Line-up sur cet Album
- Xabier Iriondo: guitare, shahi baaja
- Eraldo Bernocchi: guitare
- Jacopo Pierazzuoli: batterie
- Jo Quail : violoncelle
Style:
Sludge Metal / Noise AmbientDate de sortie:
07 mai 2021Label:
Subsound RecordsNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9,25/10
« Tout espace de certitude est un espace de mort car il annule toute possibilité de transformation » Carlos Buby
Je n’ai pas vraiment d’idées d’introduction ce soir. Il faut dire pour ma défense (même si je n’y étais pas forcé) que j’ai copieusement festoyé avec mes voisins et que j’attends que se dissout mon Doliprane. Oui, si vous l’avez zappé, c’est la fête des voisins! Et le moins que l’on puisse dire c’est que mes voisins portugais ont de quoi manger et picoler! Bref. Parenthèse refermée, je suis reparti pour de nouvelles explorations astronomiques pour cette chronique. Pas mes vapeurs d’alcools hein! On parle bien d’univers, de galaxie, de planètes. Et surtout du supervide. Selon Wikipédia, « En astronomie, un vide est un espace dont la densité de matière est extrêmement faible situé entre des filaments galactiques reliant des superamas, les plus grandes structures de l’univers. Ces vides ont généralement un diamètre allant de 11 à 150 Mpc. Lorsque des vides prennent de telles dimensions, ils sont parfois appelés supervides. Les vides situés dans des régions à forte densité de matière sont plus petits que ceux situés dans des régions moins denses de l’univers. » En gros ce sont les espaces que vous voyez quand vous regardez une cartographie du ciel. Il y a les amas d’étoiles qui sont ce qu’on appelle (et c’est d’actualité) les clusters, ou superclusters, et donc les fameux vides ou supervides. C’est relativement étonnant d’avoir un groupe qui traite par son nom de cette thématique. Le vide en lui-même est tellement un sujet vaste que je suis moins étonné dans sa symbolique que l’on en parle, mais quand il s’agit de l’espace cela me surprend fortement. C’est en partie pour cela que j’ai choisi de traiter de l’album The Giant Nothing du groupe nommé éponymement Supervøid. Oui, j’ai déjà fait le coup du choix d’une chronique par le nom du groupe ou de l’album, notamment le dernier en date étant Conclave (qui me l’ont gentiment souligné dans leurs commentaires et partage sur leur page Facebook). Voici donc la chronique spatiale et psychédélique de Supervøid et de son album The Giant Nothing! Go!
Supervøid est un trio de musiciens en provenance d’Italie et ce qui m’a totalement mis sur le cul, c’est le pedigree des musiciens qui ont composé ce groupe! Un peu comme le truc venu de nulle part, le grain de poussière insignifiant qui devient une énorme comète! Il faut savoir que le fameux trio n’est autre que Xabier Iriondo qui est l’un des meilleurs, sinon le meilleur musicien avant-gardiste et multi-instrumentaliste de ces dernières années. Vient ensuite Eraldo Bernocchi qui est un producteur de musiques de films et le co-fondateur de Sigillum-5, excusez du peu! Enfin, le batteur Jacopo Pierazzuoli et la violoncelliste Jo Quail qui n’en est pas moins une artiste reconnue en Europe. En fait, Supervøid est un collectif inattendu! Le genre que l’on découvre quand on écrit la chronique, et où on se dit « putain mais c’est pour ça que c’est une tuerie! » En tout cas, Supervøid a été fondé en 2017 et The Giant Nothing est à ce jour l’unique sortie des italiens. Autant vous dire que cela vaut vraiment le détour quand on voit les personnes qui pilotent le projet.
Ce qui tranche considérablement avec la pauvreté affligeante de l’artwork. En même temps, un hommage à un « géant rien », on devait s’y attendre. Mais je suis toujours dubitatif sur les pochettes qui n’expriment rien justement… Là, concrètement, à part une masse ronde métallique au milieu d’un espace gris foncé vide, avec même pas le nom de l’album et du groupe, je trouve que l’on va trop loin dans le néant artistique. C’est du délit culturel. Je suis peut-être un peu trop tranchant mais sincèrement, je ne vois absolument aucun intérêt à cet artwork. Typiquement le genre qui me fait ranger le CD chez un disquaire sans même prendre la peine de me renseigner sur le groupe. Je ne doute pas que les intentions de départ étaient bonnes mais Supervøid aurait pu par exemple représenter le fameux supervide de manière même plus nette, avec une cartographie du ciel étoilé. Mais poser une bille de métal sur un fond gris, je ne comprends pas totalement où veut en venir le groupe… Ce n’est ni fait ni à faire surtout quand on ne mentionne rien sur l’artwork. Aucun intérêt pour moi.
C’est encore plus flagrant de se rendre compte de l’extrême pauvreté de l’image quand on commence l’écoute de l’album. Supervøid présente un ensemble astucieux et incroyablement prenant de sludge metal, aux accents doom et surtout, SURTOUT, noise ambient. Les morceaux sont d’une longueur assez importante mais raisonnable pour le genre, mais sont surtout structurés selon un modèle immuable de passages saturés et relativement torturés, et de moments beaucoup plus calme, planant et limite spatiaux, faits d’instrumentations noise ambient aux claviers voire MAO. Mais la touche particulière de cet album, et plus largement de ce projet, est la présence du violoncelle qui donne l’impression, arrangements compris, d’être une ligne de chant. Le groupe revendique d’ailleurs cette originalité. Cela donne un côté impénétrable sur le plan verbal à ce projet musical. Après, j’aurais préféré par moment quelques passages de chant, le violoncelle n’étant pas un instrument organique comme les voix, mais dans son ensemble, la première écoute a été superbement agréable. J’ai vraiment eu un coup de foudre pour les pistes de cet album qui se suivent comme une histoire spatiale, ou comme une présentation d’un concept cinématographique. L’association de sludge metal et de noise ambient amène en tout cas un autre regard, plus sombre et plus froid, sur l’aventure spatiale. Un peu comme un Mission To Mars avec ces moments extrêmement durs et ces instants très planants. En tout cas, je parlerai probablement d’un petit coup de foudre pour Supervøid et son premier méfais The Giant Nothing. Associer deux musiques que j’adore, qui plus est sur une ambiance astronomique, et le tout jonglant sur des émotions contraires au fil des morceaux, c’était une vraie bonne pioche pour me mettre à genoux.
La production, si chère à mon cœur de chroniqueur (et de rockeur), est magnifique mais au vu du pedigree des musiciens, dont deux au moins sont producteurs de métier, on ne pouvait pas faire pire. On partait sur de très bonnes bases, notamment en prenant connaissance du curriculum vitae de nos acolytes italiens. Cela donne donc un album d’une grande finesse sonore, oscillant entre des parties guitares tranchantes et lentes à souhait, un son global d’une épaisseur certaine et très boueux à la sludge metal, et des envolées environnantes aériennes au possible. Il fallait trouver la bonne formule pour permettre à chaque passage de s’auto-suffire et de ne pas s’étouffer trop vite entre elles, et Supervøid a parfaitement rempli sa mission! Franchement, c’est incontestablement l’une des meilleures productions de cette année, presque cinématographique au niveau du soin, chirurgical et précis comme du papier à musique. Excellent!
Les écoutes suivantes m’ont permis d’appuyer encore plus un premier constat que je m’étais gardé de dévoiler tout de suite, c’est que l’album est d’une richesse composale assez folle. Outre les variations rythmiques et riffiques qui sont légion, il y a surtout ce gros travail de profondeur dans les ambiances qui donnent à chacune des sept pistes de The Giant Nothing une coloration totalement différente par rapport aux autres. Résultat : l’album s’écoute harmonieusement, sans difficulté y compris quand on n’est pas spécialement initié au genre si fermé du sludge metal et sa noirceur usuelle. C’est donc un regard conceptuel totalement revisité avec cette sombritude ambiante qui englobe la base spatiale de Supervøid. Et ça, j’ai adoré. Je me suis régalé comme rarement, les trois musiciens sont exceptionnellement bons et la violoncelliste joue tout à fait à propos, sans dénaturer l’ensemble trouvant sa place dans les compositions pourtant très fournies. Je suis donc sans appel face à l’un de mes coups de cœurs de l’année, il m’en fallait au moins un ou deux autres après Splendidula et Midnight Odyssey, voici donc ma troisième marche du podium avec Supervøid et The Giant Nothing.
On l’aura assez répété tout au long de la chronique donc on ne se répétera pas sur le talent des musiciens et comme il n’y a pas de chant, je passe donc directement à la conclusion! Supervøid est en quelque sorte un projet musical audacieux et génial, regroupant de formidables musiciens pétris de talent et d’expériences. The Giant Nothing est l’une des plus belles représentations du vide intersidéral et de l’angoisse qui en découle, un album mêlant sludge metal et de longs moments de noise ambient qui, quand on ferme les yeux, donnent presque l’impression que l’on s’est perdu entre les galaxies, loin de notre Terre! Un voyage musical angoissant mais tellement jouissif que l’on se frotterait davantage à nos phobies, sur une démarche purement masochiste, pour nous confronter à ces instants musicaux qui nous échapperaient à tort. L’un de mes albums coups de cœurs en la matière, une future référence si l’on en croit le CV des protagonistes de Supervøid.
Tracklist :
1. 1.8 Billion Light Year Structure
2. A Cold Spot
3. Eridanus – The Biggest Thing
4. The Acceleration Of The Universe
5. The Dark Flow
6. A Rip In The Fabric Of Space
7. The Largest Structure Ever Found By Humanity
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