Line-up sur cet Album
Dennis Montgomery : tous les instruments, chant
Style:
Doom MetalDate de sortie:
12 décembre 2022Label:
AutoproductionNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 5.5/10
“Il n’est pas dans l’amitié de peste comparable à l’adulation, la flatterie, la basse complaisance.” Cicéron
C’est vrai que dans notre beau webzine, on n’a pas l’habitude de faire dans la complaisance. Enfin… Pas toujours, dirons-nous. On a forcément quelques affinités avec certains musiciens, ou acteurs de la scène metal en général, qui font que malgré notre devoir de neutralité et d’objectivité, on ne peut pas s’empêcher de vouloir être complaisant. C’est vrai que, me concernant, quand je vois un groupe drômois, ardéchois, ou dans mon actuel département de vie, j’ai ce petit quelque chose qui brûle en moi de les encourager et de me dire qu’avec fierté, je vais promouvoir la scène locale ! C’est vrai. Mais il y a des fois, et c’est heureusement la majorité des fois, où on se retrouve embêté parce qu’on aimerait les aider, tous ces groupes du coin, et on s’aperçoit que, malgré toute notre bonne volonté, on n’a d’autre solution que de dire honnêtement combien c’est mauvais… Ce n’est pas pour nuire le groupe, mais justement pour l’aider à réaliser que rien ne va ou presque, et qu’il ne pourra que faire mieux après. Enfin, si le groupe t’écoute un minimum, range sa fierté de côté et se dit « ok, le chroniqueur dit que c’est mauvais, on va voir les autres et décider si on change, et quoi surtout. » Je dis cela parce qu’on n’aime pas saquer les albums. Personne n’aime dire qu’un album est mauvais, on ne va pas se mentir. Mais malheureusement, on n’a pas toujours le choix. Ce qui m’embête le plus, c’est quand on est confronté à ce cas de figure et qu’il s’agit d’une one-man band. Parce que là où cette situation est pire, c’est que la dite personne mène son bateau toute seule, et ne se rend pas forcément compte qu’elle produit une musique qui laisse à désirer, si j’ose dire. C’est probablement le pire cas de figure qui puisse, à titre personnel, me tomber dessus. Mais encore une fois, ce que j’aime chez Soil Chronicles, c’est que l’on a le droit de dire exactement ce que l’on pense ou analyse, sans que d’une part, ce soit censuré, et d’autre part cela est accepté dès lors qu’on y met les formes, qu’on ne tombe pas dans l’insulte ni le ressentiment profond. C’est un chouette cadeau de pouvoir s’exprimer librement dans un webzine de nos jours ! Je me suis lancé dans cette explication de texte parce que, comme vous le pressentiez surement, cela vient de m’arriver. WytchCrypt sort un album en 2022, qui sera suivi d’un autre cette année. C’est « Peste de la Mer », sorti en 2022 donc, qui est chroniqué ce jour !
Car derrière le nom de WytchCrypt se cache une seule et même personne. Un musicien américain du nom de Dennis Montgomery, originaire de Washington. Le monsieur, multi-instrumentiste et chanteur, a sorti actuellement un EP et quatre albums en comptant celui-ci, et le dernier sorti en 2023. Ce que l’on peut remarquer c’est que d’une part, l’one-man band est récent, puisque le premier EP date de 2019. Or, le musicien, si l’on en croit la photo sur Metal Archives, le fameux Dennis n’est pas tout jeune. Et on ne lui connait pas d’anciens groupes, donc un « jeune » musicien. Ensuite, tous les albums et EP ont été à ce jour totalement autoproduits, sans être accompagnés d’un label. Cela me surprend un peu, puisqu’on peut dire que le musicien est productif, entre 2019 et maintenant. Et il aurait pu attirer les regards. Ce n’est pas courant d’avoir un one-man band tenu par un « jeune » vieux musicien, qui fait très old school, et qui propose donc une discographie aussi prolifique. Tout de suite, cela m’intrigue. Alors je me dis que ce « Peste de la Mer » va répondre à mes interrogations. Enfin, j’espère ! Pour les attentes, on verra.
Et je dois admettre que la pochette, si je la trouve par principe assez simpliste, n’en demeure pas moins intéressante et même assez jolie ! Cet album, comme vous le pressentiez également, parle de la mer. Donc, rien de surprenant, en ce sens, à voir une belle frégate voguant sur une mer calme, dans un ciel qui ressemble étrangement à un ciel… Non terrestre. Soit une Lune géante et une couleur qui ferait plutôt penser à un coucher de soleil qu’à une réelle nuit. C’est donc une incongruité bizarre, mais que je note. Parce que l’originalité est possible, même quand, finalement, on se contente de peu. Maintenant, je note aussi que les voiles de cette frégate sont très abimées, ce qui laisse à penser que ce frêle navire a connu bien des péripéties dans sa vie. On pourrait même y voir une métaphore de la vie, dans ce bateau un brin déglingué. Ben oui ! La vie, les péripéties, et malgré tout nous continuons à avancer fièrement sur cet océan qui devient paisible une fois la tempête passée ! Ce n’est pas si idiot, reconnaissons-le ! Bref. Bon, ce que je retiens de cet artwork, c’est qu’il n’est pas trop mal. C’est le mot, stylistiquement parlant, il est même très beau ! Mais j’aurais aimé un truc plus recherché qu’un simple navire avec, en toile de fond, la Lune, la mer calme et le ciel rosé. On a déjà vu plein de fois ce type de pochette, au moins certains groupes qui parlent des océans font l’effort de rechercher un truc moins déjà-vu. Mais bon… Allez, ne soyons pas trop sévère ! La pochette n’est pas trop mal, c’est ce qu’on retiendra.
Pour la musique, c’est là que je deviens rapidement beaucoup plus perplexe. Parce que, pour ce qui est de l’identité de la musique, cela ne fait pas l’ombre d’un doute. On se situe sur un doom metal à l’ancienne, avec toutefois un côté plus lourd que ce qui est habituellement proposé, et qui m’empêche de mettre officiellement l’étiquette old school derrière ce doom metal. Les riffs sont évidemment, et c’est là toute la difficulté de l’analyse, très doom metal à l’ancienne, avec des sonorités qui rappellent les groupes Black Sabbath ou Godsend, que j’avais fait en chronique pour une réédition. En tout cas, ce n’est pas tellement le genre de doom metal qui respire sereinement la modernité et le renouveau. Ce qui n’enlève en rien que les riffs sont intéressants, voire même plutôt bons ! Je me suis surpris à apprécier quelques passages de guitares, et même si l’ensemble demeure dans un jus frelaté de minimalisme et de lenteur, inhérents au genre doom metal dans son histoire la plus ancienne, la musique n’est pas dénuée d’intérêt du tout ! Maintenant, je dirais que la musique ne casse pas non plus trois pattes à un canard, quoi. On peut aimer, j’aime le doom metal en général, même si, comme le death metal, je le préfère quand il est associé à d’autres genres. Mais ici, le problème est que le mec ne produit pas de la musique pour plaire. Je pense qu’on est un peu sur le registre de ces (pseudo) musiciens qui jouent de la musique sur YouTube, vous voyez le genre ? Avec une webcam, on se met en scène dans son salon ou sa salle de bain, avec sa super guitare et son bagout, et qui ferait presque croire qu’il est LE musicien du siècle ! Mais en fait, non. Du coup, à la première écoute de ce « Peste de la Mer », je n’ai pas pu m’empêcher d’imaginer notre ami Dennis en train de se filmer et de jouer sur sa guitare comme un Guitar Hero. Les Dieux m’en gardent, ce n’est pas arrivé (j’ai vérifié) ! En tout cas, ce que je retiens, c’est que même si la musique transpire l’ancien et quelque part, le côté « je ne cherche pas à innover », cela m’a laissé un peu sur ma faim. WytchCrypt aurait pu essayer de faire mieux ou de faire plus expérimental, cela aurait amené des points en plus. Parce que, même si j’ai globalement aimé la musique, il y a tout de même de gros défauts qui entachent malheureusement assez sévèrement l’album « Peste de la Mer ». Mais pour l’heure, on va gratifier la musique d’un hasardeux « ce n’est pas trop mal ». Histoire d’être gentil.
Par contre, la production… Ohlalalala… Quelle catastrophe. Vraiment… Franchement, ce son enrobé à l’extrême dans un doom metal qui n’est qu’une pâle copie de ce qui se faisait avant, cela ne va pas. Moi, le doom metal old school, je l’aime quand les guitares sont incisives, avec certes une légère épaisseur sonore pour englober, mais de là à aller sur cette sonorité qui fait penser à une erreur chromosomique entre le doom metal décrit ici, et un registre death voire stoner qui ne va absolument pas avec le chant et le reste, c’est une grossière erreur de casting. On n’entend rien quand le chant arrive, ce chant qui est bourré d’effets tout aussi inutiles les uns que les autres, et qui ne servent finalement qu’à camoufler bêtement les autres instruments et à dénaturer les lignes de chant, qui en plus ne sont pas folichonnes du tout. La basse prédomine tout le monde sans là encore laisser de place aux mélodies guitares, la batterie est à peine audible. Non, franchement, le mot qui convient, c’est catastrophique pour moi. Une purge sonore. Vous voyez ? Je me bats contre cela depuis toujours, mais c’est typiquement la gangrène qui ronge de plus en plus les one-man bands. Les musiciens composent et produisent sans qu’une oreille extérieure et totalement neutre vienne poser quelques bases neuves, histoire d’avoir un son propre et à défaut correct, le minimum syndical. Et on l’entend parfaitement ici ! Cette production, c’est celle du musicien tout seul, derrière son petit ordinateur (si tant est qu’il ait utilisé un ordinateur…), qui est convaincu que sa production est géniale à tous points de vue, et du coup ne se rend pas compte, et c’est le plus terrible, que son son est une vraie purge. Mais bon… Pour moi, en étant sincèrement le plus objectif possible, il faut tout revoir. Absolument tout. Ce son n’est ni fait, ni à faire.
Après, factuellement parlant, je pensais que le concept allait m’intéresser. En plus, chose peu commune, le titre des albums est en français, donc je m’étais piqué de curiosité pour savoir ce que Dennis Montgomery allait proposer. WytchCrypt étant un nom fourre-tout, j’étais curieux de savoir comment le musicien allait parler de la mer finalement. Bon, force est de constater que là encore, le concept n’aura pas été si captivant que cela. Pire ! Avec cette musique totalement mal produite, il m’aura été impossible de pénétrer pleinement dans l’univers potentiel de cet album, si tant est qu’il y en ait un précis… En fait, cet album est et sera pour moi, définitivement, ce qui se fait de pire en matière d’one man band. Aucune résilience particulière, juste l’envie de balancer de la musique tout en essayant de faire croire qu’on y a apporté du soin, alors qu’en fin de compte c’est le total effet inverse qui se produit. « Peste de la Mer » n’aura même pas le mérite d’être sauvé par son concept album qui sonne creux, avec des textes mal écrits et d’une rythmique souvent monocorde et sans intérêt. Reprenant les mêmes sempiternels codes qui parlent de l’océan comme le Kraken, histoire de faire original, n’est-ce-pas, WytchCrypt devrait largement revoir sa copie s’il ne veut pas se faire descendre. Je dirais que la majorité des webzines vont probablement bouder cet album, non par complaisance justement, mais histoire de ne pas avoir à se mouiller pour expliquer combien la musique est mauvaise, et surtout pour ne pas avoir à assumer un quelconque ressenti. Triste constat. La musique en elle-même n’est franchement pas mauvaise, mais tout ce qui est autour est l’exact inverse. Le doom metal ici souffre d’avoir été composé et produit par un pur pêché d’orgueil, selon moi. Et c’est bien là le problème…
Et pour ce qui est du chant, c’est le triste épilogue d’une descente aux Enfers analytique pour moi. Je suis sévère, mais je trouve que le chant en lui-même, si l’on met de côté ces effets absolument horribles, n’est même pas si bon que cela. La technique vocale n’a rien d’extraordinaire, on se croirait avec un chanteur qui essaye de monter dans les octaves en voix de tête, mais sans forcer, comme s’il chantait en douceur… Un chant puissant! C’est exactement mon impression. Renforcé par cette inévitable pauvreté rythmique, le chant n’a pas grand-chose de sauvable non plus sur cet album. Encore que ! Si l’on virait tous ces effets dégueulasses, à la rigueur on pourrait trouver un petit intérêt, et ce malgré une technique pauvre. Mais je pense qu’en matière de chant, histoire, là aussi, d’être gentil avec le musicien, on a largement mieux. Mais alors, largement. Je ne sais pas quoi dire de plus…
Triste constat final, donc, pour cette chronique qui était censée me redonner un coup de fouet ! Mais il fallait que je tombe sur le gros lot ultime. WytchCrypt et son album nommé « Peste de la Mer », troisième dans la liste mais pas le dernier, se proposait ici comme un album de doom metal produit par un seul homme, censé avoir suffisamment d’expérience et d’étoffe pour mener tranquillement sa barque vers la bonne musique. Hélas, c’est un peu comme ramer contre le courant, à ce stade. La musique proposée ici souffre d’une énorme faute de production, d’un manque saisissant d’originalité, et, par-dessus le marché, d’un concept d’une pauvreté absolue. Cet album est selon moi ce qui s’appelle l’orgueil en musique, et que je dénonce malheureusement un peu trop à mon gout : l’image typique du navigateur sur son radeau de fortune qui navigue à contre-courant en se disant que c’est normal, qu’il va malgré tout atteindre un point de chute et ce, sans fournir le moindre effort de résilience. C’est exactement le cas de WytchCrypt qui devrait, je pense, regarder rapidement autour de lui s’il n’y a pas de quoi sauver son embarcation avant qu’il ne soit trop tard. Parce qu’à ce stade, cela devient presque critique… Je n’ose imaginer le dernier album. Je voulais le faire en chronique mais finalement je renonce.
NB : le plus drôle c’est qu’il n’y a pas de Facebook et pas de label, donc niveau promotion…
Tracklist :
1. The Frozen Tombs 10:53
2. Poseidon 06:14
3. The Tale of the SMS Lebensraum 06:44
4. Kraken 06:29
5. Plague of the Sea 15:15
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