Intervieweuse : Bloodybarbie
Interviewé : Joe Payne (chant)
Traduction : Willhelm Von Graffenberg
Suite à la sortie de l’album Dust du célèbre groupe culte du rock progressif The Enid qui fête ses 40ans d’ailleurs (chronique : http://www.soilchronicles.fr/chroniques/the-enid-dust), nous avons eu le plaisir d’interviewer Joe Payne (chant) pour nous en dire plus sur cette troisième partie d’une trilogie.
Peux-tu nous présenter le dernier line up du groupe ? Comment avez-vous pris la décision d’engager Zach Bulloch ?
Le line up n’a pas beaucoup bougé depuis que je l’ai rejoint en 2011. Il y a toujours le duo fondateur : Robert John Godfrey et Dave Storey. Avec ses 69 ans cette année, Robert arrête de tourner bientôt donc il fallait engager un autre claviériste suffisamment doué pour le remplacer en live. Zach Bulloch est arrivé comme un signe du destin, un jeune homme déterminé à tracer sa voie dans la musique. A l’origine, on l’avait engagé comme ingé son et il s’en occupait sur notre dernière tournée, The Bridge Show. On a assez vite découvert ses talents, et il nous surprend toujours par la qualité excellente de la musique qu’il écrit. Je pense que les prochains albums de The Enid contiendront beaucoup de ce qu’il y aura amené, tant celui-ci est un génie pas encore révélé. J’ai également eu la chance de pouvoir travailler avec d’autres personnes de talent, Max Read et Jason Ducker, qui ont aussi beaucoup apporté au groupe et sa musique.
Revenons dans le passé et racontez nous la formation du groupe : pourquoi avoir choisi ce nom ?
Le groupe a commencé avec Robert, lorsqu’il a rencontré Francis Lickerish and Steve Stewart à son ancienne école, le Finchden Manor. Francis et Steve composaient déjà ensemble et Robert avait déjà de l’expérience dans la direction et l’orchestration, de l’époque avec Barclay James Harvest. Ils ont alors fondé The Enid. Une fois qu’ils eurent trouvé un bassiste et un batteur, leur manager les a pressés de trouver un nom. Mais aucun n’est venu, alors il les a menacés de les appeler les « Famous Five » [NdT : le Club des 5, en français]. Le groupe détestait ce nom, tiré du titre d’un livre d’Enid Blyton, et chaque fois qu’un truc stupide était dit, ils appelaient ça un « Enid ». Finalement, c’est leur autodérision qui les a amenés à se faire appeler « The Enid ». Il s’agit là d’une version qu’on m’a racontée, mais pas sur qu’aucun se souvienne vraiment de l’origine exacte du choix de ce nom. Mais j’aime bien cette histoire !
Peux-tu nous parler du concept de votre trilogie ?
J’ai le sentiment que la trilogie Journey’s End a changé du tout au tout depuis son point de départ en 2010. Pour commencer, le groupe ne m’avait pas encore recruté à l’époque. Ca a beaucoup influé sur la direction de la musique, puisqu’un nouveau membre arrivait, ajoutant des idées et écrivant des chansons. Toutefois, j’ai essayé de rester le plus fidèle possible au concept originel initié par Robert, et puisque rien n’avait encore été composé pour Invicta ou Dust quand j’ai rejoint le groupe, c’était une porte ouverte pour annoncer « Hé les gars, j’ai des morceaux et ils collent parfaitement à l’esprit du concept ». Les albums auraient donc pu sonner très différemment, mais je pense que cette trilogie reflète la manière dont le groupe a évolué et grandi au travers de ces trois albums. J’ai le sentiment que la trilogie Journey’s End représente la conception et la naissance d’une nouvelle ère, avec Invicta comme source d’alimentation de ce qui allait devenir le développement de l’univers d’Enid. Dust serait davantage la fin de l’adolescence ou le passage à l’âge adulte. Avec le départ de Robert, ça ressemble beaucoup pour nous, membres restants, au moment de quitter le nid et voler de ses propres ailes…
Avez-vous collaboré avec des personnes pour ce disque ? On entend des influences gospel…
Tout est né d’une collaboration entre Max, Jason, Robert et moi. Si tu as l’impression d’entendre un coté gospel, c’est parce que Max a poussé les possibilités du chœur plus loin que jamais. De plus, je suis un fan de gospel et surtout des voix soul plus que tout. C’était cool dans cet album de se sentir plus confiants, ce qui nous permettait d’écrire et jouer une musique qui nous ressemblait vraiment. Avec les anciens projets, on a toujours criant l’avis du public, ce qu’ils pourraient penser si on s’éloignait trop du son original de The Enid. Mais l’expérience nous a appris qu’on était bien plus fort en étant nous-mêmes, et cet album sonne vraiment comme « nous ».
Peux-tu nous commenter votre artwork ?
La jaquette a été faite par Dominic Tofield, qui a aussi joué de la basse et de la batterie avec nous pendant un temps. Un grand artiste. On l’a briffé sur ce qu’on voulait, le concept de l’album, la balance universelle entre les force opposites, et le fait que quand toutes ces forces ont disparu, il n’en reste qu’une seule : l’Amour. Tout ce que nous faisons ou voyons est né de l’amour, même la haine nait de l’amour, ce qui fait que techniquement, l’amour n’a aucune force opposée. C’est pourquoi l’artwork central du CD est une étoile à 7 branches, chacune représentant une force opposée. Par exemple, le séculaire contre le sacré, la richesse contre la pauvreté, l’environnement contre le consumérisme. L’Amour est la pointe finale de l’étoile, et c’est ce que voient les gens sur la jaquette : l’amour inconditionnel et immortel d’une mère pour son enfant innocent.
Vous prévoyez une tournée cette année ? Avec un passage en France ? Avec quels groupes aimeriez-vous bien tourner ?
On réfléchit à des dates européennes en ce moment, en espérant annoncer prochainement une tournée pour nos amis du continent. Avant ça, on fera une mini-tournée des clubs anglais pour fêter le quarantenaire du premier album de The Enid, In the Region of the Summer Stars. On fera aussi nos premiers concerts au Japon en avril et nous en sommes très impatients.
Quel est l’endroit le plus étrange dans lequel vous ayez joué ?
Je crois que les endroits les plus bizarres où jouer en Angleterre sont les vieux camps de vacances comme Butlins et Haven. Pendant les saisons creuses, ils sont beaucoup utilisés pour des festivals de rock et ça me donne trop l’impression de visiter un camp de prisonniers de guerre. Mais au moins, c’est shows sont marrants parce que le public est content de te voir et de passer tout son weekend à écouter de la musique sympa. J’imagine que c’est également pour ça que ce genre de lieu est mon favori pour se donner en concert.
Qu’en est-il du Prog en Angleterre ?
Il y a toujours une résistance intense envers le Prog de la part de la culture populaire, mais on a bien l’intention de changer la donne. Il y a juste à regarder toute la scène émergeante dans le Prog Rock qui touche maintenant tout une nouvelle génération de fans. Tant de gens de mon âge ne savent même pas ce que « prog » signifie… Ca nous fait une bonne opportunité de montrer comme cette musique est digne d’intérêt, tant qu’ils ne gardent pas une vision biaisée à l’encontre de ce genre. Dans un monde où la pop devient de plus en plus médiocre, on peut se dire qu’il y aura davantage de demande pour une musique neuve et plus inventive. Je crois vraiment que la plupart des gens le souhaitent, et si les média soutenaient plus les groupes de Prog, certains seraient aussi célèbres que Justin Bieber.
Je te laisse finir avec votre citation préférée…
Quand Robert partira, ce sera ma responsabilité de mener le groupe. J’ai dû beaucoup apprendre sur ce qui faisait un bon meneur durant ces années. Et donc ma citation préférée est celle d’Aristote qui dit : « Celui qui n’a jamais appris à obéir ne peut être un bon commandant. »
Merci d’avoir pris le temps de nous répondre. En espérant vous voir bientôt en France !
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