feersum Ennjin, Lesser Key, ex-Lusk, ex-Replicants, ex-Tool) et du guitariste Monte Pittman (Monte Pittman, ex-Prong, ex-Insanity, ex-Myra Mains, ex-The Citizen Vein) qui aura également officié en live aux côtés de… Madonna !

Et l’album commence tranquillement : “Alert level” ouvre le bal des presque enragés avec un titre certes efficace mais qui n’a pas l’impact ni la brutalité des bombes atomiques dont le groupe a été capable par le passé. Mais on ne va pas bouder notre plaisir : on a du bon Ministry, à défaut d’avoir du grand Ministry. Malgré tout, on sent que le groupe semble privilégier la mélodie aux outrances musicales d’antan : l’impression se confirme au fur et à mesure que les titres s’égrènent !

Le côté industriel prend également le pas sur le metal : après, ne nous trompons pas, Ministry reste Ministry. Hors de question que le groupe se trahisse ou se compromette d’une quelconque façon ! En titre vraiment nerveux et percutant, on a bien “Disinformation” et… ce “TV song #6 (right around the corner mix)” qui rappelle quelque peu l’esprit de “ΚΕΦΑΛΗΞΘ”.

Et, l’air de rien, la présence de Jello Biafra sur « Sabotage is sex » (mieux vaut ça que l’inverse) pour donner un petit côté plus punkisant au titre est particulièrement sympathique, autant que la présence de Billy Morrison (Billy Idol, Camp Freddy, Circus Diablo, ex-The Cult) sur la reprise des Stooges « Search and destroy ».

Pour le reste, c’est plus mid tempo, certes avec toujours autant de samplers et d’effets au mètre carré, mais les guitares se veulent moins incisives, les rythmiques plus sages et l’ensemble plus mélodique, voire facile d’accès que par le passé. Après, est-ce meilleur ou moins bien ? On va juste dire que c’est différent, mais dans le positif !

Ministry rassure à défaut de nous éblouir, nous fait passer un bon moment plutôt que nous esquinter les cervicales. Et rien que ça, ça me réconcilie avec lui… un peu !

Alors, « How concerned are you » ?

Tracklist :

1. Alert Level (6:04)
2. Good Trouble (3:53)
3. Sabotage Is Sex (5:10)
4. Disinformation (4:46)
5. Search and Destroy (reprise The Stooges) (4:28)
6. Believe Me (5:52)
7. Broken System (5:57)
8. We Shall Resist (4:30)
9. Death Toll (3:24)
10. TV Song #6 (Right Around the Corner Mix) (3:06)

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