Line-up sur cet Album
- Thanasis : basse
- Thanos : guitare
- Sakis : guitare
- Nick : chant
- Yiannis : batterie
Style:
Doom metalDate de sortie:
6 novembre 2020Label:
Solitude ProductionsNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 6/10
“Si l’espoir fait vivre, ceux qui vivent d’espoir meurent de faim.” Arsenic
« Le protée. Un animal fascinant qui a toujours suscité l’intérêt des biologistes. En effet, la plupart des cavernicoles sont les représentants de types très anciens qui ont disparu de la surface de la terre et dont seuls quelques représentants attardés ont persisté dans les profondeurs de la terre. Les naturalistes les nomment « relictes » ou fossiles vivants. S’il a été minutieusement décrit depuis le XVIIème siècle, on ne connaissait par contre rien de son comportement, de sa physiologie, de son développement. L’observation de cet animal dans son milieu naturel, les eaux obscures et profondes du Karst, étant impossible, les questions sur cet animal et sa biologie se sont multipliées durant trois siècles. Avec la construction en 1948 de la grotte-laboratoire du Centre National de la Recherche Scientifique à Moulis (Ariège), et la mise en place avec succès d’un élevage de protées, l’expérimentation rendue possible a permis de lever le voile sur ce curieux animal. »
Cette introduction tirée d’une thèse de l’école vétérinaire d’Alfort, en mode minute scientifique inutile, a pour but de combler mon manque d’inspiration. J’espère que cette présentation des protées vous aura permis de vous intéresser à ces charmantes bêbêtes que l’on trouve notamment dans la grotte de Choranche, dans le Vercors. Pour le reste, passons à l’étude d’un autre cas cavernicole (cas-vers Nicole), ou devrais-je dire de musique cavernicole, cette musique qui est enregistrée dans une cave très humide dans le sous-sol de papy et mamy Roger : le groupe Shattered Hope et son dernier album Vespers .
Shattered Hope est un groupe athénien qui a commencé à faire de la musique bien lourde en 2002. Dix-huit années d’existence pendant lesquelles le groupe a offert à son palmarès trois albums seulement, et deux démos entre 2005 et 2007. Sachant que les trois albums comptent ce dernier-ci, et qu’ils sont sortis entre 2010 et 2020. Une discographie assez mince serait-on tenté de dire, d’autant que le groupe se targue d’être, je cite sur leur Bandcamp, « The Greek masters of atmospheric doom death metal are now back with a new, third full-length album aiming to surprise and conquer listeners once again. » Bon. Un peu présomptueux comme constat, mais peut-être est-ce le cas après tout. J’aurais été mauvaise langue, je dirais que c’est facile d’être les maîtres quand on est le seul groupe de doom metal de Grèce, mais en fait il y en a ou a eu un paquet. Pour un pays qui s’avère être un vivier de plus en plus important de groupes majeurs, j’aurais été vraiment mauvaise langue en fait. Voyons si la suite de l’analyse de ce Vespers est évocatrice.
J’attendais, après cette affirmation pleine de prétention sur Bandcamp, le groupe au tournant. Ainsi attaquais-je par l’artwork, comme à chaque chronique. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que nos grecs ont mis les petits couverts dans les grands! Loin de faire dans la demi-mesure, ce design est de toute beauté et mérite bien la réputation que le groupe s’est octroyée. Vespers voulant dire en anglais « les vêpres », qui correspondent à des offices religieux qui sont faits pour marquer l’arrivée du soir et qui marquait le changement de jour liturgique. Et on est bien en accord avec cette arrivée d’une pleine Lune sinistre au-dessus des montagnes (ou collines). Ce qui est encore plus étonnant est qu’il m’est impossible de déterminer s’il s’agit d’une vraie photographie ou d’une image créée par ordinateur tant le travail de retouches qui est effectué amène le doute. Cet arbre au premier plan et les deux chaumières en fond amènent un tout petit peu de vie dans un paysage assez vide, sinistre aussi. La brume distille encore plus de « lugubrité » dans ce paysage en noir et blanc du plus bel effet. En fait, il me rappelle un peu l’artwork du groupe hongrois Eclipse of the Sun qui surfait sur la même logique, et que j’avais encensé. Je pense que l’on va sur une musique plus douce et abordable qu’elle n’était annoncée, mais je me trompe probablement. Quoiqu’il advienne, cet artwork, simple dans l’intention métaphorique mais très bien construit graphiquement parlant, me plait beaucoup. Bon premier point!
Par contre, pour ce qui est de la musique dans cette première écoute, la surprise est totale. L’album m’a été vendu comme du « doom death metal« , ce qui est une demi-vérité. Doom metal oui, totalement même! Death metal, non, pas du tout. Ou alors, au compte-gouttes, avec de très légères incorporations par-ci par-là, mais sans avoir assez de corps pour que l’on puisse nommer le style de cet album « doom death metal ». En fait, on est plus sur une sorte de doom metal expérimental, avec des influences diverses et l’utilisation d’instruments différentes de ce que l’on a l’habitude d’entendre. Ce qui me plait assez, même si je reste sur ma faim d’avoir un son ultra lourdingue et une atmosphère lancinante au possible. A ce sujet, l’aspect atmosphérique est très important et à mon avis, pas assez mis en avant dans la présentation du groupe. Ce qui me laisse un peu perplexe finalement, c’est cette impression que j’avais également ressenti à l’écoute de la démo de Ghostlord, et qui prédomine ici : que le groupe s’est trompé dans sa démarche. Moins certainement que le dernier groupe cité, mais avec des recherches de nuances dans la musique qui me semble incongrues. En tout cas, cette primo écoute ne me laisse pas de souvenirs impérissables, et je m’achemine vers quelque chose de décevant. Du moins le pensais-je.
Parce qu’il faut tout de même rendre à César ce qui appartient à la salade : la production est intéressante. Pas bonne, mais intéressante dans le sens original du terme. J’aime bien le son des guitares et de la batterie, quoiqu’un peu trop « organique » à mon gout et manquant un peu d’épaisseur justement. Mais pour les ambiances aux claviers, les arrangements un peu électro ou industriels, j’aime beaucoup. En fin de compte, la production sonne originale parce qu’on a des riffs d’apparence très lourds mais qui ont un son de guitare très aigu, c’est assez surprenant de prime abord mais pas désagréable après quelques écoutes. Après, on est d’accord qu’on ne se pliera pas les vertèbres de haut en bas avec violence sur ses riffs, ni même que nous ne créerons pas de moshpit d’ultra agressivité dans une fosse, tant le son est aigu. Mais au moins, il y a cette part atmosphérique qui me semblait être prépondérante et qui amène un sens intéressant à la musique de Shattered Hope. Une production qui divisera les auditeurs je pense, une prise de risque surement, après « courageux mais pas téméraire » dit l’adage, encore faut-il donc assumer ce choix. Et je ne suis pas certain que ce soit le cas.
Si l’on reste stricto facto sur la composition, je trouve les morceaux divisant. Pour deux raisons principales : la structure assez variable, limite progressive parfois des pistes, et la longueur des morceaux. Dans le premier constat, la variabilité des riffs est une donnée importante, qui forge probablement l’identité musicale de Shattered Hope, et cela sans être pleinement convaincu puisque je ne connaissais pas le groupe. Mais il faut admettre que dans certains morceaux, cette variabilité est trop utilisée, au détriment de la logique musicale. Cela donne quoi? Tout simplement que j’adhère super bien à de nombreux riffs, mais pas du tout à certains. Il y aura d’ailleurs un rare juste milieu entre cette détestation profonde de certains passages, et l’adoration des autres, un vrai ascenseur émotionnel. Pour ce qui est d’ailleurs de l’émotion, la variabilité des riffs pousse le paroxysme jusqu’à nous faire procurer des émotions totalement différentes, et nous perdre dans l’écoute. Vous prenez le riff de début du morceau In Cold Blood, et celui de Verge, vous en conviendrez que vous ne ressentirez pas les mêmes choses. Et le deuxième constat intervient comme je disais, dans la longueur des morceaux. En soi, c’est une donnée hasardeuse puisque selon que l’on accroche ou pas dans l’écoute, cette dite longueur ne dérange pas. Mais ici, elle ne me dérangerait moins si les compositions étaient plus unilatérales que cela. Là, il faut un gros effort de concentration pour accrocher aux pistes, alors quand on sait qu’elles durent en moyenne onze minutes… Un vrai calvaire par moment. Difficile de trouver une constante dans le travail de composition, la seule étant le doom metal, ce qui est bien trop peu… Vous voyez le souci?
Mettant de côté cette aspérité musicale, je suis cependant bien impressionné par la qualité des musiciens. Franchement, parvenir à pondre des morceaux d’onze minutes avec autant de fléchissement « riffique », cela force le respect. Ils sont polyvalents en tout état de cause, et loin de me décourager, je suis sous le charme. Après, j’aurais préféré comme cité précédemment que ces derniers gardent une même ligne directive dans le jeu, que l’on se perde moins et que l’on apprécie la lourdeur et l’atmosphère qui se mélangent dans une danse apaisante. Mais bon, au moins peut-on dire qu’ils sont très bons!
A un détail près. Car oui, on en revient à des fondamentaux et le chant en est un, et en tant que pièce fondamentale dans la structure d’un album, il se doit d’être raccord. J’attendais un chant puissant, ou un growl long et lent, qui colleraient plus à cette atmosphère musicale. En contrepartie, j’ai majoritairement un chant growlé mou, plat et sans saveur. Limite un grattement de gorge simpliste, sans aucune intention quelconque. Franchement, le chant principal est totalement à revoir selon moi, il ne va pas du tout avec le reste et mériterait que l’on change toutes les lignes qui concernent le principal. Les essais au chant clair et les parties plus puissantes sont en revanche mille fois plus intéressantes! Le chant clair est tellement beau, apaisant, que j’en viens à privilégier les morceaux qui en ont comme Verge. Pour le reste, les parties plus hurlées sont intéressantes, pas emballantes mais intéressantes aussi. Mais pour en revenir au chant principal, cet espèce d’indolence caractérisée, sans être des spécialistes ou quoi vous comprendrez vite l’importance d’être motivé quand on est derrière un microphone. Un minimum syndical est demandé, même dans des productions plus sales on a du chant qui tient la baraque. Ici, je suis désolé mais c’est une catastrophe. Cela dénature tout. Non! Vraiment, ni fait ni à faire.
Bon bon bon… Je vais conclure ici, et il était temps. Ce groupe venu du pays des plus grands héros mythologiques a aujourd’hui un de ces représentants qui ont montré le moins d’humilité et le plus de prétention. Triste constat mais ce Vespers , troisième album du groupe Shattered Hope, ne remplit pas son objectif principal, à savoir être à la hauteur de cette description foireuse et risquée que j’avais mise en préambule de ma chronique. Il y a de bonnes choses qui forgent cet album et heureusement. Mais les compositions brouillonnes et dispersées, la production originale mais dérangeante, et ce chant… Nullissime, font que non. Shattered Hope n’est pas « The Greek masters of atmospheric doom death metal ». Au mieux un vassal, au pire un paysan sans terre mais pas un seigneur. Et cet album est l’illustre exemple qu’il faut savoir d’abord de quoi on parle avant de balancer qu’on a sorti un album génial. A revoir, ou pas.
Tracklist :
1. In Cold Blood 13:08
2. Verge 12:01
3. Συριγμός 11:48
4. Towards the Land of Deception 11:31
5. The Judas Tree 15:21
Facebook : https://www.facebook.com/pages/Shattere … 4213310348
Bandcamp : https://shatteredhope.bandcamp.com/
Site officiel : http://www.shatteredhope.gr/
Myspace : https://myspace.com/shatteredhopegr
ReverbNation : https://www.reverbnation.com/shatteredhope
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