Après une mini-tournée durant les vacances de la Toussaint dont vous pouvez voir le journal de bord sur Soil, les gars de Zapruder sont revenus à une vie normale. Et ils ont répondu à quelques questions en revenant sur cette tournée et sur les prochaines étapes du groupe.
Question qui vous a déjà été posée dix fois, mais pouvez-vous présenter Zapruder aux gens de l’Est de la France qui ont pas pu venir vous voir pendant la tournée ?
François : Salut à toi, merci encore pour ton soutien et pour cette interview ! Le groupe est né fin 2010, mon frère (Etienne, guitare) et moi (basse) étions réunis sur Poitiers et nous voulions monter un groupe plutôt orienté Post-Hardcore. Nous avons trouvé par internet Quentin (guitare, chant), Régis (chant) puis Romain (tam-tam du Zimbabwé) avec qui nous avons rapidement tissé de réels liens d’amitié, élément réellement central dans l’histoire de Zapruder. Schématiquement, nous avons composé le set sur l’année 2011 et nous l’avons enregistré en 2012 après quelques dates de chauffe.
Niveau influences, je crois que c’est plutôt Converge, Isis, vous avez cité Cult of Luna dans le journal, j’ai cru voir un T-shirt The Dillinger Escape Plan, sur une photo, aussi, mais c’est quoi vos groupes cultes ?
François : Personnellement, ce sont les Deftones.
Quentin : Je ne sais pas bien ce qui m’influence, j’aime bien Mono et d’autres trucs mélancoliques ces temps-ci, sans doute l’effet « après-tournée » ahah!
Etienne : En groupe vraiment culte, je crois que je peux sans problème ranger Nine Inch Nails et Radiohead (rien de très original, donc).
Régis: Certainement Pink Floyd, Neurosis, Cult Of Luna, Gojira.
Et quel groupe défendrez-vous jusqu’à votre mort malgré le fait qu’il se fasse démonter par tout le monde ?
François : Après avoir vu les Betraying the Martyrs en live, je trouve qu’il n’y a rien à redire à leur démarche : ils font une musique qui les éclate, qui est bien faite, ils s’investissent vraiment à fond dans leur truc et surtout tout cela s’accompagne d’une sincérité incontestable. Tout projet en général mené avec cette qualité mérite le respect.
Quentin : Hm… Peut-être les Beatles, je sais pas. Ils se défendent sans doute aussi bien sans moi!
Etienne : Ils ne se défendent plus trop, à vrai dire !
Régis: Korn! Ces types là m’ont tellement retourné la tête avec leurs albums que je les lâcherai pas de sitôt. Et ils ont la capacité de toujours changer leur musique pour le meilleur comme pour le pire, mais finalement, ils ont des couilles mine de rien et se font plaisir.
Sinon, vous aimez quoi dans la vie ?
François : Régis aime les animaux, Quentin aime les yeux bridés, Etienne aime le fouet et Romain aime les mitaines.
Quentin : et aussi dormir, et taquiner mon batteur.
Régis: Nawak les animaux ça vaut pas un bon plat genre un tajine. Et j’adore le cinéma, la littérature et je voudrai que personne ne meure de faim dans le monde aussi.
Etienne : Et François aime la mousse. Beaucoup, beaucoup de mousse.
Comment ça se pond, un morceau de Zapruder ? Y a une personne qui compose, ou c’est quelque chose de moins monarchique, avec des discussions, des débats, des trucs comme ça ?
François : On peut dire qu’Etienne est le plus souvent à l’origine des chansons, il compose beaucoup de riffs. Leur agencement et les arrangements en général sont plus le fruit d’un travail collégial. Il y a énormément de débats autour des chansons, ce qui explique plus ou moins que nous ayons un set assez court malgré le nombre d’idées et d’ébauches de chansons que nous avons en notre possession.
Etienne : Je ne suis de toute façon pas un bon arrangeur, donc même si je propose pas mal d’idées, c’est souvent de la merde jusqu’à ce que le groupe dans son ensemble ait bossé dessus, rajouté des idées, modifié l’agencement, etc.
Régis: J’avais envie de casser Etienne mais le mec il se démonte tout seul quoi. Plus sérieusement ce qui est certain c’est que jamais un morceau ne sortira de répétition sans que chacun se dise: « putain il déchire celui-là ».
« Straight From the Horse’s Mouth » a été quelque peu sacrément bien accueilli. Ça fout la pression ?
François : Théoriquement, ca ne devrait pas. Notre musique, on la fait pour le plaisir, on n’en vit pas, et tant qu’on sera fier de ce qu’on fera, tant qu’on le sortira avec les tripes comme c’est le cas actuellement peu importe l’accueil. Après, en pratique, on a tellement été agréablement surpris par les retours sur l’EP que oui, il y a forcément un peu de pression. Mais comme je te le disais, on n’a aucun impératif et on ne sortira rien qui puisse nous paraître un temps soit peu bancal.
Etienne : C’est surtout une sacrée bonne surprise. Alors après c’est sûr qu’une fois sur scène, quand un des mecs qui a chroniqué l’EP vient nous voir, on se dit qu’il faut assurer pour ne pas passer pour des tocards. En outre, étant donné que le groupe s’inscrit dans la durée et que nous sommes déjà dans une phase de composition pour un album à venir, cela met une certaine pression par rapport à ce projet, sur le mode « Et si on faisait moins bien ? ». Mais dans l’absolu, ce n’est pas un soucis qui me prend aux tripes dès que je saisis ma guitare pour composer quelque chose.
Maintenant qu’on vous connait, parlons un peu de cette tournée. C’était plutôt cool de vous suivre, même si je n’étais pas physiquement présent, c’est bien d’avoir vos réactions à chaud.
Heureux de cette semaine ?
François : C’était fou, on n’a eu aucune galère, vraiment. On a été extrêmement bien accueilli à chaque fois et on s’est toujours fait plaisir sur scène, même si évidemment certaines performances nous semblaient meilleures que d’autres. Rien de négatif à retenir pour ma partir.
Quentin : C’est passé bien vite, je suis devenu monsterolique. Dés que ce sera envisageable et logique j’espère que ça se reproduira (et au moins aussi bien si possible).
Régis: Heureux c’est faible, c’est plutôt une expérience incroyable avec des retours énormes.
Pas trop crevés ?
Quentin : J’aurais pu tenir encore une semaine, Mais pas beaucoup plus! Mais je suis sans doute le plus sérieux.
Etienne : Ben depuis mon retour je viens de m’enchaîner plusieurs nuits de dix heures, ce qui en général ne m’arrive pas beaucoup. Je suppose que ça répond à ta question… Mais pendant la tournée, la fatigue n’est pas un gros soucis : bien sûr que quand il faut se lever pour se taper les bornes on râle un peu, mais une fois arrivés, l’excitation d’y être, et de se dire « putain mec, on a joué hier, on rejoue ce soir, fuck yeah » efface (au moins partiellement la fatigue). Le café se charge du reste !
Ça fait quoi de retrouver la vie normale après cette semaine ?
François : J’ai repris mon rythme de vie habituel, qui est assez épuisant en soi, alors que j’étais sur les rotules. Je pense me mettre à la cocaïne.
Quentin : … C’est un peu chiant. Mais j’ai des formations en son à trouver,ça occupe!
Etienne : Dans une semaine je retrouve mes élèves de collège, et j’ai rien de prêt, donc j’ai pas trop le temps de m’abandonner au spleen !
Régis: la vie normale non, j’ai à peine eu le temps de me reposer que j’ai dû passer un concours! Mais rien n’équivaut à cette semaine ça c’est sûr. Du coup il y a de la nostalgie mais surtout de l’envie d’aller encore plus loin.
Les setlists contenaient-elles que les titres de « Straight From the Horse’s Mouth », ou également d’autres surprises ?
François : On a toujours joué l’EP en entier, sauf à Paris. Il y a parfois eu une ou deux nouvelles compositions, courtes et violentes comme on aime !
Ça fait quoi de jouer crevés, et crades ? Ça doit gêner pour le jeu de scène, non ?
François : Alors en fait, on a découvert qu’en raclant la crasse à l’aide d’un couteau, on pouvait se faire un plat riche en protéines qui permet de tenir le coup sur scène. L’autarcie biologique, quoi !
Quentin : Je continue même chez moi, parfait. Non bah, j’arrive à vivre avec, après nous ne sommes partis qu’une semaine avec quelques occasions de se laver, on verra quand on tournera tout un été, éhéh.
Régis: Au contraire, tu as tellement pris l’habitude de suer sur scène dans les mêmes vêtements que tu te donnes toujours plus. D’autant que dans mon cas c’était le t-shirt de François que je portais, et je voulais qu’il garde le meilleur souvenir de moi.
Et pour les groupies ?
François : On collectionne plusieurs handicaps : déjà on fait pas une musique très sexy, ensuite on traîne avec les Abysse qui repoussent tout le monde, et puis comme tu l’as dit on puait et on avait le temps pour rien.
Quentin : J’en suis à 5. Bon début.
Etienne : Et encore : ceux d’entre nous qui sont maqués pouvaient servir de rabatteur pour les célibataires. Ça compense quelque peu le handicap…
Quel(le) a été votre meilleur(e) date/souvenir pendant cette semaine ?
François : Je dirai le premier concert à Nantes, parce que c’était une des meilleures dates d’un point de vue live, parce que c’était la première et que ça promettait une semaine de folie, parce qu’on y a retrouvé des potes de longue date, et parce que j’ai éclaté la tempe d’un mec avec ma basse – il saignait la rage, mais il était content. Hommage à lui d’ailleurs !
Quentin : Le day-off? Non, franchement avec le recul j’ai trouvé des trucs cools partout, un contexte ici, une rencontre là… à Nantes, on s’est retrouvés en voiture dans une avenue face à une manifestation. C’était assez cocasse. Et à Paris j’ai croisé des amis de longue date.
Etienne : Le problème du day-off, c’est que mes souvenirs sont… lacunaires. La date à Limoges était énorme, dans un vieux bar de hardos, concert commençant à 22h dans une cave dégueulasse et humide, batterie à même le sol, on a fighté quelques mecs dans le pit, et que dire des deux groupes avec lesquels on a partagé l’affiche !
Régis: Même chose qu’Etienne mais ça reste un des meilleurs souvenirs, d’autant qu’on a jammé en mêlant des membres de Abysse et Zapruder. Le résultat était mi-immonde mi-cool. A mon avis il y a un potentiel inexploité. Et sinon à Toulouse, être accueillis aussi bien par Niko et son asso Noiser, avec leur boeuf bourguignon de dingue, c’est juste superbe.
La/le moins bon(ne)… ?
François : On a potentiellement paumé un carton de CD, c’est pas dramatique mais ça fait un peu chier.
Quentin : On est des ouinouin, oui. Moi je sais toujours pas faire mes retours convenablement. Ahah, voilà qui m’a gâché quelques morceaux.
Qu’allez-vous faire, maintenant que c’est terminé ? Repos, compos ?
François : On joue le 17 novembre à Tours au Black Hawk en compagnie des Barbarian Koala (avec qui on a joué à Limoges) et The Rise Inside. Ensuite effectivement, on se penchera sérieusement sur les nouvelles compos, en vue d’un album. On a déjà pas mal de choses à mettre en place !
J’ai lu chez des confrères, que le style de Zapruder n’était pas figé, que « Straight From the Horse’s Mouth », à un autre moment, aurait pu donner quelque chose de très différent… Une idée de ce à quoi pourrait ressembler votre prochaine production ?
François : Pour être honnête, nous-même n’avons pas d’idée précise de ce à quoi ressemblera l’album ; et par ailleurs, je pense que nous nous refusons à vouloir nous donner un fil conducteur. Le but est réellement de composer, de jouer des choses que nous aimons et de tenter ensuite d’en faire un ensemble à la fois suffisamment cohérent pour former un album, mais aussi suffisamment varié pour être représentatif de ce qu’est Zapruder.
Etienne : En tout cas, si fil conducteur il y a, il sera plus thématique que musical. Pour l’instant les nouvelles compos partent dans tous les sens, y compris des choses que nous n’avons pas encore explorées, et tant mieux ! Le tri viendra dans un second temps.
Est-ce qu’aux prochaines vacances, vous allez faire des dates de l’autre côté du pays ? En tous cas, Soil serait content d’accueillir votre journal !
François : Ça n’est pas prévu pour l’instant, on aimerait évidemment beaucoup mais c’est une grosse organisation pour nous tous. En revanche merci à Soil d’avoir accueilli ce journal de bord, on espère que vous vous êtes marré autant que nous ! Et pas de soucis pour la prochaine tournée !
Quentin : Prochaines vacances ? Je ne sais pas! Un de ces jours, j’espère bien.
Et pour finir, à quelle question qu’on ne vous a jamais posée aimeriez-vous répondre ?
François : Euh, on va dire celle-ci. MIND FUCK
Etienne : Que pensez-vous de la lecture deleuzienne de la théorie de l’Eternel retour nietzschéen ? Alors je ne suis pas tout à fait d’accord avec Deleuze, qui à mon avis ne perçoit pas assez la dimension tragique de la philosophie nietzschéenne, telle qu’on la retrouve chez Clément Rosset, par exemple. Voila, pour bien plomber la fin de l’interview !
Régis: Moi comment je fais pour avoir une si belle barbe? Ben écoute, trois jours de soupe sans se laver le visage ça te luit le poil façon Léon Gambetta !
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