Through the Dusk – Sombre odyssée
Line-up sur cet Album
- Aurélien Callewaert : Basse
- Alexis Vincent : Chant
- Bastien Foucher : Guitare
- Alexandre Galaup : Guitare
- Rapha El Rafale : Batterie
Style:
(Death?) metal mélodiqueDate de sortie:
13 novembre 2018Label:
AutoproductionNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 6.5/10
« Les corsaires des uns sont les pirates des autres. » — Armand Robichaud
Vous connaissez cet effet de mode qui consiste à assimiler un groupe qui essaye tant bien que mal de sortir du lot avec un groupe déjà ultra connu et parfois, ultra décrié ? Eh bien, aujourd’hui, je vais m’évertuer à faire… tout le contraire ! Parce que (instant coup de gueule matinal) j’en ai marre de voir ces raccourcis dégradants que font certains membres de la scène métal qui, croyant étaler une forme de culture qui s’avère en vérité inexistante, font des comparatifs limite insultants. Est-ce si difficile que cela de détacher le travail d’un groupe émergent qui parcourt un sujet en particulier d’un groupe mille fois (trop) connu qui aborde ce même thème ? Mon coup de gueule n’est pas anodin car j’ai moi-même subi ce genre de comparaison et je me force encore aujourd’hui à casser ce réflexe de Pavlov qu’a le public métal. Donc, regardez attentivement la phrase qui va suivre car je ne citerai le groupe qu’une fois : NON ! Parler de l’univers pirate ne revient pas à faire de l’Alestorm ! Vouloir rentrer dans la piraterie peut aussi être enrôlé dans le navire français de Through the Dusk !
Through the Dusk a trouvé son port dans la ville de Troyes depuis l’année 2012 et a déjà bien parcouru les terres non pas avec le Hollandais Volant mais bien avec sa démo sortie en 2014 intitulée Au confluent des ténèbres, et depuis le 13 novembre 2018 avec son tout premier album Sombre odyssée. Ayant déjà quelques scènes à son actif, peut-on dire qu’ils sont heureux, comme Ulysse sur son 31 ? Je l’ignore. Mais notre quintette sera là pour témoigner avec ce premier CD aux accents épiques que l’âme des pirates jamais ne mourra.
D’ailleurs, en contemplant l’artwork de l’album, difficile de ne pas savoir dans quelle aventure nous mettons les pieds. Avec cette nef abîmée par les tempêtes et les batailles, les voiles noires et la vigie, pas de doute : on est bien sur un univers de piraterie. De base, les tons bleutés m’attirent toujours plus car c’est ma couleur préférée. Ce serait donc un euphémisme de dire que le design me plaît. Après, j’ai un peu de mal à décrypter la corrélation entre ce portail lumineux sur la mer et le titre de l’album Sombre odyssée. Peut-être l’idée d’un chemin de croix jusqu’à l’accomplissement : on sait que les pirates sont attachés à l’éternité et aux légendes. Je ne sais pas, à titre personnel, si j’aurais fait ce choix de représentation. Mais si l’on reste sur du simple regard, le CD est très accrocheur.
En certaines circonstances, on s’habitue un peu trop vite à anticiper un style de musique, en fonction de l’univers abordé. De fait, et somme toute assez bêtement, je m’attendais à du folk metal… Que nenni ! Through the Dusk propose une musique à laquelle je ne m’attendais absolument pas : du death mélodique ! Belle surprise étant donné mon attirance naturelle pour ce style. Qui plus est, un groupe français qui joue du death mélo, cela ne court pas les rues, je suis doublement joyeux à l’idée d’aborder ce CD ! J’imagine déjà les belles mélodies d’un mélange épique et brutal que peut engendrer un tel croisement artistique. Vous aussi ? Alors, on va s’autoriser un petit cliché le temps d’une phrase : « Ou c’est de la folie, ou c’est du génie. Ce qui est étonnant, c’est que souvent ces deux qualités vont de pair. » Merci Jack Sparrow !
Et dès l’entame de l’écoute, je peux déjà affirmer que cette citation est tout à fait adaptée à la musique des Troyens. Pour détailler un peu le contenu, on a trois morceaux instrumentaux stratégiquement installés (sauf l’avant-dernier que je n’aurais pas mis à cette place) et huit compositions bien dans la veine du mélodique. Mélangeant les accents épiques et brutaux, la musique est bien entraînante et, curieusement, prête plus à « voyager » qu’à se déchaîner, ressenti que l’on retrouve étrangement plus dans le folk metal. Je m’avance probablement un peu, mais j’ose croire que c’est le but du groupe, de nous transporter à travers les océans même si l’issue peut conduire au “Davy Jones’s locker”. J’ai bien aimé les morceaux comme « Sinistres pensées » avec ses accents très dramatiques, cassant un peu le délire lancinant de ces dernières années qui consiste à donner un aspect humoristique à la vie de pirate, « Rédemption » qui donne cette touche très solennelle à la condition de chef pirate (on s’imagine sans peine un corsaire à l’avant de son navire, scrutant fièrement les océans infinis), et « Déluge de lames » que j’espérais sonner comme la fin d’une histoire, mais qui en fait est bien à part et sonne plus comme un clap de fin que comme une conclusion lyrique.
Mais je ne peux m’empêcher d’apporter des réserves que je juge suffisamment importantes pour ne pas passer à côté. La première fausse note pour moi se concentre sur le mastering des morceaux. On m’a vendu du death mélodique, or si mélodique il y a bien, en revanche pour ce qui est du death j’objecte, et pas qu’un peu. Ce que je prenais au départ comme un défaut de l’un ou plusieurs de mes supports d’écoute s’est avéré au final, et malheureusement, vérifié comme étant un mastering très mauvais. Ou alors, on est sur une musique plus heavy par exemple, peut-être est-ce une erreur d’étiquetage. Je reste sur ma faim très clairement, parce que j’adore le death mélodique, et là j’ai des morceaux qui n’ont pas ce son lourd et épais si caractéristique. Je préfère rester sur un mixage très mauvais et donc à totalement revoir. J’ai conscience que c’est un premier album et donc que je me dois d’être le plus souple possible, mais cela ne doit pas excuser tout non plus. C’est d’ailleurs dans ce sens que j’ai réussi à apprécier des morceaux, car au-delà du défaut sonore, les compositions sont très bonnes dans leur ensemble et méritent tout de même que l’on s’y intéresse.
Ma seconde déception réside dans le choix du groupe d’avoir mis des morceaux un peu en fouillis, et non comme un conte ou une légende. Quand on intitule un CD Sombre odyssée, j’imagine que les auditeurs vont s’attendre à un album concept avec une histoire bien précise, surtout dans un univers pirate où les légendes fourmillent ou peuvent facilement être façonnées. Là, après avoir lu les paroles, j’en suis arrivé à la conclusion que ce sont des morceaux qui ne se suivent pas du tout, et je suis assez déçu de ce choix. Il y a quelque chose de totalement illogique dans la démarche artistique, que je trouve limite rédhibitoire… C’est un peu comme si votre voisin vous vantait, lors d’un repas à thème sur les Antilles, ses fameux tacos ou ses faritas, avec en dessert une omelette norvégienne. Donc là, grosse déception pour moi.
Globalement, je n’ai rien de très grave à reprocher aux musiciens, je les trouve modestement bons, maîtres de leurs instruments et donc, de ce point de vue-là, rien qui me choque énormément. J’ai cependant noté quelques défauts sur la batterie, des décalages assez flagrants pour que je les remarque mais qui ont été gommés par les guitares. Une fois de plus, on n’entend pas la basse, mais comme c’est une négligence propre à la musique de nos jours, je n’y prêterai pas d’importance ici. En revanche, là encore, deux choses m’interpellent : le manque de mise en avant des claviers et du chant. En ce qui concerne les claviers, on les entend certes. Mais à un point tellement faible que je me demande concrètement pourquoi ils sont là. Et pourtant, on serait en droit de se dire qu’ils sont d’une grande importance, même s’ils ne sont là que pour balancer des nappes de choir ou d’ensembles orchestraux. Encore un défaut du mastering final, hélas. Et le chant, que foncièrement je trouve « pas mal » car d’une technique correcte même s’il est trop linéaire à mon goût, je suis bien peiné de voir qu’il est trop mis en retrait alors que — et j’y reviendrai plus bas —, au vu des textes, il m’aurait tellement fait plaisir, putain… Franchement, ça commence à faire beaucoup comme défauts pour moi et je suis assez triste de ce constat.
Les textes constituent ma plus belle satisfaction ! Déjà, des textes écrits en français me font toujours beaucoup de bien : contrairement à ce que dirait une large partie du public métal, je suis toujours très content de pouvoir lire et décortiquer des textes en français ! Et même si l’effort n’est pas total, le fait d’écrire avec des rimes me réjouit davantage. Je tire un chapeau bien bas au parolier car l’effort est à la hauteur du résultat : les textes sont très agréables à lire et les métaphores sont bien filées, au point de me laisser croire que je suis bien en train de lire un bouquin sur les pirates. Il y a du vocabulaire, la rythmique est très bonne sur les riffs, les mots importants sont bien mis en avant, bref : un très bon point ! Je suis presque réconcilié avec le CD, même si les précédents défauts pointés du doigt prennent encore une large place dans mon cœur. « À la force du vent » est le texte qui, selon moi, résume le plus la piraterie dans cet album : les références authentiques sont nombreuses et très bien contées ! Certains sont plus terre à terre comme « Frénésie » ou « Traversée du néant » et sa détresse émotionnelle, d’autres me laisseront une moins bonne impression comme « Rédemption » qui, tout en ayant le mérite d’humaniser le pirate, tombe dans le cliché de la rédemption pour mieux avancer, ou « Liberté chimérique » qui a un nom chantant mais qui s’avère être une copie du précédent nommé. Tout n’est pas parfait bien entendu, mais je suis très satisfait des paroles en tout cas.
C’est donc vers une fin ni heureuse, ni malheureuse que je me dirige pour terminer mon histoire. J’avais des attentes sur ce CD, je m’étais laissé convaincre que j’aurais un groupe intéressant, qui explore un sujet trop « banalisé » afin de lui redorer le blason et me faire plaisir. Manifestement, je finis avec un sentiment mitigé mais que je veux quand même satisfaisant. Il y a beaucoup de points à revoir, un ou deux le sont même totalement. Mais il y a du talent, il y a de l’élan et je suis convaincu que les capitaines de ce navire un peu à la dérive sur les mers de la musique métal pourront redresser la barre et aller vers des horizons plus lumineux. Alors, messieurs les corsaires des temps modernes, si j’avais un conseil : ne lâchez pas votre objectif et fiez-vous à la boussole qui vous conduira vers ce que vous souhaitez le plus au monde. Si c’est une bouteille de rhum et faire la fête avec votre public sur l’île de Tortuga (autrement dit, si votre démarche n’est pas trop sérieuse), gardez le cap moussaillon ! Mais si votre destinée est de percer au grand jour et devenir le roi des Pirates à la place de Mme Turner, alors il va falloir ramer sec et manger votre pain sec. Car Davy Jones ne manquera pas de vous demander si vous avez peur de la Mort, les amis.
Tracklist :
1. Présage 01:08
2. Liberté chimérique 04:22
3. Sinistres pensées 04:31
4. Sang pour sang 04:20
5. Frénésie 05:08
6. Échoué 01:58
7. Traversée du néant 04:40
8. Rédemption 05:15
9. À la force du vent 06:28
10. Au large 01:16
11. Déluge de lames 03:37
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