Note du SoilChroniqueur (Hibou Noir) : 8,5/10

Je suis le genre de mec qui dit qu’il est dur de faire un album intéressant quand on fait du black metal atmosphérique « à la Burzum » (les guillemets sont très importantes).

Or, Skialykon (en grec « l’ombre du loup ») fait partie, comme son aîné sus-évoqué, et comme ses autres influences que je vais détailler, d’un projet que je qualifierais de « total ».

En effet, ce one-man band venu de Calabre (Italie) propose là un premier LP plein de nuances et de noirceur (cinquante nuances de noirceur?). Vulr (c’est le nom de l’homme orchestre aux commandes de cette machine) nous propose dès l’instrumentale d’ouverture aux claviers, « Praeludium » une véritable leçon de metal.

Un peu de Summoning ?

Attention, tout au long de l’album, nous parlons d’influences, de références, jamais de copie conforme. Skialykon réussit à digérer ces diverses influences, des plus anciennes aux plus récentes avec un grand talent, et à leur associer une production de qualité.
Au delà du côté Burzum/Bathory de titres comme « Suonator Celeste », « Guardini », on trouve des influences, peut-être inconscientes, plus légères et tout à fait bien venues, comme Agalloch, dans des morceaux comme le splendide « Ode alla Pioggia » (Ode à la pluie), dont certaines envolées font penser au one man band écossais Saor.

Ah, oui, il faudra vous y faire : Vulr ne chante qu’en italien. Désolé si vous ne maîtrisez pas la langue de Dante. Mais quand il s’agit de se faire plus sombre, plus guttural dans le chant, le Calabrais va puiser dans les racines grecques de sa région (« Ceimon Kai Nefos », et son riff à la fois lancinant, malsain et menaçant), pour évoquer la nature, la lune, les loups (on pense immanquablement à Moonspell en lisant les paroles de cette chanson ou d’autres : « Voltati e guarda/la luna piena,/occhio vigile astrale./Un’ode sacra/rompe il silenzio;/ululati dei lupi. » soit : Retourne toi et regarde/la pleine lune,/astral œil vigilant./Une ode sacrée/rompt le silence/hurlement des loups).

On touche au sublime avec « La morte di Iperborea » (la mort d’Hyperborée), et ses chœurs en chant clair qui accompagnent comme les voix des morts aux Champs-Elysées la voix principale, son riff puissant, ses claviers discrets et éthérés. Cette chanson est la preuve que de vieux « trucs » bien réappropriés, bien joués, peuvent faire un excellent morceau. Et elle est aussi la preuve (comme le reste de l’album) qu’un album de black n’a pas besoin d’avoir été enregistré au fond d’un garage pourri pour être bon.
On notera l’étonnante interlude « Skotádi », plutôt martiale/indus, et qui nous fait penser aux Suédois de Arditi ou aux Serbes de Legionarii.
Mais l’autre force de Skialykon, ce sont ses textes : citations d’Hésiode dans « Ai tempi di Crono » ou de Pline l’Ancien dans l’épique « Morte di Iperborea », nous avons affaire là à un fin lettré.

Et il faut bien le dire, c’est un réel plaisir de voir du changement dans les références du monde du black metal qui s’enferme dans ses références celtico-nordiques.
Si l’on évoque les textes, il est nécessaire d’évoquer la voix qui les porte. En effet, nous avons affaire là à un chant certes classique, mais puissant, nourri d’influences aussi bonnes que Bathory, Burzum ou Summoning.

Toute la colère de la Nature et des Dieux de l’Olympe (« Ai tempi di Crono », « Katharsis ») semble traverser, transcender le chant de Vulr, qui se fait, l’espace d’un album, Pythie.

En conclusion, un album épique, sombre, et qui vous fera réviser si comme moi votre italien est un peu rouillé.

Tracklist :

1. Praeludium
2. Suonator Celeste
3. Guardini
4. Ode alla Piogga
5. Ceimon Kai Nefos
6. La morte di Iperborea
7. Skotádi
8. Ai tempi di Crono
9. Katharsis
10. Metempsicosis

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