A l’occasion de la 3eme édition du Sonorfest organisée par Sonorasso, j’ai rencontré Benoit, le président de l’association (ex-Brainwash et actuel guitariste du groupe Carne) pour une itw sur le pouce entre deux concerts. Retours sur cette discussion montrant les difficultés pour les associations underground de promouvoir la musique dans un contexte social et culturel pas évident. Ou comment malgré une organisation bien ficelée il est difficile aujourd’hui de faire venir du monde à des concerts où même parfois les têtes d’affiche n’attirent plus. Et visiblement le métal n’est pas le seul genre musical touché par cette crise…
1/ Alors comme ca tout de suite, quelles sont tes impressions sur la journée ?
D’un point de vue organisation ca se passe plutôt bien. C’est un peu le chaos parce que l’on est très nombreux dans l’équipe, peut être trop nombreux. Mais on s’en sort quand même pas mal. Après niveau public bah : il neige, y’a une tempête, ca reste un festival axé rock et métal, et ca ne plait pas trop aux gens. Du coup, y’a pas grand grand monde mais on espère qu’il y aura plus de gens en fin de journée- début de soirée.
2/ C’est la 3eme édition du Sonorfest, du coup avec l’expérience, est ce que cela vous permet de changer des choses, au niveau de la communication, de l’organisation, de la programmation ?
Oui on a changé pas mal de trucs. La première fois c’était dans un bar PMU, la com on l’avait fait uniquement par le bouche à oreille, on n’avait pas grand chose, et on avait rameuté quand même du monde. La deuxième fois on a réussi à avoir, pas de budget, mais une salle qui nous a tout offert. On a fait pas mal de com, mais on a eu aussi des problèmes du à l’hiver, parce que on n’arrive pas à trouver de créneau, enfin les salles ne veulent pas prendre le risque de nous prendre un jour où il y aurait vraiment du public avec une belle tête d’affiche. Donc on a encore fait ce fest en hiver mais il y a eu quand même du monde, grâce à la pub offerte par la salle que nous avons diffusé avec Sonorasso. Et la cette année on a eu pleins de partenaires, plein de budget, on a eu tout ce qui fallait quasiment,…mais un manque de temps aussi. Et ce qui nous a cassé le plus est le problème du renouvellement de bureau. Les ¾ des gens sont partis au milieu ! On était 6 à la base à tout organisé et on s’est retrouvé à 2 les trois derniers mois. On n’a pas eu le temps de former d’autres gens pour nous épauler. Du coup pour le moment je pense qu’on sauve bien les meubles, mais si c’était à refaire, je pense qu’on ferait pareil mais en étant un peu plus nombreux dans l’orga…on gérerait un peu mieux la situation avec moins de personnel.
3/ Combien de personne travaillent sur le fest, qui fait quoi ?
En tout on est 100 sur le terrain, dont 60 artistes quand même. Les 40 restants sont les bénévoles et les techniciens. Donc ca reste beaucoup de gens à gérer, surtout pour deux têtes, et donc finalement ca fait un peu trop pour nous. On n’arrive pas à faire mieux. Mais il y avait tellement de poste à pourvoir, tellement de choses à gérer et à contrôler, en plus la salle nous demandait de gérer certains trucs dont nous n’avons pas l’habitude. Les 3/4 des concerts qu’on organise sont généralement dans des petites salles, des caves, des bars…et on a très peu d’expérience dans des salles comme celles ci. Donc du coup on s’est retrouvé avec pleins de choses qu’on a appris sur le terrain, qu’on est encore en train d’apprendre maintenant…même si sur le papier ca ne paraît pas assez, sur le terrain on se rend compte qu’il y a quand même beaucoup de gens et qu’on se marche un peu dessus. Et surtout le problème c’est l’information qui circule mal. On dit un truc à un mec, il le comprend pas très bien, il le diffuse à quelqu’un d’autre, qui le comprend moins bien, et ainsi de suite…c’est un gros problème de communication interne en fait.
4/ Donc pour les prochains fest, vous prévoyez moins de monde j’imagine pour organiser le truc…
Ouai je pense que l’année prochaine si on le refait on prendra moins de gens, on les formera mieux, on se préparera peut être un peu plus à l’avance, et surtout on changera la période du festival, parce que la l’hiver, la neige, la tempête c’est plus possible !
5/ Un festival comme ca prend combien de temps à organiser ?
On est dessus depuis mai 2009, ce qui nous a pris un peu plus de 6 mois. On a commencé à faire les devis à droite à gauche auprès des groupes, auprès des salles,…le temps de demander des subvention aux administrations…et de préparer aussi toute la com parce qu’il fallait être diffusés. Ca a pris pas mal de temps, en plus avec les problèmes du bureau,…mais ca peut prendre moins de temps en fait. La première édition avait été faite en deux mois,…tout dépend du temps libre et de l’efficacité. La on a tous du boulot à côté, pleins d’autres priorité, du coup on est obligé de travailler 10min, 1h ou 2h par ci par la. C’est chiant, c’est la galère.
6/ Au niveau de la programmation, est ce que tu peux nous en dire plus, est ce que tu as un coup de cœur en particulier ?
Un coup de cœur…oui, peut être les Pitbull (in the nursery), parce que ca fait longtemps que j’écoute ca et que j’aime bien. Mais sinon tous les groupes sont de très très bonne qualité, je les aime tous, et c’est pour ca que je les ai programmé au final. Non franchement je n’ai rien à dire sur la programmation, pour moi elle est impeccable, tous les groupes savent bien jouer, y’a pas vraiment de groupes amateurs. Même si au niveau communication ils le sont, ils ne sont pas toujours connus, ca reste quand même de très bons groupes qui jouent très bien, qui ont du bon son, qui sont en place et qui méritent justement d’avoir un public, et c’est ce qu’on essaye de faire.
7/ Justement ce mélange rock/métal n’est il pas un peu risqué par rapport au public ?
Oui et non. C’est à dire que… vu qu’on a fait pas mal de concerts rock ou métal, et des fois mélangés, on s’est rendu compte que quoi qu’il arrive, y’a jamais personne vraiment. Les gens ne vont plus en concert, pour pleins de raisons. Déjà parce qu’ils ne peuvent plus fumer à l’intérieur, parce qu’ils ont de moins en moins de tune, que même si les prix d’entrée sont de plus en plus bas, les gens ne veulent plus dépenser de tune la dedans, ou parce qu’ils ne connaissent pas les groupes, qu’ils n’ont pas forcement envie de les connaître, et ils ont peut être mieux à faire aussi. Ou peut être que les groupes ne sont pas aussi bon que ca, on s’en rend plus compte parce qu’on baigne dedans…peut être que la musique qu’on leur propose est nulle, je ne sais pas. Moi j’aime bien, j’ai l’impression que c’est de la qualité, mais peut être que je me goure complètement.
8/ Quel serait l’avenir pour ce genre de petit festival comme le tien, pour des concerts underground ?
L’avenir ? Je pense qu’il n’y en a pas. Franchement. Les ¾ de gens qu’on a rencontré et qui font ca depuis des années, ils ont tous une durée de vie extrêmement courte. Ils font ca un an, deux ans, trois ans maxi. Après ils arrêtent et mettent la clé sous la porte. Y’a pas d’avenir dans ce truc la, à partir du moment où personne ne veut investir de l’argent vraiment, personne ne veut vraiment prendre le temps, parce que mine de rien c’est un taf énorme, bah ca paraît con mais….la les gens on ouvre les portes pour eux de 14h à 2h du mat, mais nous on est dessus depuis des semaines et des semaines, et même aujourd’hui on est la depuis 11h ce matin et on sera peut être ici jusqu’à 5h du mat le temps de tout ranger. Ca reste des gros journée de travail, et ce ne sont que des gens qui sont bénévoles pour la plupart. C’est une voie sans issue.
9/ Donc pour toi le Sonorfest n’a pas trop d’avenir ?
Que ce soit le Sonorfest ou tous les autres festivals…on en connaît pleins des festivals underground comme celui la. Il y a le « Paris brule t’il » qui a arrêté l’an dernier justement parce qu’ils faisaient venir des têtes d’affiche partout d’Europe, et personne ne venaient alors que c’était des super groupes très connus dans leur pays. Y’a jamais personne, ca reste underground. Après le problème vient à la fois de la com, parce que ca coute cher, parce que les gens la font pas bien, parce qu’ils ont la flemme, parce que ca demande du temps…c’est très compliqué et très long à faire. Et quand on a tous un boulot à côté, bah faut pas se leurrer on ne peut pas le faire. L’avenir… Ouai y’a l’opéra rock de Mozart, ca y’a de l’avenir la dedans. Toutes les productions Kamel Ouali ou TF1, y’a de l’avenir la dedans. Y’a de la tune, y’a des gens, on leur montre à la télé, à la radio, dans les journaux, même quand ils achètent leur pain,….qu’est ce que tu veux lutter contre ca ? Nous la seule lutte qu’on peut faire c’est le bouche à oreille, internet, les quelques forums spécialisés…et quand on dit quelque y’en a quand même une centaine ! On se fait chier à faire la com sur internet pendant des semaines et de semaines…et le résultat on le voit aujourd’hui. Franchement quand y’a du monde, c’est plus un coup de bol, ou alors c’est parce que les gens ont beaucoup d’amis et pas vraiment de public.
10/ Pour ce genre de festival, tu attendais combien de personne ?
J’attendais…pas plus de 50 personnes. Par ce que j’ai l’habitude de ca maintenant, je sais que j’aurai eu rarement plus. Mais par contre j’aurai espéré qu’il y en ait au moins 200. Non 200 c’est peut être exagéré, mais au moins 150. Bon la journée n’est pas fini mais…
11/ Oui la il doit être 16h30. Combien d’entrées depuis 14h ?
Une trentaine, une quarantaine, pas plus.
12/ Par rapport à l’association, tu préférerais qu’elle s’arrête complètement, ou la tourner autrement pour promouvoir les valeurs de Sonorasso ?
Non l’arrêter complètement ca serait débile. On reste des passionnés et on a envie de faire ca. On fait tous de la musique ou autre, de l’artistique, d’ailleurs Sonorasso ce n’est pas que de la musique. On en a envie, on a besoin de se faire diffuser, sinon on reste chez nous dans notre piaule, et ce n’est pas notre but. Peut être essayer de trouver des nouvelles méthodes, des nouveaux moyens, des nouveaux contacts, de faire ca autrement. C’est ce qu’on a essayé de faire avec cette édition, rien que le fait d’avoir des partenaires et des subventions pour nous c’est la première fois. Avant on n’avait pas ca, c’était que à l’arrache, que de notre poche et que du bouche à oreille.
13/ Un dernier mot ?
Un dernier mot…bah….on se marre bien quand même mine de rien ! Mais si y’a pas ce que l’on espérait, ca reste une bonne journée, on est entre pote, on s’éclate. Les conditions sont bonnes, on essaye de faire ca bien au moins pour les gens qui sont la. On espère que ca va continuer jusqu’à la fin de la journée !
Merci à toi !
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