Live report : Quantum
« Le bonheur ne se trouve pas au sommet de la montagne, mais dans la façon de la gravir. »
Confucius Je ne m’étais jamais investi dans le report de concert jusqu’à présent, et il me serait difficile d’en donner la raison. Mais je peux aussi bien vous dire pourquoi j’ai choisi le Matheys’in Rock pour inaugurer cette grande première. Tout d’abord, par sympathie pure : une des organisatrices est une collègue de travail (salut Fabienne!), et avoir ce point commun qu’est l’amour de la musique rock dans son entièreté a forcément joué en sa faveur. Mais pas que! Car ensuite, je devais bien l’admettre : la programmation qui me paraissait faire la part belle aux groupes locaux et – d’une manière peut-être moins officielle – à la scène francophone, m’a mis la puce à l’oreille. Et quand je parle de puce, je parle de cette petite voix intérieure qui dit « tout est réuni pour passer un super moment, alors fonce, nom de Zeus! ». Alors, réunissant mon petit carnet noir, mon stylo noir et ma tunique noire, je pris mon sac à dos imaginaire du petit randonneur, j’allais vers le chemin que m’indiquait la lumière du soleil, soit le sud-est de l’Isère. C’est ainsi que je pris la route pour les montagnes, pour le Connex et la commune non moins perchée de Saint-Jean-de-Vaulx. Alors, comme tout explorateur digne de Spielberg que je suis, et tout auréolé de mon titre de Collomb isérois (et non pas de côlon, comprenons-nous, sauf si naguère je fis de la merde chronicale par moment), j’ai fait quelques recherches dans des sites de référence pour tout voyageur qui se respecte. Ainsi, Wikipédia m’a appris que Saint-Jean-de-Vaulx est traversée par le 45e parallèle nord, et de ce fait située à égale distance du pôle Nord et de l’équateur terrestre (environ 5 000 km). Incroyable non? Mais plus important encore, la commune est située dans le massif du Taillefer! Ce qui, pour accueillir un évènement de musique metal me paraît tout à fait opportun. (Note de mon chef bien-aimé que j’ai inventé pour faire genre : « il a fini de faire des jeux de mots le Quantum? Sinon, dans mon bureau! ») En fait, il serait plus sage et plus sérieux de dire que le cadre est non seulement bucolique, mais en plus magnifique. La salle des fêtes, où se déroule le Matheysi’n rock, est entourée de montagnes aussi verdoyantes qu’impressionnantes. Les superlatifs ne manquent pas pour décrire l’état dans lequel je me suis trouvé lorsque je suis arrivé à bon port.
La commune est elle-même située sur une des pentes qui jonchent l’environnement, et se trouve être tout à fait pitorresque avec ses maisons dans le style montagnard et certaines habitations plus modernes qui ne font qu’ajouter du cachet supplémentaire. En résumé, le cadre est splendide, digne d’une carte postale, et je pense que la distance ne sera pas un problème pour faire venir le public acquis à la cause metal et plus habitué à un environnement urbain sur Grenoble. À mon arrivée, je retrouvai mon ami Florian du groupe Kingcrown, et son ingénieur scène Tristan. Je fis connaissance avec les autres musiciens du groupe, ainsi qu’avec ceux de Faith in Agony. Les autres groupes étant éparpillés autour de nous (Holophonics) ou encore absents (Chaoseum arrive directement de Lausanne), je pris mon mal en patience et découvris la scène qui allait accueillir l’évènement. Premier évènement notable, et non des moindres : un mariage se déroulait au même moment pendant que les artistes attendaient les balances au soleil, ou à l’ombre d’un arbre, ou même sous la tente dédiée pour ranger les instruments. Non content de se trouver au même endroit, les musiciens rajoutèrent à la bonne humeur ambiante en prenant part aux festivités du mariage, en félicitant les mariés. Clairement, on devine tout de suite que les musiciens présents ne sont ni prise de tête, ni avares en joie. D’ailleurs, tout est réuni pour que nous passions un excellent moment : le barbecue en extérieur, les organisateurs qui sont partout pour vérifier que tout nous satisfait, le temps radieux, bref! Tout est impeccable! Le premier groupe, Lingus, ayant annulé sa participation à la dernière minute pour un problème mécanique, c’est le groupe Skyfolk qui a la lourde charge d’ouvrir les festivités (ou hostilités c’est selon). Cette charge est d’autant plus difficile qu’ils doivent assurer les interludes, c’est-à-dire les changements de plateau entre chaque groupe. Leur scène est située sous un chapiteau à l’extérieur, ce qui n’est pas toujours l’idéal en condition de concert. Mais force m’est de constater que non seulement le contrat sera rempli tout au long de l’évènement, mais en plus il le sera avec brio! Le trio composé de deux guitares acoustiques qui accompagnent en chœur la chanteuse enchaîne avec adresse. Le groupe sera à la hauteur des attentes, sans aucun doute possible. La séduction ira jusqu’à conquérir les musiciens des autres groupes qui viendront pousser la chansonnette et participer à la fête avec nous. J’ai su par des bruits de couloir que cette interlude a été un franc succès, et surtout vue comme une idée formidable! À creuser pour les futurs évènements. Bon coup de poker les amis organisateurs! Faith in Agony est donc le premier groupe à ouvrir le festival en indoor. Composé de quatre musiciens – une bassiste, un guitariste, un batteur et une chanteuse – le groupe originaire de Grenoble se présente comme un groupe de metal alternatif. Je réitère mon opinion selon lequel ce style est assez fourre-tout et donc, j’avoue me trouver un peu sceptique. Mais dès les premières notes jouées, ce n’est pas tant le style qui retient toute mon attention, mais la prestation scénique. Elle relève d’une très grande qualité, d’un travail soigné et le résultat dépasse toutes mes réticences jusqu’à les faire taire à tout jamais! Même si cette dernière repose essentiellement sur la frontwoman Marianne, qui ne manque pas de charme et montre toute sa sensualité devant son micro jusqu’à électriser l’assistance. C’est bien elle qui représente le groupe, sans aucun doute. Les autres musiciens se montreront plus en retrait, occuperont toutefois très bien l’espace et donnant de leurs personnes, mais derrière. Le batteur manifestera lui aussi une grande débauche d’énergie, ce que j’apprécie car les batteurs ont quelques fois besoin de se concentrer sur les lignes rythmiques et restent souvent assez stoïques. Là, ce n’est pas le cas et je remercie Quentin (FUSION!!!) pour cette motivation. Le public aura cependant un peu de mal à se manifester, mais je pense que cela est dû d’une part à la découverte du groupe pour la majorité d’entre eux, et d’autre part par la mise en scène de Faith in Agony qui ne motive pas verbalement les troupes. La musique ne me fera pas franchement penser à du metal mais plutôt un genre de grunge et de rock. La voix de Marianne, très puissante, achèvera de me conforter dans cette impression. Même les mouvements proposés par les musiciens font plus grunge. J’ai particulièrement apprécié… un morceau présenté comme « blues », qui s’avèrera être un leurre, permettra aux musiciens de s’asseoir pour un tour de mise en scène bien huilé. Le dernier morceau… amènera la chanteuse à se mettre au sol dans une forme de procession finale, toujours dans une posture séduisante qui amènera le public à faire entendre son approbation. Le groupe aura même droit à un rappel, preuve que la prestation a fait mouche! En résumé, Faith in Agony a parfaitement rempli son rôle et témoigne d’une bonne expérience scénique, car même si les musiciens sont en retrait par rapport à Marianne, je pense qu’il s’agit d’une démarche volontaire et qui amène une certaine fraîcheur. Elle peut déranger certains, ce ne sera pas mon cas! En revanche, le son me laissera un goût amer : est-ce volontaire ou non? Toujours est-il que Marianne a été beaucoup trop mise en avant. On n’entendait que très peu les chœurs, et parfois sa puissance vocale couvrait tous les instruments. On va partir de deux hypothèses : soit c’était involontaire et on passe outre. Soit c’était l’inverse, et je pense qu’à trop vouloir mettre son atout charme et vocal en avant-scène, la musique s’en est montrée dénaturée. Cela ne m’empêche pas de mettre dans mes points forts le chant que j’ai trouvé bluffant, électrisant. Je mettrai aussi les compositions qui sont très bien construites et se mettent bien au service d’un concert (à voir sur CD). À voir dans de futurs concerts. En tout cas, opération séduction musicale réussie! J’ai beaucoup aimé, et je me suis promis de suivre le groupe avec le plus grand intérêt. Au passage, merci pour votre gentillesse, vous avez été une belle rencontre!
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Après une pause hot-dog/boisson (j’en profite pour remercier chaleureusement Marion pour sa gentillesse et sa disponibilité), Skyfolk et discussion, c’est au tour du groupe Holophonics d’entrer en scène. Je n’ai pas percuté immédiatement, mais lorsque j’ai vu les musiciens entrer, je me suis soudainement rappelé que j’avais vu le groupe en 2007 à Montélimar! Le groupe se produisait à l’époque sur un petit kiosque, dans le parc de la ville, et j’avais été frappé par l’aisance scénique du groupe. En même temps, ce fut un de mes premiers concerts… Nostalgie quand tu nous tiens! C’est donc avec une banane d’enfer que je me présente devant le quintette de Grenoble. Et curieusement, lorsque le set démarre, j’ai cette impression étrange de voir un groupe « légendaire », un peu dans la veine de Bérurier Noir. Étonnant! Je pense que c’est la prestance des musiciens, en particulier du frontman, qui me donne cette impression. Avec ses cheveux gris et sa gouaille de rockeur, j’ai vraiment le sentiment d’assister à un groupe de légende rock! En tout cas, on ne peut pas enlever au groupe son aisance et sa qualité. Les morceaux sont très accrocheurs, fonctionnent comme des uppercuts en pleine figure. Les morceaux s’enchaînent avec un rythme endiablé, mais je devine une sorte de latence, de profondeur dans la musique qui rappelle que derrière la violence il y a toujours une explication. Je décèle une rage intérieure malgré le chant assez posé de Stéphane. C’est d’ailleurs un point surprenant : parvenir à conserver une énergie aussi électrisante avec un chant aussi calme. En tout cas, la prestance du groupe rappelle qu’ils sont chez eux, et la manière d’échanger avec nous montre à quel point le quintette est à l’aise sur scène. Le mélange de rock et de metal fait de Holophonics un groupe relativement accessible à tous, il ne manque qu’à pénétrer leur univers pour adhérer pleinement au concert, je sens de fait le public légèrement plus attentif qu’auparavant et l’ambiance s’installe progressivement. Il me serait trop présomptueux de dire que le groupe a rempli sa mission séduction auprès du public, et à fortiori, de moi-même!
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Puis vint le tour de Kingcrown, groupe français d’ici et d’ailleurs tant les membres sont éparpillés. On retrouve du Nancy, du Cannes, du Lyon, etc. Groupe cosmopolite mais surtout, groupe de légendes du metal français. J’ai eu la chance de papoter avec eux avant le concert, j’ai appris à connaître des personnes sympathiques, disponibles pour discuter et surtout plein d’entrain à mettre une ambiance joyeuse. On sent que les mecs sont super contents d’être ici pour donner de leur personne. Kingcrown, ce sont d’anciens membres de Nightmare et dont le groupe portait le nom d’Oblivion avant qu’un groupe du même nom s’en mêle et menace de déposer un recours devant la justice pour la propriété du nom! Tout une histoire que Jo Amore, le frontman, nous racontera sur scène avec beaucoup d’humour. Nous aurons droit durant le show à des morceaux du prochain album, d’autres réfugiés de Nightmare, et les morceaux envoient du lourd! Sur la prestation en elle-même, qui sera d’une grande maîtrise sur la mise en scène comme d’une certaine sobriété dans les costumes, je retiendrai un point essentiel : je me suis pris une claque. D’abord par la prestation scénique du groupe qui envoie de la purée tout en étant d’une sérénité à toute épreuve, et ensuite par la sympathie que les musiciens véhiculent. Toujours souriant (surtout Markus le bassiste qui ne décrochera pas son sourire de la soirée, sacrés zygomatiques!). Et quant à la musique, il s’agit d’un power metal teinté d’accents heavy du plus bel effet. La voix du chanteur contient une énorme étendue vocale qui me laisse pantois. En fin de compte, cette prestation m’a donné une leçon, et je pèse mes mots. Une leçon de professionnalisme, une leçon d’humilité aussi (se retrouver face à des légendes aussi sympathiques et humbles ne peut que remettre les pieds sur terre), et une leçon musicale. J’ai adoré, et je ne m’avancerai pas en disant que ce fut un des meilleurs moments de concert de mon existence. D’ailleurs, il me semble que ce fut le groupe où le public répondra le plus présent, et sera le plus réceptif. Un grand bravo au groupe!
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Pour clore la soirée de la plus belle des manières, voilà que débarquent sur scène de drôles de personnages! Costumés et maquillés avec soin, pour nous planter un décor macabre mais point dans l’exagération, je vous présente Chaoseum. Groupe venant de Lausanne exprès, les helvètes officient dans un metal plus extrême que le reste de la programmation. Je crois déceler un mélange de metalcore et de thrash avec un chant à la fois clair et guttural. Sur leur prestation, les spectateurs seront à ma grande surprise assez nombreux pour leur rendre honneur comme il se doit et, connaissant le risque de proposer un groupe plus extrême que les autres, je m’attendais à une réelle désapprobation du public. Il n’en sera rien! Je pense que cela est dû, en partie, à la maîtrise de la mise en scène du groupe qui se montre à son aise, à la communication qui mêle tantôt l’humour (« nous sommes des petits suisses! »), tantôt le sérieux. La musique s’annoncera comme je l’aime, avec cette touche de metal costaud et cette mélodie que l’on retrouve principalement dans le chant, surtout lorsque l’on sait qu’au départ il y avait une chanteuse. Pour une fin de soirée je suis agréablement surpris! Je tiens à remercier le groupe pour sa gentillesse et sa disponibilité malgré la fatigue, je vous promets de faire une chronique aux petits oignons de votre album les amis. Alors, vous me direz, que retenir de cette troisième édition? Je vais me laisser aller dans une forme d’émotion en vous disant que j’ai été très touché par l’accueil qui m’a été fait, mais pas seulement. Il faut rendre un grand hommage aux organisateurs car ils ont mis en exergue un point capital : proposer un évènement qui mette en avant les groupes locaux peut se traduire par une réelle passion pour la musique, et cela s’est vu tout au long de la soirée. Je crois ne pas trop m’avancer si je vous dis que tout était présent pour que la soirée soit une réussite, que ce soit pour le public que pour les artistes, et cela ne peut qu’être tiré par un moteur commun : cette passion pour le rock qui nous anime. Je peux vous dire que je suis fier d’avoir consommé mon dépucelage avec vous alors il ne me reste plus qu’à vous remercier. Merci à Thierry et Thierry, la paire pensante du Matheys’in Rock, merci à Fabienne, ses deux filles et ses ami(e)s pour leur gentillesse et leur bonne humeur (ce n’est pas évident de tenir un bar dans ce genre d’évènement en plus, donc double hommage!). Merci aux bénévoles de donner de votre temps pour nous faire plaisir. Merci aux artistes pour votre disponibilité et l’ambiance géniale que vous avez contribué à mettre, c’était juste une super affiche! Et merci au public d’avoir permis que cette troisième édition prenne toute sa grandeur, j’espère, au nom de Soilchronicles et surtout de la musique en général, qu’il y aura encore beaucoup d’éditions! Longue vie au Matheys’in Rock!
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