Pain of Salvation + Kingcrow (Lyon, Ninkasi Kao, 19 septembre 2018) ...
Photos + report : Lusaimoi
La précédente venue de Pain of Salvation à Lyon était pour le moins attendue. Huit ans… Ça faisait huit ans qu’ils n’avaient pas mis les pieds dans la région ! Leur concert de 2009 ayant été pour moi un vrai coup de foudre pour un groupe que je ne connaissais que de nom, l’idée de les revoir me mettait en joie. Malheureusement, la déception a été de la partie. Pas à cause des Suédois, parfaits, mais à cause d’une partie du public, véritable caricature du progueu hautain et prétentieux… L’équivalent métallique des amateurs de Jazz ; autant dire un cliché insupportable. C’est donc avec une certaine appréhension que saisi la chance de remplacer cette mauvaise expérience par un tout nouveau souvenir.
Lorsque j’arrive, après avoir cherché la nouvelle entrée du Kao pendant plusieurs minutes, Kingcrow a déjà commencé son show. Et si de l’extérieur, ça m’avait l’air sympa, ce n’est qu’au bout de quelques minutes une fois rentré dans la chaleur toujours aussi étouffante de la salle que le charme a réellement pris. Ceci notamment grâce au chanteur, dont se dégage une aura folle. Il investit la scène de manière impressionnante, aidé par des musiciens impliqués, bien que plus concentrés sur leurs instruments. Leur attitude est parfois proche du Shoegaze, notamment en ce qui concerne le guitariste chevelu, entièrement plongé dans les fumigènes, d’un bout à l’autre du show. Certaines de mes photos me semblent d’ailleurs proches de l’image – visuelle et auditive – que renvoie My Bloody Valentine.
Les références du groupe sont nombreuses, mais la principale reste bien sur PoS, notamment son côté émotionnel, car l’aspect plus déjanté n’est pas pour nos amis italiens. On retrouve quelques éléments plus proches de Sigur Rós, dans les intros et les passages les plus calmes, mais c’est bien les Suédois la principale influence. On le sent dans le riffing, parfois vraiment proche, ainsi que dans certaines intonations et la manière de chanter. Etre en première partie de cette tournée apparait donc comme une évidence pour Kingcrow, et Daniel Gildenlöw ne s’y est pas trompé, en faisant une apparition sur « Night’s Descending », auquel il a participé.
La sale n’étant déjà pas vide pour la première partie, je me dis donc qu’il est préférable d’affronter la chaleur pour obtenir une place assez proche de la scène, plutôt que de prendre un peu d’air frais. Une réflexion judicieuse, quand on se rend compte de la difficulté à se déplacer dans le public (déjà plus sympa que la dernière fois) pour changer de point de vue.
Les lumières s’éteignent, nous laissant seuls avec une télé diffusant des parasites et l’intro de « Full Trottle Tribe », puis le show vire et se poursuit magnifiquement sur le très métallique « On a Tuesday », premier titre du dernier album. Là, le plaisir est total. On retrouve tout ce qui fait de PoS ce groupe si singulier. Et en live, il prend une tout autre dimension, aidé par une mise en scène tout bonnement fantastique. C’est bien simple, des trois concerts du groupe auxquels j’ai assisté, je pense bien que c’est leur meilleure prestation.
Les lights, en premier lieu, ajoutent un dynamisme fou aux passages les plus énervés et soulignent les moments les plus intimistes, comme ce chant que l’on croirait féminin, repris avec brio par Léo – Ragnard ayant quitté le groupe, signant ainsi le retour de Johan.
Le guitariste, souriant, grimaçant, est un monstre de scène qui m’avait déjà bluffé il y a neuf ans. Et sa réintégration semble avoir mis les fans en joie, car la fosse est plus remplie de son côté que de celui de Gustaf, pourtant loin d’être inintéressant à regarder.
L’ambiance fait des allers-retours entre l’émotion à fleur de peau – les larmes présentes dans les yeux de certains membres de l’assistance prouvent à quel point Pain of Salvation n’est pas un groupe de Prog comme les autres –, et l’humour, porté par un Daniel décidément très en forme et visiblement heureux d’avoir repris les tournées. Chaque membre ayant un micro, il aurait été très pratique de donner le rôle des transitions au Français de la bande, mais le frontman tient à les faire lui-même. Avec un succès certain, parce que décrire pendant une dizaine de minutes une collection de vieux vinyles plus ou moins connus – avec un aparté sur ses chaussures – pour annoncer le dansant, coloré et indispensable « Disco Queen » sans lasser, c’est pas rien.
Un titre taillé pour le live, où les musiciens s’en donnent à cœur joie, veste à paillettes, doigts lumineux, boules à facettes, l’envie de se trémousser se fait sentir.
Si les Suédois vont aussi chercher dans des albums plus anciens, dont One Hour by the Concrete Lake (seule la période plus Rock du duo Road Salt est écartée), avec certains titres plus rares en live, la part belle est évidemment laissée au « petit » dernier : In the Passing Light of Day. Ce qui donne lieu à une petite joke du groupe : « On a voulu vous faire croire qu’on allait commencer le concert par le même morceau qu’à notre dernière venue, alors maintenant, on va terminer par le morceau avec lequel on voulait vous faire croire qu’on allait démarrer ».
C’est donc « Full Trottle Tribe » qui vient conclure un show si bon, qu’il ne pouvait qu’être trop court.
Heureusement, le public en redemande, et le rappel vient bien vite avec « Used », déjà, et évidemment le titre donnant son nom au dernier né.
Un véritable concentré d’émotion de quinze minutes, prenant tout son temps pour nous envoûter. L’émerveillement est total, le son et l’image s’épousent et s’intensifient l’un l’autre avec ces éclairages toujours aussi fabuleux. On passe de l’obscurité au jour, assistant à un lever de soleil artificiel, mais ô combien touchant.
Ainsi, alors que l’ampleur gagne la salle, le concert se termine de la même manière qu’il y a un peu plus d’un an. A une différence près : cette fois-ci, aucune mauvaise surprise à l’horizon. Je faisais partie d’un public totalement en phase avec le groupe. Un public qui a compris ce qu’est Pain of Salvation. Un groupe en aucun cas prétentieux, au contraire, si sa musique est parfois complexe, ce n’est pas pour exposer son talent, c’est parce que c’est ainsi qu’elle s’exprime, et la technique n’est jamais vide.
Tout était parfait ce soir, alors vouloir effacer mon mauvais souvenir est certainement l’une des meilleures idées que j’ai eues. A bien vite j’espère, amis Suédois.
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