Photos + report : Migou

Ceux qui ont vécu le moment n’en sont pas encore revenus. La tête dans les étoiles, les pieds ne touchant plus terre, on cherche les liens YouTube, on mate les photos, on garde le lien, histoire de faire perdurer encore un peu.
Ceux qui ont vécu l’instant le clament tous : c’était le concert de l’année, pour les aficionados du doom death avant-gardiste.
Ceux qui étaient présents pour cette occasion ont vécu plus qu’un concert.
Le 24 septembre, au Petit Bain, à Paris, c’était une rencontre quasi familiale.

Mémé n’allait pas louper cet événement, tout de même ! Si quelques centaines de kilomètres séparent sa Bretagne des nuits parisiennes, elle ne s’est pas sentie hors sol en foulant celui du Petit Bain, salle de spectacle flottant sur la Seine. Petite salle, certes, mais on se dit qu’on va en prendre plein la tronche !
Quelques jours auparavant un message annonçait l’ouverture des portes 30 minutes plus tôt que prévu. Mémé a à peine eu le temps de poser son sac à l’hôtel que déjà, il était l’heure de se mettre en branle. Quelques personnes attendaient de pouvoir franchir la passerelle. Au loin, on entraperçoit quelques membres de Misanthrope. Et à l’intérieur, on croise d’autres musiciens, en toute simplicité.

En toute simplicité… C’est le mot ad hoc. Car cette soirée sera sous le signe du rassemblement festif. C’est un anniversaire que nous fêtons là. Celui de Holy Records ! 30 ans… Et à son actif, des découvertes et signatures de groupes qui font maintenant les beaux jours de diverses scènes metal, comme la scène metal grecque par exemple, avec Nightfall, On Thorns I Lay, Septic Flesh, ou israélienne avec Orphaned Land. Mais ce ne sont que quelques noms. Et en ce soir de septembre, ce sont pas moins de 10 titres des années 90 qui seront revisités.

Oui, mais par qui ? Par les Holy Maniacs, le tribute band official de Holy Records. Un groupe spécialement créé pour l’occasion, avec des musiciens hors pair. Vous ne me croyez pas ? Qu’à cela ne tienne, regardez donc le lineup annoncé le 14 septembre :
Olivia Scemama – Basse (collab : Garwall, Argile, Balrog, No Return, Aborted) / Gilles Delecroix – Batterie (Gronibard et collab chez Aborted, Belenos, Scarve) / Thomas Sommer – Calviers (Execrandus) / Étienne Gonin – Guitares (Orakle, Execrandus, Wargasm, NightShade, Usquam, 7th Nemesis, Acyl) / Shoi Sen – Guitares (De Profundis, Monument of Misanthropy). Et avec pas moins de 4 voix, permettant une géométrie variable dans les propositions : Delora (Moonskin, Lurking) / Frédéric Gervais (Orakle & Studio Henosis) / Anthony Breuil (Lurking) / Philippe Courtois de l’Argilière (Argile, Misanthrope)
Ça vend du rêve, non ?

Allez ! Ne nous étendons pas sur les bières un peu lavasses au prix exorbitant proposées par la salle et focalisons l’attention de Mémé sur la scène où justement arrive le maître de cérémonie en la personne de Philippe Courtois de l’Argilière. Il y a 15 jours, ils n’avaient encore jamais joué ensemble. Et pourtant, l’osmose a été totale.
Le premier titre que les Holy Maniacs nous assènent sera un titre de Argile, « Fangs of Wrath ». Au chant, Philippe et Delora se donnent la réplique. Il est 19h et quelques petites poussières, tout le monde n’est pas encore arrivé, mais ça se remplit.
Pour nous, dans la salle, on a les yeux rivés sur les quelques 9 personnes que compte le groupe, l’intérêt en éveil, les oreilles tendues pour savourer ce revival.
Car oui, le set de près de 1h est un retour sur le catalogue des années 90 des albums signés chez Holy Records. Permettez que Mémé s’étende un peu plus que de raison sur le sujet, ce tribute band étant un one shot…

Le second titre proposé remonte d’ailleurs à 1995 avec « Hymn of Lunacy » ( album One With Darkness) des suédois Tristitia. Anthony a rejoint une Delora encapuchonnée, la bougie en avant, en une cérémonie de doom black.

Et nouvelle configuration avec au chant, cette fois, Frédéric Gervais et Delora pour saluer la pierre angulaire du funeral doom, Godsend. « Slaydream » de l’album As The Shadows Fall, de 1993, nous est offert en guise d’ex voto.

La salle s’est complètement remplie. Désormais, toute personne présente fait partie de la meute Holy Records. On hurle tous à qui mieux mieux.
1997, Legenda offrait un « Wolves, Honey, Wolves », repris d’un même growl, à l’unisson, par Anthony et Philippe. Cette impression de vivre un moment unique, comme un adoubement ! La salle ne s’est pas trompée. Chaude, elle était ! (Tiens, Yoda était de la party ?)
La section rythmique, basse-batterie, Olivia et Gilles, tient la baraque de main de maître. Et tout ça, comme si de rien n’était ! Chapeau bas !

Après ce passage filial, les deux superbes voix claires d’ Ingrid et Frédéric, ont infusé beauté et lourdeur, par le british doom de Serenity. « The Way I Bleed ». Nous sommes en 2022 et en 1996 tout à la fois. Un instant éthéré…

Un an plus tôt, Septic Flesh débarquait, découvert par Séverine et Philippe de Holy Records. 1995, l’album Esoptron offrait un « Burning Phoenix », repris ce 24 septembre par les trois chanteurs. L’ambiance est encore montée d’un cran, jusqu’à ce passage saccadé de batterie où Gilles amène la salle au déchaînement.

C’est à ce moment que S.A.S de l’Argilière nous fait les présentations. C’est vrai, Mémé parle beaucoup du chant, mais la prestation du groupe dans sa totalité est à saluer. Sur scène, c’est le délire complet. On sent le plaisir qu’ils ont à partager le set ensemble. Notons que c’est Étienne qui aura eu la lourde tâche de relever les partitions pour l’ensemble du groupe. Big up !
Ça joue de ouf ! Et ça joue ensemble. Les Holy Maniacs, ce n’est pas juste un tribute band pour une occas’ spéciale. On sent que ce sont des professionnels qui se respectent tout en s’amusant.

On reprend avec un pur passage de communion : « Remnants Of The Only Delight », le premier titre, du premier album des finlandais Yearning, résonne jusque dans nos tripes remuées. Nos respirations sont suspendues, nos esprits captivés. (C’est bon Mémé, tu peux respirer !)

Parlant de premier… le tout premier album signé par Holy Records, 30 ans plus tôt, nous vient de Grèce. Nightfall et sa Parade Into Centuries. Ingrid et Olivia sont déchaînées sur l’intro de « For My Soul, When The Dark Falls Into ». C’est le feu sur scène ! Et ce riff delivré par Shoi, venu spécialement d’Angleterre, qui déglingue littéralement la salle !

Comment vous dire que l’ambiance est exponentielle. Son paroxysme ? C’est pour cet hymne à l’union des peuples. Et en écho, les 4 voix se sont unies pour le délivrer. Neuf en scène pour de la folie furieuse ! 1994, Orphaned Land et son « The Sahara’s Storm », aussi chaloupé que Vénère.

Le public a répondu présent à cette supplique, demandée avec force de conviction par tout le groupe des Holy Maniacs.
Mais quelle soirée, bordel !

Pourtant, il faut bien clôturer à un moment, souffler les bougies car il y a encore le gâteau à déguster ensuite, Misanthrope et son intemporel set de Immortel.
Et comme pour toute fin, tout au revoir, les larmes viennent. Ici, elles sont de cristal avec On Thorns I Lay et ce titre de 1999 « Crystal Tears », de l’album éponyme.
Le plaisir fut visible et sur scène et dans la salle. Les artistes saluent, avec un ultime message de SAS de l’Argilière pour les jeunes générations « Quand il y a de la volonté, il y a du résultat ». Et en retour, le public salue à tout rompre les artistes. On a vécu une première salve magique.

Un petit tour au merch où Severine Foujanet, d’Holy Records, nous attend. Dehors, certains s’aèrent la tête. La zone fumeur étant proche du catering, on se retrouve tous, artistes et public, à s’échanger nos premières impressions… tellement vives !

Avec les 30 ans de Holy Records, on peut aussi parler de l’année des 30 ans (ou presque) de Misanthrope. Et avec ces 30 ans, ma p’tite dame, je vous sers quoi ? Un 20 ans, bien sûr ! Les 20 ans de l’album Immortel !
Il est temps de revenir dans le ventre du Petit Bain. Sur les planches, Gaël Féret, Anthony Scemama, Jean-Jacques Moréac et S.A.S de l’Argilière entrent dans la danse. Les patrons vont nous offrir tout l’album Immortel : « Eden Massacre », « Les Empereurs du Néant », « Maimed Liberty », « Les Lamentations du Diable », « Khopirron », « Au Baiser de Vermeil », « Nuit Androgyne », « The Soul Thrower », « La Momie de Marianne », « Conte Fantasmagorique », « Tranchées 1914 », « Passion Millionnaire ».

Y a pas à dire, Misanthrope est un groupe de légende. Et le public ne s’y trompe pas. Si les Holy Maniacs avaient chauffé la salle à blanc, ici les spectateurs sont tous à l’unisson. Un seul et même Homme, fait d’une quantité innombrable de paires d’yeux, de bras, de jambes, d’oreilles, de corps, de…  C’est bon, Mémé, je crois qu’on a compris le concept ! Et comme un petit rappel de la première partie, Etienne Gonin vient endosser une seconde guitare sur quelques titres.

Misanthrope a pas mal tourné cette année. Ils étaient présents sur de nombreux festivals. Dernièrement ils étaient à proposer, à Angers, un concert privé en immersion totale. Toujours dans l’avant-garde, sont-ils ! Mais nul doute que celui-ci aura une saveur particulière.

4 titres viennent clôturer le set de Misanthrope : « La Fabrique du Fataliste », « 1666 Théâtre Bizarre », « Le Roman Noir » qui n’est pas joué pour la première fois (j’ai bien retenu la leçon…) mais qui marquera les esprits de tout le monde. On finit par un monument, « Bâtisseur de Cathédrales ».

On ne veut pas que ça se termine ! Non ! Restez ! Ne partez pas si vite.
Si vite, si vite…. c’est vite dit ! 16 titres, tout de même ! Et on en veut encore ! On est tous chauds bouillants ! Les poings levés, ça slame, ça chante dans la salle comble.
Mais le temps passe vite… quand on est bien.

Comme le dit Pépé V « ce n’est peut-être pas le plus gros concert de l’année, en terme de places disponibles, mais ce sera nul doute celui qui marquera les esprits. »
Et de fait, on en parle encore…
Les absents ont eu tort…