Loup Noir / In the Mist / L’Éclat du Déclin / Tarask – Cercle Noir ...
Line-up sur cet Album
- Tarask:
- Joris : basse, batterie, guitares, chant
- L'Eclat du Déclin :
- Julien Hovelaque : tous les instruments, chant
- In the Mist :
- Alrinack : basse
- Dr. Mad : batterie
- Baron Milniph Asgard : guitares, chant
- Istarnos : claviers (session)
- Loup Noir :
- Alrinack : tous les instruments, chant
Style:
Black MetalDate de sortie:
07 décembre 2022Label:
Lower Silesian StrongholdNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 8/10
“Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux !” Eugène Ionesco
Je me suis fait une réflexion assez farfelue il y a peu. Non pas que ce procédé constitue un exploit retentissant tant mes raisonnements ubuesques sont légion, mais j’avoue que celle-ci n’a pas manqué de me surprendre moi-même. J’ai comparé récemment les ouvrages d’Ionesco qu’on ne présente plus quand on aime le théâtre absurde, et je me suis dit que finalement, certains splits frôlent l’absurde tant les groupes ne vont parfois pas du tout ensemble. Je n’ai pas réellement d’exemple tangible en tête, mais je me souviens avoir fait pas mal de splits en chronique, et je me souviens que des fois, les assemblages entre les groupes n’étaient pas toujours des meilleurs, que ce soit d’un point de vue stylistique ou tout simplement productif. Et l’on en arrive parfois à une sortie absurde dans son illogisme et son côté incongru. Je n’aime pas particulièrement la linéarité ni la cohérence rigide dans la musique, mais quand même ! Un peu de logique n’a jamais fait de mal à personne. Après, j’admets que l’inverse est possible puisque certains splits sont carrément énormes dans leurs différences. Mais le plus souvent, cela reste une sorte de fausse compilation tentant vainement d’être rassemblée autour d’un concept ou d’un style similaire, et qui en fin de compte ne demeure qu’un vaste champ de chaos musical.
Dans le genre très surprenant, j’ai fait ce qui ressemble à un split mais qui s’avère être une compilation, celle sortie par le label Black Shadow Legions et qui regroupait pas moins de treize groupes. Alors, autant vous dire qu’entre les différences de production, le Black Metal qui n’étaient pas dans le même jus selon les groupes et le tout n’ayant que peu d’apports conceptuels en commun, il y avait de quoi flipper un bon coup ! Et puis, finalement, la magie de ce marasme sonore et ambiant a donné une sorte de belle compilation, pleine de richesses et de surprises. Je me suis donc bien régalé, comme quoi l’inverse est possible ! Ce brave Ionesco n’est de toute manière pas là pour donner son avis sur le split que je m’apprête à faire en chronique ce soir, et quelque part, c’est tant mieux ! Comme cela, on échappe bel et bien à un écrit absurde et précaire, à la Ionesco. Autant essayer d’apprécier ma chronique du split Cercle Noir, des groupes Tarask, L’Éclat du Déclin, In the Mist et Loup Noir. On essaye ? On y va !
Quatre groupes, tous Français, cela sent bon le cocoricooooooooo chronique ! Tous rassemblés sous la bannière du label Lower Silesian Stronghold que je connaissais pas du tout et qui, lui, n’est pas Français mais Polonais. Et si j’en crois les explications sur leur site, un label qui met en exergue la bonne musique underground. Sympathique tout cela ! Chaque groupe aura donc droit à sa brève présentation, c’est normal
!
Dans l’ordre, Tarask nous vient en premier de leur ville de Marseille avec à la clé pour le duo de musiciens qui a jeté ses premières bases en 2020, semble-t-il, un single, un EP, un premier album autoproduit sorti en 2021 et enfin donc cette participation au split Cercle Noir dûment évoqué. Un duo composé au départ d’un multi-instrumentaliste et d’un chanteur, principe bicéphale qui m’est bien familier, mais qui accouchera finalement d’un projet solo composé uniquement donc de Joris. En tout cas, sans avoir écouté la musique, j’ai réalisé en faisant mes recherches que je connaissais Tarask par le biais… de ses pochettes, plutôt jolies ! A ne pas confondre avec un autre groupe Tarask qui vient de… Marseille. Si ce n’est pas une incroyable coïncidence quand même !
L’Éclat du Déclin arrive en deuxième dans ce split, et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’en découvrant le nom du gars derrière ce projet solo, j’ai eu ce qui s’apparente à une élévation du gouvernail vers les horizons glorieux. Julien Hovelaque, claviériste chez Nuit Macabre et ancien de chez Maleficentia, groupe qui a fait une bonne partie de ma jeunesse, et bien d’autres projets, nous offre donc sur un plateau d’argent un énième projet de son cru! Nuit Macabre que j’ai par ailleurs fait en chronique au moins deux fois. Avec toujours autant de plaisir à écouter ses parties claviers, c’est vous dire ma joie intérieure de voir son nom de nouveau quelque part. Le mec va finir par croire que je deviens homosexuel rien qu’en voyant son nom… L’Éclat du Déclin cumule à ce jour, et depuis sa création, trois singles, un EP, deux albums et donc ce split !
Décidément, lui aussi est partout! On n’en finit plus de voir son nom dans un projet musical, a fortiori Black Metal! In the Mist sonne comme probablement le groupe le plus ancien de ce split, avec une première création en 1994, et une reformation (?) en 2014. Dans l’histoire de ce groupe composé à ce jour de quatre membres, on retrouve donc le fameux Alrinack qui officie cette fois à la basse, mais aussi en tant qu’ancien membre, Gérald Milani, fondateur du label Les Acteurs de l’Ombre Productions. Cela en fait un bien joli CV ! Le seul membre originel qui demeure à ce jour présent dans In the Mist est un certain Baron Milniph Asgard qui fait la guitare et le chant. Autrement, la formation cumule une démo en 1996, seule sortie de la première vague, et depuis 2014 les sorties s’enchainent avec trois albums et trois splits!
Et comme je disais que ce bon Alrinack était absolument partout, le voici seul maître à bord de son énième projet musical nommé Loup Noir, et qui constitue le dernier groupe à composer ce split. Loup Noir existe depuis 2011 et semble être un projet un peu moins productif. Avec deux albums mais dont l’écart est tout de même de dix années entre les deux, avec un premier split entre, on ne peut pas dire que ce projet solo soit le plus foisonnant de tout ce qu’Alrinack peut proposer à côté. En tout cas, cela me fait plaisir de voir ce projet apparaître sur un deuxième split, car du peu que j’en avais écouté auparavant, j’avais vraiment aimé ! Alors j’ai hâte de voir comment ce dernier va conclure Cercle Noir ! Tout cela fleure bon la bonne musique underground!
Un split Cercle Noir qui porte bien son nom avec un artwork qui est sans équivoque et sans doute possible. Bon, niveau qualité, ce n’est pas du grand artwork, mais j’allais dire, un peu comme l’on trouverait dans certaines sorties très enfouies ou anciennes. Avec ce pylône électrique dont se démarque sur un des fils, un cercle noir grossier et dont il est difficile de discerner quelque chose de concret. Je pense en tout cas que les fils de ce fameux pylône séparent l’image en quatre. Quatre pour les quatre groupes ? Peut-être. Et ce cercle noir symbolise peut-être, selon moi, l’imperfection de ce genre musical dont on parlera en bas. Imperfection voulue et assumée, avec toute la noirceur de ses contours et parfois le vide ténébreux qu’il y a au centre, l’incision de ce cercle qui fonctionne comme un fouet terrible aussi. Bref ! Tout est possible. Et comme je ne peux pas creuser plus le paragraphe sur l’image, pour les raisons là encore dites plus bas, j’attends la suite.
Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, voilà que ce split va nous plonger dans un bel et profond Black Metal, du plus underground qui soit. Pas forcément Raw, car underground ne rime pas toujours avec Raw même si l’inverse est plausible. Mais ici, on va surtout parler de Black Metal dans une de ses formes les plus pures et les plus honnêtes. Pas de tricherie, ou presque pas ! Que de la pureté et du talent à l’état brut.
Tarask ouvre donc le bal avec un départ sur les chapeaux de roue! Un Black Metal extrêmement agressif et incisif, avec une bonne dose de mid tempo et tout ce qui va avec. Avec un apport très mélodique qui me surprend tant par la diversité du jeu des guitares que par la technicité qui est d’une rapidité assez incroyable, notamment en blast beat. On croirait presque que ce Black Metal frôle le Metal Technique par moment, et la distorsion des guitares en atteste. Ce Black Metal-là sent bon les groupes des années 90. Je reconnais en effet quelques riffs que l’on trouverait dans des groupes que mon côté prudent me défendrait de nommer ici. Je note d’ailleurs au passage que Tarask s’imprègne plus des ambiances plutôt violentes que réellement froides et incisives. C’est donc sur un Black Metal particulièrement agressif et sans concession aucune (en même temps, est-ce que le genre old school en souffre?…) que Tarask ouvre les hostilités avec trois pistes du même tonneau, sans se défaire de ce mid tempo et de quelques variations rythmiques offrant des moments plus martiaux. Mais la principale grande surprise de ce premier groupe, c’est la production. D’abord parce que je m’attendais à un split estampillé « Raw », sans comprendre pourquoi, mais surtout parce que la production vraiment nickel, détone par rapport aux autres groupes par sa propreté et son côté moderne. Le son est vraiment impeccable, avec une mise en avant de chaque instrument sans dénaturer les autres, une utilisation notamment de la basse qui me laisse pantois, et les chants qui se superposent sont époustouflants de souffrance. En fait, Tarask est incontestablement ma grande surprise de ce split ! Pour toutes les raisons évoquées, et le fait qu’en guise d’ouverture de bal, on ne pouvait finalement pas avoir mieux.
Voici que parvient à nos oreilles encore ébahies par le méfait précédent l’Eclat du Déclin. Je ne crois pas me tromper en disant que sur le papier, cocher le nom de Julien Hovelaque a toujours été un gage de bonheur pour moi pour les raisons expliquées en présentation. Et là où je connaissais l’ami musicien derrière ses claviers, je découvre également un talentueux multi-instrumentaliste, capable de composer un Black Metal qui se démarque totalement du reste par une approche beaucoup plus progressive et mélodique. Avec une montée en puissance et l’apparition de ce fameux Black Metal que l’on connait bien, incisif et froid comme les blizzards d’hiver. Je note que la musique proposée par l’Eclat du Déclin se situe plus sur une approche maléfique que réellement agressive comme le faisait son prédécesseur de split. Mais cela ne m’étonne guère étant donné le CV du camarade.
Il y a surtout une production qui est différente et qui joue un rôle prépondérant pour ajouter une touche de froideur qui ramène vers une noirceur extrême. Les parties en clean sont superbes, et j’adore l’approche technique de la batterie même si on entend un peu trop à mon goût qu’elle est programmée. Et que dire de l’utilisation de la basse… Exactement comme je l’aime ! Mélodique, jouant un rôle presque de soli sur les moments en clean, j’adore !
Définitivement, l’Eclat du Déclin se détache par cette approche d’un Black Metal très progressif, tout en conservant cette touche de noirceur qui fait la « beauté » de ce genre. Un peu comme la boue : une saleté pleine de microbes qui finit par devenir un incroyable bienfait pour l’Homme. L’Eclat du Déclin est donc de ce registre ci. Sophistiqué et innovant, allant sur des sentiers inconnus pour aller vers un Black Metal diversifié et sombre au possible. Le chant en français et en high scream, lointain par moment, comme des voix dans la tête, achève de nous convaincre que l’Eclat du Déclin a toute sa place dans ce split, et plus encore si l’on se projette dans la cour des groupes français undergrounds et illustres. Superbe.
Changement de crèmerie total pour la production avec In the Mist! Black Metal il y a toujours, mais par contre on s’aventure sur les chemins dangereux du Raw Black Metal. Avec même une sorte d’approche « punkisante » du Black Metal comme on l’entend parfois dans certains groupes comme Puzhmer, qui creusent tellement profond dans l’underground qu’on touche la Préhistoire du genre en quelque sorte. Alors, In the Mist propose une musique brute de pomme, sans volonté de faire dans la fioriture sinon dans une bestialité limpide et agressive. Mélodiquement parlant, il y a beaucoup de bonnes choses dans les lignes de guitares et surtout dans un son étrange de basse qui est omniprésent et qui amène un truc en plus indéniable. D’aucun diront que le Raw Black Metal se situe trop dans les tréfonds lugubres de l’underground, mais en vérité, si l’on reste objectif et attaché à l’histoire de la musique, ce Raw Black Metal n’est que le reflet d’une nostalgie et d’un souhait de perpétuer quelque chose. Vous ajoutez à cela des narrations judicieusement placées et le fameux chant en high scream qu’on ne présente plus, et vous avez donc un impeccable mélange de ce qui fait selon moi la beauté dans la saleté du Raw. In the Mist que je connaissais un peu, n’a pas fini de me surprendre je pense. En tout cas, sur trois pistes, on atteint des limites de l’acceptable qui, pour moi, sont géniales. J’adore !
Et pour parachever ce split qui, si j’en crois mon instinct allait du très propre au très sale en matière de production, Loup Noir clôture les débats avec là encore beaucoup de négativisme et de saleté. Mais la particularité est cette guitare qui démarre sur un côté très rythmique en dissonance, et qui apporte une curieuse touche de Dark Folk dans ce Black Metal bien cringe et lent. J’adore la dissonance des guitares dans les accords, et cette batterie toute bête mais qui marque la rythmique avec brio. Le chant est à l’image de ce que sait faire Alrinack à peu près partout où il passe, c’est-à-dire du macabre au possible.
Dans ce Black Metal, j’y vois en fait un côté un peu épique, sinon légendaire, comme un loup noir quoi. Les lignes de basse (que je prenais au départ pour un clavier) jouent pour cela un rôle prépondérant, pour étouffer ce Black Metal minimaliste qui sent bon les exhalaisons d’une âme en souffrance. Mais là encore, dans cette production encore plus Raw que le méfait précédent, avec quelques erreurs notables dans le son général (les pistes coupent toutes seules), on sent poindre une forme de bestialité enfouie au plus profond des âmes. Et je note que le minimalisme de cette musique, conjuguée donc au chant et aux passages à la basse amplifiée, loin de dénaturer l’ensemble, apporte un bonus indéniable à une musique que beaucoup verront comme totalement inaudible et infecte. Mais finalement, n’est-ce pas le propos ici ?…
Voilà donc la fin de cette nouvelle chronique. Vous aurez sûrement remarqué qu’elle est plus courte que ce que j’ai l’habitude de faire, c’est normal. Vous saurez pourquoi à la fin. En tout cas, pour ce Cercle Noir, quatre groupes se partagent le bout de gras. Tarask, L’Eclat du Déclin, In the Mist et Loup Noir s’avancent sur la musique Black Metal avec quatre approches plutôt différentes, allant crescendo vers la saleté et la noirceur d’un underground qui laisse de plus en plus émerger de talents. Bon gré mal gré, on a un split plutôt intéressant, difficile à apprivoiser, qui questionne sur ses fondements et ses choix, mais qui au final s’avère être un split plus qu’intéressant. Un Cercle Noir qu’on aimerait ne pas quitter trop vite. A écouter !
Rendez-vous en interview prochainement, les ami(e)s, vous aurez plus de contenu pour étoffer la chronique.
Tracklist :
1. Tarask – Liberate Me Ex Inferis
2. Tarask – Solve Coagula
3. Tarask – In the Cold Winds of Nowhere (Dissection cover )
4. L’Éclat du Déclin – La Transe de Pierre
5. L’Éclat du Déclin – L’étreinte des Ruines
6. In the Mist – La Lignée
7. In the Mist – Le Voyage
8. In the Mist – Quand Tout s’estompe
9. Loup Noir – Hanté par les Vers
10. Loup Noir – Cette perte
11. Loup Noir – En Deuil
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