Line-up sur cet Album
- Equimanthorn : claviers
- Fantomslaughter : composition, chant, guitares, basse, claviers
- Nihilistic Manifesto : guitare lead
Style:
Doom Death MetalDate de sortie:
22 octobre 2021Label:
20 Buck SpinNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9/10
« Si tu te fais ver de terre, ne te surprend pas si on t’écrase avec le pied. » Emmanuel Kant
On est souvent un peu trop formaté à des habitudes maladives. Des réflexes de Pavlov à deux balles, notamment en ce qui concerne les univers artistiques. Aussi disais-je dans une chronique que j’avais de grandes difficultés à m’imprégner des atmosphères sataniques dans le doom metal par exemple. La faute à ces habitudes pathologiques qui consistent à assimiler des musiques avec des concepts qui pourtant fonctionneraient bien dans d’autres styles. Après ma chronique du groupe Hex A.D., je me suis effectivement demandé pourquoi j’étais parfois totalement bloqué sur ces concepts qui ne colleraient pas avec la musique. En fait, je sens qu’il faut rapidement que je sorte de ma zone de confort qui devient probablement très toxique, quand je vois à quel point je chipote sur des détails conceptuels… Mais sincèrement, avant d’écouter un album je me penche indubitablement sur l’environnement qui l’entoure, et cela peut prendre une tournure inattendue. Je tombe sur des trucs totalement fous, voire qui me paraissent oxymoriques au possible. Après, je sais qu’il y a de bons côtés à rester sur les mêmes références, et essayer de conserver un peu de raideur dans une chronique, mais je me rends compte que cette dite raideur me porte préjudice, et indirectement aux groupes. Aussi, pour cette nouvelle chronique, j’ai procédé en deux étapes : une première étape qui devait être franchement mauvaise, et après avoir fait d’autres chroniques, et m’être peut-être un peu assagi, j’ai finalement trouvé un réel intérêt à l’album Foreverglade du groupe Worm. Vous allez comprendre pourquoi pendant la chronique.
Mais d’abord, faisons connaissance si vous le voulez bien. Moi, c’est Quantum, trente-deux ans bientôt,… Merde, non! Désolé! Je voulais parler de Worm. Worm est un groupe américain, qui vient de Floride, un état qui fait rêver quand-même. Le Soleil, les plages, son parc Universal Studio. Mais étrangement, on a aussi un groupe qui faisait avant du black metal! Si si! Worm existe depuis 2012 ce qui commence à faire, et produisait une musique aux antipodes totaux de ce que l’état de Floride produit. Incroyable! Alors, niveau discographique, on a une base plutôt intéressante composée de deux démos, et de trois albums avec ce dernier, sachant que le premier album était sorti en 2017, cinq ans après le commencement du groupe américain. Dans le line up qui est finalement un trio, seul le bien nommé Fantomslaughter demeure fondateur, et compositeur. Le mec fait tout! Et est accompagné à la guitare additionnelle et lead d’un gars, et d’un autre pour les claviers additionnels encore. Sinon, il s’occupe de tout. Cela donne une ambiance particulière à ce Foreverglade, encore plus quand on découvre les photos de promotion du groupe qui sont pour ainsi dire… Assez spéciales. J’ai failli vous les partager d’ailleurs, mais j’avais peur que ma démarche soit interprétée comme mesquine, ce qui honnêtement aurait été un peu le cas. Mais bref! Passons à ce troisième album!
En fin de compte, les photographies de promotion du groupe sont bien en deçà de la pochette de l’album. Autant vous aviez des références black metal manifestes, avec des poses dans des cimetières, des corpsepaints et même la photo d’un sacrifice avec une femme nue, le vagin obstrué par un crâne. Voilà j’ai vendu la mèche! Et là… Une pochette bien plus raccord avec la musique du groupe. Vous voyez! Je recommence à jouer mon Chiantos (les p’tits bonbons naaaaaaaaaains). Donc, nous avons une pochette où règne un capharnaüm incroyable, où l’on devine toutefois que le décor principal se situe sous terre, probablement une énième référence aux Enfers. Autant je salue bien bas les mecs qui balancent des artworks comme cela, extrêmement fournis et avec des couleurs vives qui dansent dans un jeu quasiment parfait, mais dans le cas présent je trouve qu’on manque un peu trop de justesse. Les créatures difformes, on ne sait absolument pas ce que cela peut être. Des martiens? Des monstres? On ne sait pas. La seule créature à peu près identifiable c’est cet espèce de prince des Enfers qui trône en haut à droite, mais le reste, hormis des dédales d’escaliers et une roche brunâtre, on ne sait pas vraiment ce que c’est. Pour une « clairière éternelle » (traduction de l’album), on a effectivement une piste potentielle avec cette référence évidente au souterrain, et donc la Mort. Mais j’aurais préféré qu’on situe le concept sur quelque chose d’un peu plus clair. Là, c’est le bordel, trop pour qu’on adhère. Mais au moins est-ce typiquement une pochette pour le genre musical itou, ce qui est bien, voire très bien si l’on rappelle que les graphismes sont d’un soin tout particulier!
C’est là que mon truc pompeux du début qui s’apparente à une introduction prendre son sens. C’est maintenant! Parce que les photographies du groupe sont clairement identifiées black metal, c’est sûr et certain! Mais non. Worm officie dans un registre totalement différents mais ô combien funèbre et macabre! Je pèse mes mots, tant la musique de Foreverglade est énorme. Un truc doom death metal tellement ténébreux et lointains qu’on dirait presque du funeral doom metal s’il n’y avait pas les accélérations rythmiques de temps en temps. Il n’y a pratiquement pas de fioriture sur les six morceaux qui composent cet album, tout est sujet à la saleté, la crasse et la fange! Ce qui est frappant c’est la capacité de Worm à proposer un son particulièrement raw, lui conférant une atmosphère angoissante et littéralement morbide, bien plus que le black metal n’essaierait de le faire au passage. Du coup, cela donne des pistes malsaines et monstrueuses. Le doom death metal de cet album est plutôt old school, avec parfois un ou deux soli qu’il faut chercher non loin de la fin des pistes. Mais il y a surtout ces claviers qui sont incroyablement creepy, qui prennent une place très importante dans le processus musical de Worm, tout en restant très simplistes. Il s’agit pour l’essentiel de nappes de fond très orchestrales, ou d’un simple orgue. Mais sincèrement, ces claviers couplés à des ambiances lancinantes et ultra malsaines aux guitares, cela rajoute encore plus de noirceur et de démoniaque. J’adore les passages plus death metal, quand la batterie accélère. Loin de dénaturer la lenteur extrême des parties doom metal, ces accélérations en mid tempo sont justes impeccables et bien placées. Voilà donc une première écoute largement validée, elle qui ne l’était pas il y a quelques semaines, lors de ma première tentative. Mais ici, c’est plus qu’une sacrée découverte, c’est une tuerie.
Le gros point fort de ce Foreverglade, c’est indéniablement sa production bien raw. Autant vous prévenir tout de suite, ce n’est pas un album avec un son ultra moderne comme on en entend des milliers depuis quelques temps. Worm joue la carte d’une production qui revient sur des bases anciennes, avec un son death metal très old school, presque pas assez épais quand on a l’habitude des éternels Cannibal Corpse et compagnie. Un son presque nasillard, dont seuls les accords rappellent qu’il s’agit d’une consonance death metal. La batterie est piquante plus que bourrine, notamment cette double pédale qui secoue les neurones comme dans un shaker! La basse est relativement audible, tout est une notion de relativité bien entendu… Mais autrement, on a peu de boulot au mixage, on devine que les parties guitares sont notamment délivrées brut de pomme, et le chant paraît tellement lointain qu’on se demande si le matériel adéquat n’a pas été un support bon marché. Mais c’est tout le charme de cette production qui transpire l’absence de fioriture, et qui balance un son tellement peu travaillé qu’on a le sentiment d’une authenticité qui manque. Moi, je me suis éclaté! Ce son raw donne une dimension tellement funeste qu’on pénètre dedans comme dans un tombeau pourrissant! C’est juste énorme. Cela m’avait manqué un bon gros album de doom death metal qui revient aux racines du Mal absolu comme cela.
Vous l’aurez compris, Foreverglade n’est pas un album à prendre avec légèreté et confiance. C’est exactement le type d’albums et j’allais dire de groupes, qu’il convient de prendre avec de la mesure. Parce que cette démarche artistique qui repose essentiellement sur de la brutalité et de l’impulsivité est à aborder avec prudence, un peu comme un gars en colère dans la rue. On n’y va pas frontalement sinon on se fait éclater la figure sur le trottoir, on y va doucement mais sûrement. Worm n’est pas un groupe qui cherche la sophistication, ou alors avec parcimonie. Donc il serait bienvenu de dire que Foreverglade est un album qui sonne bon le mortuaire et l’horreur! Moi-même j’ai dû revenir dessus quelques semaines après pour pouvoir apprécier cette absence de candeur, ce concentré de violence et de funèbre. Définitivement un album qui trouvera son public même si pour cela il faut creuser ans les tréfonds funéraires des Enfers de l’underground. Un super album pour les personnes comme mon bon vieux Antirouille, ou mon compère Arno, ou peut-être même mon magnifique patron Chris Metalfreak, qui aiment les groupes qui ne font pas dans la dentelle et qui aiment tricoter des boyaux humains!
Le chant est aussi un très bon point dans le sens où il me rappelle le groupe Venomous Skeleton que j’avais adoré faire en chronique, au point que l’album Drowning in Circles occupe une place de choix chez moi. Le chant lui ressemble à s’y méprendre, avec un grunt grave très profond et très lointain comme s’il sortait d’une bouche d’égout. La technique vocale varie pas mal avec des assortiments en high scream qui chevauchent un peu maladroitement le chant principal, et certaines voix posées donnent une coloration très cérémonieuse et solennelle à l’ensemble musical. Après, je devine que les textes sont plus des appositions de mots en guise de déclamations, que de réels textes rythmés et scandés. On pourrait reprocher ce côté raw qui donne au chant l’impression qu’il est lointain, et très auréolé d’écholocations, mais personnellement je trouve le soin totalement à propos. Bref, vous l’aurez compris encore, j’adore le chant!
Voici venu le temps de la conclusion. Worm a apporté un troisième album vraiment remarquable, au sens propre du terme! Foreverglade se situe dans une mouvance doom death metal avec un côté funèbre et nostalgique qui amènent un aspect old school voire bien raw. Cela donne donc un album fort authentique et brut, avec un soin tout particulier mis à ne pas en avoir, une production nasillarde mais redoutablement funeste. Le groupe américain n’est pas en reste de noirceur et l’apporte sur un plateau inattendu clinquant de doom death metal raw et sale. Album surprenant et déroutant, pour mon plus grand bonheur! Une folle découverte!
Tracklist :
1. Foreverglade (05:26)
2. Murk Above the Dark Moor (07:37)
3. Cloaked in Nightwinds (11:14)
4. Empire of the Necromancers (07:00)
5. Subaqueous Funeral (03:38)
6. Centuries of Ooze (09:47)
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