Line-up sur cet Album
- Sébastien Camhi : composition, batterie, percussions, chant
- Session :
- Julien Wack : guitare, trompettes
- Loïc Manuello : guitare
- Fabien Theveniaud : basse
- Guests :
- Laurent Salvia : piano sur 5
- Cécilia Camhi : chant féminin sur 1, 2, 3, 4, 5
- Joffrey Walz : violoncelle sur 6
- Aymeric Schwartz : violons sur 6
- Nathalie Olmi : chant féminin sur 3
Style:
Black / Death MetalDate de sortie:
02 janvier 2021Label:
Soussol.assoNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9/10
« Que Noël revienne, que Noël revienne, que s’arrêtent enfin ce déclin, cette mort, cette ruine !
En route, bergers !
Fixez l’Orient profond.
Ne voyez-vous poindre ni le jour ni l’aurore ?
Ne voyez-vous pas encore briller sur Bethléem, le Soleil nouveau-né ? » Guido Gazelle
On a tous des moments dans une vie qui resteront gravés. Je ne dis pas cela pour faire un genre de teasing de cinéma, mais j’ai vécu comme tout un chacun des moments vraiment incroyables. Je ne parle même pas de cette crise sanitaire que nous vivons mais que j’espère, nous raconterons à nos petits-enfants avec fierté, sinon avec un peu plus de détachement. Cependant, quand on est musicien, on connait tous nos premières expériences, comme de jeunes jouvenceaux. La mienne en tant que musicien (car la naissance de ma fille restera toujours sur la première marche des moments de bonheur de ma vie) est celle de ma première expérience studio. La vraie, parce que pour un autre album qui sort cette année, j’ai été invité au chant et je n’ai pas vécu tout le processus d’enregistrement de l’album. Mais celle qui annonce mon premier vrai projet concret, je l’ai vécu avec un tel enthousiasme, à la hauteur probablement du stress que je me mettais face à l’enjeu, qu’encore aujourd’hui j’aimerais y retourner. Je me suis aperçu, non sans le garder pour moi, qu’un passage en studio c’était une folle remise en question. De nous-même, de tout ce que l’on croyait savoir, de notre technique instrumentale, de notre rythme nycthéméral, de notre préparation physique en amont (que je pense avoir fait de manière optimale), et de tout un tas de facteurs encore que j’oublie. Mais en tout cas, par son professionnalisme et sa gentillesse, j’ai vécu un vrai tournant dans ma vie de musicien amateur. Cette introduction est liée à mon expérience puisque c’est une chronique ouvertement coup de cœur et coup de pouce. C’est mérité, largement. Aussi vais-je vous parler de l’album « Light » de l’one man band Stars of Bethlehem. En espérant que vous allez avoir le même enthousiasme de puceau que moi.
Stars of Bethlehem est le projet de Sébastien Camhi, producteur et gérant d’un studio d’enregistrement dans le Var, à Vidauban, qui se nomme Studio Artmusic. Principal compositeur de ce premier album nommé sobrement « Light« , on s’aperçoit en regardant dans la jaquette que notre camarade s’est entouré d’une multitude d’artistes et personnes pour l’enregistrement de cet album. Pas moins de huit, dont sa propre épouse. Un projet ambitieux sur le papier, sorti sous l’étendard d’une association que je ne connaissais pas du tout, soit Soussol.asso. Sur Sébastien Camhi, j’aurais bien quelques anecdotes croustillantes à révéler, mais je n’en ferai rien. Je préfère vous dire que le sieur varois a officié dans d’autres groupes avant de monter son projet, les groupes comme Circoncision (venant de lui, cela ne m’étonne guère) un groupe de black metal parodique, Sideblast dans un registre thrash metal aux relents black / death metal, Blackout qui se situait plus sur du heavy thrash metal, mais tous ces groupes ont été dissout depuis. Ne reste aujourd’hui des prémices prometteuses de notre bon musicien producteur que ce Stars of Bethlehem avec un album sorti en début d’année 2021. Le nom fait déjà un peu plus sérieux quand-même! On sent que cela va envoyer du bois comme Jean Lassalle sur Antoine de Caunes. Du lourd qu’on vous dit! Pour quelqu’un qui aimait bien les glaces dont la marque commence par H, fut une époque… Mais je ne vous ai rien dit.
Parlons du support graphique si vous le voulez bien (ou si vous ne le voulez pas, c’est pareil). « Light » se dote d’un artwork plutôt réussi, sinon d’une visibilité sincèrement appréciable, avec ce ton lumineux et d’une couleur un peu sale, oscillant entre le blanc immaculé, le rouge sang voire rouillé, et quelques éclats légèrement gris-vert d’un effet rocailleux et un peu pourrissant. On devine que même si l’effet rocheux est manifeste, ce n’est pas l’objectif principal de l’album. Le point clé de ce design, c’est le personnage féminin au milieu de l’avant-pochette. En position fœtale, sinon de protection, on croirait que cette femme se protège d’une déflagration violente. Mais au-delà de la symbolique de cette lumière aveuglante qui est renvoyé par la pochette et dont la femme semble se protéger, on pourrait y voir une forme de régression avec cette position fœtale qui est un mécanisme naturel de régression comportementale. Par cette position qui renvoie à l’état d’embryon, ce personnage semble chercher ce qui était de plus sécurisant à l’époque de son développement : l’utérus de sa mère. Ce n’est pas un hasard si nous nous mettons dans cette position en cas de danger! Tous les comportementalistes vous le diront. J’aime donc bien cette symbolique forte, cette femme qui se protège de cette lumière incandescente. On pourrait y voir un côté néfaste de la lumière et par métaphore, du savoir. Un choix d’artwork que j’évalue comme juste et bien retranscrit. Pour le style de musique proposé, cela me fait penser à l’album « -273,15°C » de Lebenssucht. Une pochette que je valide largement par son choix intelligent et sa métaphore potentielle autour du nom « Light« . Excellent boulot! Seul bémol : le manque de visibilité des protagonistes de l’album, le contraste du rouge ne rend pas franchement lisible le line up de session.
Pour la musique, Stars of Bethlehem se situant dans un registre probablement blasphématoire (normalement, on dit l’étoile de Bethléem), on devait s’attendre à un truc pas tellement catholique, en tout cas loin des chants liturgiques. C’est le cas. Loin de tomber dans une évidente facilité, la musique se présente entre un black / death metal mélodique et un blackened death metal dans le sens où les riffs des morceaux sont changeants selon les situations. Le black metal est le principal atout de « Light » mais par moment on croirait entre des passages death metal avec un son black metal, soit l’idée de parler de blackened death metal. Pour l’aspect mélodique de la musique, il se concentre essentiellement sur les riffs guitares bien entendu. La musique se veut donc brutale mais aussi dans une forme d’ambiance un peu mystique, sinon spirituelle. Un peu comme le ferait un Behemoth par exemple, qui recherche plus l’ambiance et la mise en scène que la technicité accrue. Une musique qui en tout cas est intelligemment construite avec des alternances riffiques intéressantes, des passages en blast beat de fort bon aloi et des moments plus subtils donc. J’aime surtout la partie un peu brut de pomme de « Light« , qui confirme que le black metal, peu importe la teinture qu’il empreinte pour se maquiller, est un formidable instrument de destruction artistique. A noter au passage quelques incorporations plutôt intéressantes comme un piano, des violons, du chant féminin dont un chant lead sur le dernier morceau. On sent que cet album est à l’image du mec derrière le projet : une oreille experte sur quelle orientation donner à la musique, avec une prise de risque certaine et payante sur les incorporations à ce blackened death metal qui sonne vraiment bien. L’album « Light » est une belle découverte, et la première écoute m’a été fort bénéfique. Chouette découverte!
J’aimerais oser parler de production, mais il faut comprendre une chose : Sébastien Camhi est producteur lui-même, ingénieur son et gérant d’un studio d’enregistrement. Autant vous dire que c’est comme disserter de la météo avec Evelyne Dhéliat quoi. On aura des arguments mais on se confrontera à un moment donné au savoir de la personne. Alors, je vais rester plus succinct, je vais essayer de moins rentrer dans des considérations techniques. Le son est en tout cas très à propos, avec une part assez intéressante d’un côté glaçant, à la black metal, avec des guitares avec un son nasillard et froid, qui donne cette fameuse coloration black metal à des riffs plus estampillés death metal. Il convient de dire que la batterie amène une légère touche de lourdeur mais suffisamment légère pour ne pas englober le tout, et donner une certaine épaisseur qui aurait été en trop. Le chant est bien présent, je reconnais bien l’identité du sire, qui aime mettre le chant à sa juste place mais peut-être un tout petit peu plus en avant qu’ailleurs. Cela donne in fine une musique sèche et directe comme un coup de grisou, et une ambiance très malsaine. On a vraiment le sentiment que « Light » est un camouflet opaque pour parler d’ombre et de noirceur tant les compositions sont agressives et aiguës. Pour ma part, je ne vois pas comment j’aurais pu trouver un point négatif à relever à cet album tant Stars of Bethlehem est mené par un expert en la matière. A bon entendeur!
J’ai eu quelque peu le temps de l’écouter cet album de Stars of Bethlehem, et j’en suis arrivé à la conclusion que cet album n’a pas d’autres ambitions que de faire de la musique, la plus authentique possible dans l’intention et le rendu final. Ce qui reviendrait à dire que « Light » est un album qui surfe sur la vague du death metal remis à une sauce plus funèbre que macabre avec une volonté intrinsèque de mélanger deux genres musicaux totalement blasphématoires et violents. Un peu à la manière d’un Belphegor qui a su conjuguer ces deux genres musicaux pour donner une musique à la fois brutale et maléfique, ou un Archgoat qui propose carrément les deux genres sans les mélanger, comme une émulsion, le résultat étant tout aussi dérangeant mais bandant. Stars of Bethlehem a donc construit un premier album d’une grande intelligence dans l’élaboration des morceaux, proposant des alternances riffiques ni trop techniques ni trop pompeuses, un juste équilibre sur chaque piste qui donne une osmose prépondérante. J’apprécie surtout les jeux sonores selon les envies, qui permettent tantôt cette émulsion à l’Archgoat, tantôt ce mélange extraordinaire à la Belphegor ou Behemoth. Vous l’aurez surement compris, « Light » est résolument un très bon album. Accessible quand on a l’oreille entrainée à l’extrême, intelligemment composé et sans autre objectif que d’en mettre plein les esgourdes. On pourrait extrapoler, au vu du potentiel et du talent de Sébastien Camhi, sur l’éventualité moins incongrue de construire un line up de concerts et dévaster quelques salles de concerts au passage, car à force de le faire dans les enceintes, il n’y aura que les retours et les façades pour supporter le choc. Un super album, vraiment.
« Un moment de votre temps monsieur » comme dirait le Vicomte de Valmont avant de mourir, occis par l’épée de son rival. Car il est l’heure du paragraphe sur le chant. C’est selon moi l’élément qui équilibre bien la musique. Il fallait en effet trouver un chant adéquat pour justifier de ce mélange subtil de black metal et death metal, et je trouve que généralement c’est un exercice difficile. Mais je peux me tromper, et Stars of Bethlehem me le démontre allègrement. Le chant est d’une technicité vocale impeccable, avec une sorte de scream ni trop haut, ni trop bas, en voix de tête, qui permet donc d’amener une touche très black metal à l’ensemble. Je pense que c’était le meilleur choix de technique vocal pour cet album, à coup sûr, mais quelques petits moments en growl medium ou carrément grunt grave aurait pu être tenté. Mais bon, sur le principe, il n’y a rien à redire, j’adore le chant. Puissant et incisif à la fois, tout ce que j’aime! Petite aparté sur le chant féminin de madame Camhi que je salue, et que j’apprécie beaucoup pour son côté macabre, un peu comme sur l’EP « Shatter » de Triptykon. Belle idée et belle voix, décidément on a du talent à Vidauban!
Alors, pour conclure cette chronique coup de cœur, je dirais que ce premier album de Stars of Bethlehem qui va d’ailleurs prochainement fêter son anniversaire, est une franche réussite. Une musique intitulée « Light » et qui se permet de flirter d’aussi près avec une sombritude aussi profonde, on ne pouvait pas rêver mieux! Ce blackened death metal, ou black / death metal mélodique selon les appréciations de chacun, est d’un acabit très intéressant, avec bien évidemment une production qui frôle la perfection, une musique qui se met au service d’une recherche d’osmose dans deux genres de metal qui pourtant sont déjà décriés tous seuls, et le résultat apporte un équilibre artistique qui laisse pantois. Je pense que ce premier album est tout ce que l’on pourrait attendre d’un croisement chromosomique qui relève plus de celle entre le cheval et l’âne : même apparence mais de gênes différents, et donc une présentation qui passe ou casse. Manifestement, « Light » a largement passé les obstacles potentiels, et ne demande qu’à avoir de la notoriété et pourquoi pas un petit frère pour bientôt. En tout cas, on croise les doigts, on espère. Parce que c’est un album extra!
Tracklist :
1. We are the Hord 04:57
2. Light 03:35
3. Night for a Year 05:49
4. From the Battle I Rise 03:35
5. Nostalgia 04:47
6. Apnea 03:11
7. Beyond the Abyss 04:07
8. Gehenna 03:51
9. Let the Evil Reign 05:19
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