Venin Carmin – Constant Depression

Le 2 juin 2021 posté par Metalfreak

Line-up sur cet Album


  • Lula : chant, basse
  • Valentine : synthétiseurs, boite à rythme, choeurs

Style:

Coldwave / Electro Pop

Date de sortie:

21 mai 2020

Label:

Seja Records

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 9/10

“La méchanceté boit elle-même la plus grande partie de son venin.” Sénèque

Il n’y a pas que le metal dans la vie, parfois il y a aussi un peu de glamour. Et bon Dieu que ça fait du bien! Alors, vous me direz, l’imagerie glamour dans le milieu metal on en a à toutes les sauces. On frôle même une image de la femme comme d’un vulgaire argumentaire sexy, et nier le contraire de la part de certains groupes serait d’une hypocrisie affligeante. Mais bon, comme vous le savez, le milieu metal est un formidable parterre de faux-semblants, dédoublé au passage de quelques pousses de déni. C’est pourquoi je fais d’une pierre deux coups ce soir, et la dite pierre je la jette ostensiblement sur le parterre dans l’espoir d’en faire un trou de taupe géant. D’une part, je ne vais pas explorer un nouveau groupe de metal, mais j’aborde un style de musique que j’aime beaucoup, en parallèle mais non dissimulé. Et d’autre part, je touche un duo de musiciennes. Et cela, je ne sais pas exactement pourquoi, mais non seulement cela me touche, mais aussi cela me fait un bien fou au moral. Marre des mecs bodybuildés à la bière et au Mcdo avec les cheveux sales et filasse, quand il en reste tout du moins. La bière et le Mcdo, hélas, survivront toujours à la calvitie… On va avoir du glamour, du vrai! Un duo de musiciennes qui ne sont pas de très loin, dont je n’avais jamais entendu parler, autant vous dire que le masque de la honte, à défaut de celui chirurgical, m’anime ce soir comme celui de Stanley Ipkiss dans The Mask. J’espère en tout cas pour ma connaissance Marion Laporte qui est la manageuse du groupe, que je vais rattraper mon erreur en proposant une chronique honnête, détaillée mais teintée de quelques notes de plaisir et d’enthousiasme. Je me Simon-jérémise : je suis content! Mais de qui parle-t-on avec autant de délectation? Voici venu le moment d’introniser Venin Carmin et son deuxième méfait nommé Constant Depression.

Venin Carmin, je vous l’ai spoilé un peu en introduction, est un groupe lyonnais! Pas très loin de mon Grenoble actuel donc. Groupe composé d’un duo féminin formé en 2017 par Lula qui est l’initiatrice du projet et Valentine qui l’a rejointe plus tard, le groupe a sorti à ce jour deux albums. Glam is Gone en 2014, doté par la suite d’une édition en vinyle limitée, et enfin donc Constant Depression chez Seja Records. Un projet musical devenu bicéphale mais qui fonctionne comme une entité unique, avec des influences variées et une musique qui s’annonce, avec quelques formules bien alambiquées mais on en a l’habitude désormais, comme une révélation. Je suis surtout curieux des influences revendiquées notamment sur leur Facebook: « Venin Carmin was breed with the best of the 80’s underground but never hid it’s love for pop. Venin Carmin shows a rough Schwarzpop, a true Coldpunk, like would do a depressive Cindy Lauper or a suicidal Madonna. » Alors déjà, imaginer une Madonna suicidaire ou une Cindy Lauper dépressive, je trouve cela un peu étrange. Mais c’est le côté années 80 underground qui m’attire inexorablement. Le mélange des genres s’annonce sulfureux!

La pochette joue la carte de la sobriété et de la noirceur. La dépression, si elle avait un corps à se mettre, serait en tout cas plutôt attirante. Cette femme dénudée qui se menace d’un poignard ou une dague, dans une position plutôt décidée mais avec un visage qui me fait penser à une femme déjà morte dans sa sidération et sa posture cataleptique. On serait donc sur une sorte de tentative de suicide par arme blanche, ce qui relève du défi, pour bosser en psychiatrie. Se suicider à l’arme blanche est en effet un moyen très difficile à faire aboutir tant le geste fait peur. On ne voit une réussite par « hara-kiri » que dans les films. En tout cas, je trouve la pochette sobre, sans prétention aucune, sinon qu’un corps féminin dénudée attire forcément l’œil donc en soi, je trouve la démarche intéressante. C’est marrant parce qu’on dirait presque une pochette de metal, voire de black metal mais non! Avec le style gothique c’est encore plus frappant! Mais bon, Venin Carmin joue la carte maitresse du dépressif derrière une musique aussi mystérieuse, moi je dis oui! Compliqué de faire un paragraphe plus gros mais au moins il est à l’image de la pochette : simple mais efficace.

Les premières notes à peine retenties lors de ma première écoute, je me suis senti fébrile. Mais fébrile de bonheur, le genre de fièvre qui vous guette le samedi soir quand vous allez en boîte. Et comme j’y vais jamais… Non sérieusement, on remarque très très vite les influences et les styles de musique de prédilection de Venin Carmin. Une sorte de mélange très bien fait de sons pop et de coldwave. On n’est pas assez sombre pour basculer dans la darkwave mais pas assez passe-partout pour tomber dans les méandres sans saveur de la musique pop. On note quelques achalandages punk vraiment sympatoches. Globalement la musique ne varie pas énormément, les morceaux ont tous ou presque une base séculaire qui reste fidèle, et qui fonctionne, il est vrai, foutrement bien. C’est frais, énergique, avec quelques moments plus industriels. J’ai un peu le sentiment que notre duo féminin a quelques attraits pour les parties indus de Marylin Manson par exemple, ou quelques relents un peu Depeche Mode, Indochine ou avec ces synthés très années 80 qui balancent des rafales de nostalgie. Après, je me méfie beaucoup de mes références, elles sont parfois mal vues par le groupe. En tout cas, Venin Carmin propose un deuxième album extrêmement bien composé, avec des morceaux qui se laissent écouter sans souci. La première écoute, souvent déterminante pour la suite de la chronique, a révélé beaucoup de choses, sinon que Lula et Valentine fonctionnent réellement comme un cerveau à deux têtes et propose une musique à la fois envoutante avec ces accents coldwave, et avec l’énergie tant dénaturée de nos jours, de la pop. Belle trouvaille!

La production d’ailleurs est un beau point fort. Le fait est que la base instrumentale soit relativement simples pourrait être un facteur de facilité pour le mixage. Il n’en est rien puisqu’il y a un gros boulot à faire pour compiler les synthétiseurs avec la basse et les chants. Le plus gros étant les synthétiseurs qui sont à la fois la base rythmique et mélodique, la basse étant en accompagnement derrière. Ce n’est jamais une sinécure d’avoir un seul instrument pour obtenir un premier ensemble instrumental entier, et je note le talent qu’il faut ici pour avoir non seulement une base solide, mais aussi un son aussi net. Avec toutefois une vraie référence old school aux fameuses belles années citées plus haut qui se ressent au travers des nombreux effets analogiques et de la boite à rythme très vieux son. D’ailleurs, j’aime beaucoup ce mélange d’ancien avec le neuf de la basse qui, pour le coup, est d’une sobriété sonore étonnante. Chouette idée en tout état de cause que d’usiter une basse plutôt qu’une guitare, c’est à la fois original et intéressant! Vous l’aurez compris, la production fait la part belle au nostalgisme mais sert une musique bien pêchue, pleine de patate! Un son qui est une belle référence pour les groupes d’antan et ceux qui, comme Venin Carmin, cherche à leur rendre hommage.

Avec du recul et quelques écoutes supplémentaires, je me suis fait une réflexion surprenante. En fait, Constant Depression n’a jamais porté aussi mal son nom. Parce que la musique est tout, sauf une musique de dépression. On serait au contraire plus sur un esprit festif, avec effectivement ses côtés sombres, mais aussi ses côtés psychédéliques. Je n’ai en tout cas jamais eu envie, à un quelconque moment, de me foutre en l’air en écoutant Venin Carmin. C’est donc un choix fort étonnant que de mettre une imagerie de dépression sur une musique pourtant bien énergique. La dépression étant l’état de démotivation totale, on se demande si on n’a pas fait erreur. Moi, j’ai eu une pêche d’enfer en écoutant la musique. Je me suis trémoussé comme un beau diable dans ma voiture ce qui, vous en conviendrez, est loin d’être une situation idoine. Décrire Venin Carmin est une vraie dualité musicale qui ne laisse pas indifférent. Il s’en dégage une structure analogique au possible avec des effets partout, des rythmes typiques d’une musique pop electro déphasée, et quelques mélodies basse au demeurant fantoches mais splendides. Alors, à la lumière de l’effet euphorisant de la musique electro pop, ou coldwave, des lyonnaises, la question demeure : comment puis-je avoir envie de mettre fin à mes jours devant un album aussi bon? Et aussi puissant? Si vous avez la réponse, j’attends. Mais sachez que Constant Depression est un très bon album, une vraie petite bombe d’énergie et toute la féminité, le glamour de nos deux charmantes musiciennes, sont autant d’atouts sincères qu’ils sont respectueux et respectables. Bref! J’ai adoré l’album, il me le faudra très vite.

Je tiens à souligner le grand talent de Lula derrière sa basse et son micro et de Valentine pour toute l’instrumentation électro. En fait, les compositions, comme je disais, ont toutes une base similaire et varient seulement un peu. Mais le reste fonctionne tellement bien qu’on ne remarque même pas l’extrême ressemblance au premier abord. De fait, le talent y est pour quelque chose. Alors certaines mauvaises langues vous diront, mesdames, que composer de la musique assistée par ordinateur est un jeu d’enfant, que tout le bout est préfabriqué à l’avance, que vous n’avez qu’à cliquer sur la souris, etc. Mais ces gens ignorent tout le travail qu’il faut. Et tout le talent qu’il faut avec autant de démesure. La grande intelligence que vous mettez dans les morceaux pour les rendre différents mais liés entre eux par un fil d’Ariane résistant démontre en tout cas que vous avez plein de talents. Et j’admets sans peine que vous représentez bien ce que l’on attend d’une MAO. Alors, un grand bravo pour votre talent les filles, ne changez rien svp.

Le chant n’est clairement pas d’ordinaire ce que j’aime entendre. Je reconnais sans peine que le chant pop n’est pas ma came du tout et les artistes comme Pink par exemple me hérissent le poil comme en ouvrant la porte du congélateur. Mais chez Venin Carmin, l’esprit pop semble être revenu à des bases tellement primaires que je me rends compte que c’est la pop moderne qui me pose souci. Et que le chant de Valentine est génial. Non contente d’être une très bonne chanteuse avec une voix puissante et ferme, les parties chant sont intéressantes aussi bien rythmiquement que mélodiquement. Tout est fait pour que le chant ait sa place et s’en donne à cœur joie, sans compter les chœurs. Enfin, façon de parler…

Pour conclure cette chronique, j’ai comme un gout très prononcé de quelque chose de charmant et de piquant dans la bouche et l’esprit. Venin Carmin propose un deuxième album riche et fort d’une intelligence certaine, avec une musique aux confins de la pop quand elle en était à ses balbutiements, et de la coldwave quand elle écumait les transistors. Constant Depression est un album avec une nomenclature proche de l’hyper puissance, d’une énergie folle et séduisante, dans un vrai espace sonore où se mêlent les rythmes forts et les passages électriques. Venin Carmin est aussi et surtout, outre le projet d’un duo de musicienne bourré de talent et de promesses, une dualité morale et musicale à la Marylin Manson qui voulait être la meilleure représentation de ce qu’il incarne de dérangeant. Concernant Venin Carmin : le poison et la vivacité. Et je peux dire qu’avec un album pareillement semblable à Constant Depression, et vu les charmes et talents de ses deux maitresses, on aimerait bien se faire empoisonner aussi… Merci mesdames, c’est un très bon album!

Tracklist :

1. It’s Gonna Be Wild 03:27
2. Sidekick Punchlines 03:27
3. Willkommen To The Masquerade 03:17
4. Twinkle In The Eye 03:44
5. Constant Depression 03:02
6. For The Sublime 03:39
7. Outsiders 03:55
8. Problem Issue 03:26
9. Abysses 03:00
10. Sketches 02:53
11. Waterlillies 03:55
12. Dreaming Valentine 03:06
13. Berceuse 03:05

Facebook
Instagram
Bandcamp
YouTube

Retour en début de page

Laissez un commentaire

M'informer des réponses et commentaires sur cet article.

Markup Controls
Emoticons Smile Grin Sad Surprised Shocked Confused Cool Mad Razz Neutral Wink Lol Red Face Cry Evil Twisted Roll Exclaim Question Idea Arrow Mr Green