Line-up sur cet Album
- Ivan Kulishko - Bass
- Eerie Cold - Guitars
- Ruen - Keyboards
- Lycane - Drums
- Dmytro Krutyholova - Vocals
Style:
Black Pagan MetalDate de sortie:
15 octobre 2018Label:
Svarga MusicNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9.5/10
(Sorti initialement le 4 Novembre 2016, l’album se voit réédité en octobre 2018 avec des titres bonus)
« La musique est la prière des païens. »
Cette citation d’Edouard Herriot résume à elle seule tout ce que je pense du paganisme. La musique est en effet le reflet de l’imagination et de la création personnelle, ce que prône le paganisme depuis la nuit des temps. Quel plus bel hommage peut-on rendre aux Dieux qu’en laissant parler sa foi personnelle et sa créativité?
Ma sensibilité au Pagan Metal vient essentiellement de là. J’ai toujours considéré les « mythologies » comme le meilleur reflet philosophique qui soit. Contrairement aux religions monothéistes qui donnent la marche à suivre sans possibilité d’ouverture vers les sentiers obscurs, le paganisme donne, selon moi, la meilleure réponse qui soit à la position de l’Homme dans l’univers : dans le ventre mou. La Nature, elle, n’a pas besoin qu’on la gouverne. Hubert Reeves a étayé mon opinion sur le monde par cette citation : « Je pense que l’humanité n’est pas nécessairement la favorite de la nature, que l’humanité peut très bien disparaître, que nous ne sommes pas une espèce sacrée ».
En écoutant Paganland, comme beaucoup de groupes avant eux, je n’ai pas pu m’empêcher de ressasser ma vision du monde. Pour que j’en sois arrivé à vous l’exposer, c’est que le groupe a été particulièrement efficace dans sa démarche.
Groupe existant depuis 1997, on pourrait presque les considérer comme des pionniers, sans pour autant les qualifier de « légendes ». Tel le phénix qui se consume pour mieux renaitre, Paganland a éteint sa flamme païenne en 2008, pour retrouver son flambeau en 2010. Comme si cette foi qui émane de leurs albums était indéfectible…
En fait, on s’aperçoit que le groupe a eu une période d’interrogation de 1999 à 2008 avec seulement une démo de sortie, essayant peut-être de faire son apostasie. Puis, entre 2010 et 2018, tout s’est accéléré : trois albums dont présentement From Carpathian Land, un EP, un single et un album live. D’ailleurs, autre chose à remarquer : le groupe a changé plusieurs fois de logo dans son existence. Détail peu commun quand on s’intéresse aux croyances paganiques aussi : le groupe vient d’Ukraine, pays tristement célèbre pour accueillir des groupes à mouvance néo-nazis, ou du moins catalogués comme tels. Ainsi, je ne suis pas insensible à cette découverte, je me dis qu’il y a au moins un groupe digne d’être pris au sérieux là-bas.
J’ai eu envie, comme cela m’arrive tout le temps face à un groupe pagan, de lire d’abord les paroles. Elles sont empreintes d’une poésie toute tournée vers la Nature et les paysages des Carpates. Lire les paroles de From Carpathian Land, c’est un peu marcher dans les forêts enneigées et sombres, avec un sentiment de quiétude qui contraste avec le style Black Metal qui complète l’idéologie du groupe. En fin de compte, je crois que l’on peut aisément trouver une définition à l’esprit païen dans ces textes : la Nature et ses millénaires traversés que l’on retrouve dans les arbres et les roches. C’est finalement assez simple : j’ai adoré lire les textes. Les mots choisis sont à la fois poétiques et à la fois sans fioriture, froids comme l’humilité qu’affiche celui qui a arpenté ces forêts et médité sur sa prose. Si vous êtes amateurs comme moi de beaux textes, vous ne serez pas déçus.
La pochette rejoint ce sentiment glacial et nostalgique : on y voit une forêt enneigée de conifères. C’est candide, la démarche du groupe n’en est que plus dilettante. Le logo du groupe sonne comme un crépuscule noir comme l’Histoire. Je la trouve envoutante dans son harmonie. Définitivement, Paganland nous entraine dans une promenade dans le temps…
Niveau musical, on retrouve un Black Metal grave et profond. Les riffs basculent entre un Black Metal classique si je puis dire, et des passages très épiques. Il y a pêle-mêle du Bathory, du Taake, du Abruptum, un peu de tout. Mais à n’en pas douter, l’esprit païen ressort parfaitement. On sent que la musique ne fait qu’une avec les croyances de notre hôte compositeur.
Il serait difficile de détailler chaque morceau tant chacun a son identité propre mais le tout donne une excellente harmonie à l’album. On retrouve une introduction, sept morceaux d’une longueur raisonnable (en moyenne six minutes) et une conclusion instrumentale pour une longueur totale de presque quarante minutes. Je me suis souvent attardé sur l’introduction qui est habilement composée pour nous mettre dans l’ambiance, je l’ai trouvée magnifique avec ce vieux clavier qui sonne comme ceux des années 90 qui me sont très chers, et l’entrée de la guitare acoustique qui rajoute de la gravité à l’ambiance. On notera bien entendu l’utilisation de percussions pour accentuer le tout. Bref, quand vous débuterez l’écoute de From Carpathian Land, vous saurez immédiatement vers quel horizon vous errerez. Les sept morceaux suivants, s’ils ont le mérite de proposer un Black Metal à la fois épique et froid comme une âme en peine, débutent eux-mêmes par des introductions envoutantes et parfois solennelles. En fait, ce qui fait la beauté de l’ensemble composé est cette simplicité qui, par moment, peut faire défaut si on a l’impression d’avoir déjà écouté, rabâché la même musique. Ici, vu la dimension subjective qu’incorpore la foi du compositeur, non seulement le côté « old school » n’est pas désagréable mais en plus il donne le sentiment de n’avoir jamais été entendu auparavant. C’est là toute la réussite de cet album ! Enfin, la conclusion est dans la lignée de l’introduction, instrumentale et du même acabit.
Finalement, From Carpathian Land est une ode à la Nature et à la dévotion de l’Homme face à sa grandeur. Il n’y a pas de superlatif suffisant pour décrire la magie de cet album. C’est une réussite totale et je sais que Paganland ravira (encore une fois, qui sait) tous les amateurs de Black Pagan plus underground que certains autres.
Tracklist :
1. Stozhary [Стожари] (Intro) (02:46)
2. At the Heart of Carpathians [У серці Карпат] (04:26)
3. Black Mountain [Чорногора] (06:38)
4. Belted by Spirit [Підперезаний духом] (06:22)
5. The Gloom [Морок] (05:29)
6. From Carpathian Land [З Карпатського краю] (08:32)
7. Chuhayster [Чугайстер] (Outro) (02:55)
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