Line-up sur cet Album
Chen Dahan : basse Davidov : batterie Nir Doliner : guitare, chant
Style:
(Funeral) Death metalDate de sortie:
17 avril 2020Label:
Everlasting Spew RecordsNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9/10
Pour cette nouvelle chronique, je pars explorer un pays hautement symbolique pour la musique que nous aimons tous parmi ce webzine, entendant par-là que le symbolisme est tellement oxymoronique ici, que je ne pensais pas la chose possible. Je pars en effet pour le pays saint, où se trouve Jérusalem, Nazareth et donc l’histoire du Christ. J’ai nommé, mais est-ce vraiment nécessaire, Israël. Dans le genre « pays où l’on s’attend le moins à croiser une musique par définition blasphématoire », difficile de faire plus bizarre. Et pourtant, les groupes israéliens existent, on pourrait nommer par exemple Orphaned Land (mais qui s’inscrit beaucoup moins dans ce registre blasphématoire), Melechesch avant, etc. Mais on connait tous les difficultés que rencontrent certains groupes dans leurs pays d’origine, pour diffuser leur liberté d’expression avec leur musique. Je ne sais pas si Israël est dans cette répression à outrance, ou du moins dans une forme de censure, mais j’avoue que mes préjugés y jouant pour beaucoup, je suis assez pressé de me frotter un groupe israélien. Pour voir jusqu’où va la provocation! Là, en plus, on tombe sur un groupe qui ne désire pas tellement prendre de pincettes avec sa musique, j’ai nommé Venomous Skeleton.
Venomous Skeleton est un groupe originaire de Tel Aviv, la plus grande ville d’Israël, et a posé ses premières notes durant l’année 2016 avec une démo appelée « Arcane Chants of Death » et qui comportait trois morceaux. Le label met en avant que les musiciens sont d’anciens membres de Sonne Adam, bon visiblement c’est important mais comme je ne connais pas, je reste coi. Mais l’histoire du groupe est que leur premier album a semble-t-il été sorti deux fois : une première fois en autoproduction le 23 janvier 2020, et une seconde fois grâce au label Everlasting Spew Records qui propose une réédition donc pour la date du 17 avril 2020. Étonnante démarche qu’un label puisse rééditer un album d’abord autoproduit, pour ensuite le diffuser à ses frais. Il faudrait en toute logique que cet album soit une formidable pièce de musique, pour ainsi y mettre une seule comme un pari sur l’avenir. Parce qu’au-delà que la formation composée d’un trio de musiciens soit jeune, elle n’a à mon sens pas encore sorti assez de CDs pour se faire une place de choix pour un label. C’est donc assez étrange, pour ne pas dire inhabituelle comme démarche de la part d’Everlasting Spew Records. Mais bon, peut-être que la musique est vraiment exceptionnelle hein! C’est possible.
La musique peut-être, et espérons. Parce que l’artwork est des plus moyens, pour ne pas dire sans grand intérêt… Pour une réédition, je pensais que le label pousserait la vis (pas de faute c’est fait exprès) à grand coup de marteau, pour reconstruire l’album. Et ce nouveau départ aurait eu fier allure si l’artwork avait été changé. Parce que là, clairement, ça n’a strictement aucun intérêt un artwork pareil. Alors OK, la technique du pointillisme a en elle-même fait de très beaux tableaux par le passé, mais ici on est plus sur une croûte délabrée qu’un chef d’oeuvre… Non je suis un peu méchant, c’est vrai. Mais disons que ce genre de pochette ne montre aucun travail, ni même de recul. C’est une sorte de tourbillon en noir et blanc quoi, il n’y a même pas le nom du groupe ni de l’album. Ce dernier étant « Drowning in Circles« , il y aurait largement eu matière à développer un truc ! « Circles », mais lesquels de cercles déjà ? On doit comprendre quoi avec ce nom et cette pochette ?… Même l’intérieur de ce dernier est plus intéressant (j’ai vu des photos sur Internet). Certains me diront que c’est un premier album et en soi je me devrais d’être indulgent, c’est vrai. Mais là, on parle d’une réédition les gars ! C’est à dire que le label aurait dû accentuer la démarche commerciale et faire un peu plus de boulot. Parce que là, je qualifierais cette pochette, en étant sympa, d’inutile, pour ne pas dire autre chose de plus vulgaire.
Je passe dès à présent à la musique parce que je me disais plus haut qu’il fallait vraiment avoir un label conquis pour ressortir un album préproduit. Et cela passe en toute logique par la musique. Alors, niveau style, pas besoin de creuser six pieds sous terre pour déterrer le cadavre : Everlasting Spew Records étant un label death metal principalement, et voyant que leur bannière est auréolé du split avec Atavisma et Void Rot que j’ai fait en chronique auparavant, mes doutes sont levés. Mais je n’étais pas prêt. Clairement je n’étais pas prêt à subir ce raz-de-marée pour mes sens.
Sur son Facebook le label a carrément vendu cet album comme une masterpiece, je cite: « I’m firmly convinced this will be recognized as one of the albums of the year« . Et visiblement il a raison ! Quelle claque putain ! Le death metal est clairement des plus obscurs, bien plus noir encore que ce à quoi je m’étais préparé. La musique est l’exact contraire de la pochette : bourrée de sens ! Le death metal est violent, noir et surtout dérangeant. Je reviendrai après pourquoi. Retenez que pour les amateurs de death old school, cela va être une sacrée référence du genre pour les années à venir !
Alors je disais que la musique de Venomous Skeleton est dérangeante. Elle l’est en partie majeure à cause de son mixage qui donne un son… Incroyable. J’entends par « incroyable » que le son est extrêmement noir, le mixage est à la fois lourd et à la fois d’un mélange de noirceur et de solennité, qui procure un sentiment d’une plongée dans les entrailles de la Terre, où il y aurait ce qui s’apparenterait aux Enfers. Je peux pas faire plus imagé parce que d’une part la musique n’est pas là pour tricoter sur les métaphores, et d’autre part parce qu’avec cette exagération de reverb’ on dirait presque que le groupe a enregistré ses méfaits dans une cathédrale. C’est monstrueux. Il m’est aisé de comparer ce son à celui d’Atavisma et Void Rot sur leur split, tant il se rapproche bien. Mais là où le split faisait vraiment penser à des Enfers et là où la voix se voulait vraiment sortir des boyaux de la Terre, ici Venomous Skeleton a plus une dimension maléfique mais dans le sens de souveraineté. On imagine sans peine un profil à la Sauron par exemple. En tout cas, je suis bluffé, rarement j’ai entendu une telle noirceur dans une musique death metal, et je pense que, moi qui compare maladivement depuis le début avec le split d’Atavisma et Void Rot, la différence entre les deux c’est que Venomous Skeleton n’a pas de parties doom metal qui ralentissent le tempo. Ici, ce n’est qu’un cocktail malaisant de violence brute et de maléfisme souterrain.
A un détail près pourtant, et là je veux mettre en garde les auditeurs de cet album : on tombe parfois, avec ce son très travaillé, dans le « trop ». Je parlais d’exagération de la reverb’, on est carrément par moment dans le côté péjoratif de l’exagération, c’est à dire que si vous mettez le son trop fort dans votre casque par exemple, vous allez vite être submergé et vous n’allez pas tenir. C’est trop lourd parfois, pourtant j’adore ce son, ce mixage si enférique. Mais dans le cas de Venomous Skeleton, je pense qu’on est sur une polarité inverse avec un groupe plus old school comme Vader, et le milieu qui à mon sens serait plus juste serait celui du split d’Atavisma et Void Rot. Là, on glisse insidieusement vers le trop plein de lourdeur. Il aurait fallu épurer un peu le mixage, et ça aurait été juste parfait, vraiment !
Les instruments sont évidemment très bons pour accoucher de ces compositions aussi bonnes. J’aime beaucoup cette idée qui consiste à dire que malgré les années, il y a des genres qui ne s’essouffleront jamais. Le death metal en fait clairement partie, parce que j’ai beau en déguster à toutes les sauces, je suis toujours conquis par les riffs. Venomous Skeleton parvient comme cela à proposer de nouvelles bases avec des riffs qui n’ont jamais été entendus je dirais présomptueusement. Mention spéciale pour cela aux morceaux « Curse of The Moon », « Chalice to the Other World » et « Divine Realm of Existence » qui sont mes préférés, sans contestation possible. J’ajouterais aussi que l’utilisation avec parcimonie de quelques ambiances orchestrales, ou en chœurs, sont les bienvenus pour ajouter encore plus à cette majestuosité ambiante qui fait la force de cet album. Les soli aussi sont à marquer au fer rouge tant ils sont utilisés avec intelligence, d’ailleurs en dualité avec les précédentes parties énoncées. Comme une bataille pour donner une place suffisamment équilibrée et avantageuse à chacune. Excellent travail de composition pour un CD excellent musicalement.
Le chant est dans la même veine que les précédents albums que j’ai pu faire qui avait cette touche de sombreur exponentielle. Il est donc excellent, profond surtout et c’est cela qui me plait dans ce type de chant. J’aime celui-ci en particulier parce que la rythmique est plus rapide, et le chant est plus présent, ce qui permet d’en faire un instrument, certes organique, mais tout aussi important que les autres, ce dont je n’avais pas toujours l’impression dans mes précédents CDs. Mais ce n’est pas non plus mon chanteur préféré, je vais rester un peu plus évasif sur lui.
Ouf, j’ai fini et le CD et la chronique ! Mais c’est un « ouf » non pas de soulagement, mais plus d’admiration. Je suis sorti interloqué par la dissection d’un album aussi sombre, je pensais avoir déjà atteint la porte des Enfers, encore eut-il fallu que j’en franchisse le seuil et je crois que c’est chose faite avec « Drowning in Circles« . Rendez-vous compte : premier album d’un « jeune » groupe, album autoproduit puis réédité par l’un des meilleurs labels en death metal ! Il fallait véritablement avoir pondu un œuf d’or, et je pense que ce premier album va devenir un classique du genre tant il est exceptionnel. Du jamais vu en extrême noirceur pour moi, je suis resté pantois. Bon la pochette est vraiment pourrie par contre, là j’avoue qu’on a deux extrémités dans l’échec et la réussite. Et le mixage mériterait sur de petits passages d’être un peu plus timoré, moins lourd comme ça. Mais franchement, je leur pardonne ces erreurs de parcours sans problème et je me prosterne à genoux pour glorifier la musique de nos trois israéliens. Je pense même que le groupe a inventé un genre : le « funeral death » metal.
Énorme !
Tracklist :
1. Dawn of the Beholders (Instrumental) (0:58)
2. Divine Realm of Existence (2:51)
3. Tomb of the Restless Soul (3:23)
4. Alevas San Tatianas Aleli (4:56)
5. Chalice to the Other World (4:01)
6. Taste the Celestial Blood (5:44)
7. Curse of the Moon (3:37)
8. Hallucinogenic Sulfuric Mantra (3:58)
9. Drowning in Circles (6:24)
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