Line-up sur cet Album
- Fredrik Nordin : chant, guitare
- Tommi Holappa : guitare
- Johan Rockner : basse
- Olle « Bull » Mårthans : batterie
Style:
Stoner / Stoner RockDate de sortie:
21 avril 2023Label:
Blues Funeral RecordingsNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 9.5/10
“C’est quand il n’y a plus rien à gagner ou à perdre que vous avez une guerre.” Oliver Stone
Vous savez que c’est une galère sans fin de chroniquer des groupes de stoner? Parce que c’est le style sur lequel notre grande archive du metal qui se nomme sans suspense Metal Archives bute souvent. Il est vrai que la nuance entre rock et stoner est parfois, comme je l’expliquais dans d’autres chroniques, infime. Et que notre archive Internet préférée a du mal à répertorier autre chose que du metal. Ainsi par exemple, lorsque je devais faire la chronique de Dune Sea, impossible de trouver des informations tangibles sur Metal Archives! Pourquoi? Parce que s’il y a effectivement des tons stoner évidents, il y a aussi et surtout des tons rock bien marqués, voire dominants. Donc, patatra! Pas d’information pour moi, surtout que dans la moitié des cas, les groupes ou labels ne nous envoient que les morceaux en mp3, et démerde-toi pauvre chroniqueur pour écrire dessus. Tout cela, c’est vrai! Ce ne sont pas racontars! Et puis, l’autre extrémité consiste à trouver des informations sur les groupes de stoner comme Komatsu ou Appalooza, tout cela parce qu’ils sont plus estampillés metal (et encore…). C’est un vrai casse-tête, mais qu’importe. J’aime le style de musique stoner, et je suis prêt à faire des recherches tant qu’il le faudra pour faire les chroniques dues. Et le mieux dans l’affaire, c’est que pour la chronique du groupe Dozer, je n’ai même pas eu besoin de forcer puisque non seulement il existe une page dans Metal Archives, mais qu’en plus le dossier presse était impeccable. C’est parti! Bon ça, c’était avant. Date de la dernière chronique pour Dozer? 2021 ! Autrement dit, pas beaucoup d’années et pourtant, plus aucune page n’apparaît sur Metal Archives. A croire que le stoner n’est pas du metal pour eux… Enfin bref. On pourrait débattre longtemps de quel style a le droit d’être répertorié chez eux. En vérité, le combat reste le même puisque l’Homme est dépendant de ce qui peut lui apporter paresse et facilité. Donc Metal Archives, du balai ! N’empêche, belle revanche pour le groupe Dozer ce soir. D’abord parce que l’album présentement chroniqué et appelé « Drifting in the Endless Void » est le premier album depuis longtemps longtemps. Ensuite, parce que s’il n’y a pas de page sur Metal Archives, le groupe en a une bien belle sur Wikipédia. Et toc ! Allez, on attaque, on va au mastique.
Dozer est un groupe, vous l’aurez compris, que j’ai déjà fait en chronique par le passé. Il s’agissait de la réédition du dernier EP connu du groupe, sorti en 2013 et nommé sobrement « Vultures« . Réédition en 2021 et sortie chez le label que j’aime bien : Heavy Psych Sounds. Depuis? Ce fut la disette. Si on compte les années entre les deux derniers albums en comptant donc cette nouveauté, Dozer aura mis… Quinze longues années avant de proposer « Drifting in the Endless Void » ! Quinze ans. Sans déconner, c’est énorme ! C’est pour cela qu’en faisant mes recherches j’avais été surpris de voir ce trou béant dans le curriculum vitae du groupe de Borlänge en Suède, qui existe en plus depuis 1995 et qui a connu une pause de 2009 à 2012. Non seulement ce groupe fleure bon l’ancienneté et l’expérience, mais en plus il se fait désirer. C’est tout ce qu’il me fallait pour piquer durablement ma curiosité sur Dozer qui m’avait gratifié d’une réédition intéressante mais finalement peu emballante. Six albums avec ce dernier, huit splits et deux EPs plus tard, voyons si ce nouveau grand pas en avant va me satisfaire au plus haut sommet de la montagne rock et metal ! C’est parti.
Stylistiquement, la pochette est vraiment cool ! C’est le mot qui s’impose parce qu’elle collectionne tout ce qui peut potentiellement me plaire dans un artwork. Un côté décalé avec ce que je suppose être une grenade (j’ai pensé à un oignon au début jusqu’à ce que je vois l’intérieur du fruit) et qui semble être au stade avancé de la putréfaction, ce qui ne l’empêche manifestement pas de germer et de donner une pousse. Ce fruit en suspension est au-dessus d’une sorte de main doublée, et les deux sont coupées en deux dans le sens de l’épaisseur, pour donner une sorte d’enveloppe charnelle qui soutient ce fruit. Le tout étant situé dans un beau ciel étoilé. Déjà, j’adore les couleurs. Le mélange est magnifique, ce bleu derrière fait partie naturellement de mes préférés, et j’adore le contraste avec le fruit, alors que cette couleur rouge n’est pas flashy, reste sur des tons plus « tranquilles » comme le bleu. De fait, il y a une forme sérénité étrange qui se dégage de cet artwork. Je ne saurais expliquer par quelle caprice, mais je me sens détendu quand je regarde la pochette de « Drifting in the Endless Void« . Pour la symbolique, j’ai eu toutefois du mal à trouver un lien entre le nom de l’album qui peut se traduire par « dérive dans le vide infini » et le choix de l’artwork. Autant je vois presque de l’optimisme dans cette pochette, autant le nom de l’album me fait le total effet inverse ! Alors, toute la question demeure sur le sens à mettre derrière ce design superbe mais qui semble un peu hors sujet. Attention ! Le sens qui m’échappe ne veut pas spécialement dire que c’est la faute du groupe, peut-être est-ce moi qui suis trop obtus pour cerner le sens exact de l’artwork choisi par Dozer pour illustrer « Drifting in the Endless Void« . Mais je crois bien que malgré tout, il y a du hors sujet. Si on reste donc strictement sur la qualité intrinsèque de l’image, j’adore l’artwork et je loue avec extase le travail magnifique qui a été fourni (et qui va probablement me faire acheter l’album) mais sur le sens, pour moi c’est loupé.
Musicalement, en deux mots : la claque. Je crois que cela faisait très très longtemps qu’un groupe de stoner, toutes découvertes confondues, ne m’avait pas foutu une mandale pareille en primo écoute. J’ai trouvé une musique incroyablement énergique, qui sort des sentiers battus du stoner qui est lent et versatile selon les besoins de faire bien viril, et malgré tout j’y retrouve les ingrédients indispensables à la bonne création d’une musique stoner. A savoir la basse mise en avant, parfois peut-être un poil trop, les guitares qui sonnent très rock, ce qui m’a longtemps laissé perplexe sur la réelle identité musicale de Dozer. La batterie qui tabasse sans en faire trop, et les riffs ultra lourds qui découlent de cet assemblage instrumental. Franchement, à côté de « Drifting in the Endless Void« , je trouve les albums écoutés auparavant bien mous, quand on compare l’énergie terrible que dégage les suédois sur ce dernier album et les sorties en amont, d’une manière généralisée bien évidemment, « Drifting in the Endless Void » dégage une patate incroyable, un pep terrible ! C’est vraiment à se demander d’ailleurs pourquoi l’album porte un nom aussi pessimiste quand on écoute la musique pleine de sourires que nous livrent les musiciens de Dozer. Il y a par dessus ce constat une belle variation dans les riffs qui tantôt font justement très stoner rock, en avalant un peu la lourdeur pour donner un supplément d’âme dans l’énergie générale, et d’un coup certains riffs redeviennent d’une lourdeur instrumentale folle. Cette alternance, faite en toute intelligence et maturité, offre donc en première écoute une véritable claque. La musique donne envie de se défoncer de partout, de se faire une bonne fosse de festival en mode bourrin, et je dirais qu’il y a un véritable excellent travail de composition, maintenant une forme d’interrogation sur la réelle identité musicale de Dozer, présenté parfois comme un groupe de stoner rock, parfois comme un « simple » groupe de stoner. Moi, j’ai envie de dire qu’on s’en bat les reins avec frénésie ! La musique est énorme, point.
Seul léger petit bémol : la production. Je pense qu’il y a un réel défaut sonore avec une trop grosse épaisseur. Cela n’entrave pas l’écoute pour autant, mais je crois que cela correspond avec cette volonté assumée de passer d’un stoner rock plus posé à un stoner tout court plus agressif. C’est sur ces parties-ci, stoner, que le souci démarre avec donc une légère saturation sonore sur les basses fréquences qui donne une sorte de bouillie par moment, où la basse et la batterie prennent le dessus sur les guitares et le chant. C’est d’autant plus facile à identifier que j’ai fait plusieurs écoutes comme c’est d’usage quand j’ai un doute, en multipliant les supports. Le constat reste le même, atténué bien entendu si l’on se contente d’un support d’écoute avec peu de basses fréquences. Mais encore une fois, cela n’entrave rien de particulier puisque la majorité de l’album « Drifting in the Endless Void » demeure audible et même plutôt bien produit dans son ensemble. C’est un peu mystérieux, ce jonglage sonore entre les différents styles revendiqués. Moi, j’aurais vu peut-être un peu moins d’épaisseur sur le tout, histoire de garder cette bi-identité sans bousiller le son d’une partie isolée, et à mon avis le stoner rock n’en aurait pas pris un coup de spaghetti derrière ses oreilles. Mais bon ! Passé l’effet de surprise, je trouve néanmoins que les instruments sont généralement bien à leurs places, l’album agréable dans l’ensemble, voire même retranscrivant très bien l’énergie communicative de Dozer qui peut se targuer de faire bouger les nuques et les tripes. On va donc rester sur un constat très positif.
Et c’est mérité tant le groupe semble avoir eu besoin de temps pour sortir sa nouvelle galette maison ! Dozer ne cherche peut-être pas spécialement à aller sur un concept précis, mais on sent qu’il y a une vraie rage de faire de la musique pour simplement vivre et partager cette énergie dingue, inhérente au style stoner, et un brin virile, pour communier avec ses auditeurs comme il se doit. Après tout, n’est-ce-pas le but numéro un de ce style musical trop « américanisé »? En tout cas, sans entrer plus que cela dans des détails fallacieux, je dirais que Dozer a parfaitement soigné son retour aux affaires courantes, avec « Drifting in the Endless Void » qui sonne comme un retour fracassant ! Autant le précédent EP réédité ne m’avait pas laissé un souvenir impérissable, et je crois bien avoir mentionné que j’attendais avec impatience la sortie d’un album pour me faire une nouvelle idée. Force est de constater que le retour me plait au-delà de mes propres espérances et objectifs. Dozer va indiscutablement m’offrir la sortie stoner de l’année pour le moment, et c’est tant mieux ! Amplement mérité au regard du boulot fourni et de la patience idoine.
Une fois n’est pas coutume, je passe au chant. Petit paragraphe pour vous glisser que le chant constitue selon moi la pierre angulaire entre le style stoner et stoner rock pour « Drifting in the Endless Void« . On a un chant clair très beau, mélodique et se permettant plus d’envolées aériennes si j’ose dire qu’un timbre de voix qui ferait purement rock, mais bizarrement cela ne m’a pa dérangé outrageusement. Moi qui suis rompu aux voix rocailleuses voire saturées sur le stoner, j’avoue que j’ai eu un moment d’hésitation sur le chant de Dozer. Mais au final, je l’ai trouvé bien opportun, pas du tout hors sujet, apportant cette touche mélodique qui manquait aux instruments, et peut-être oserions-nous penser un brin de douceur dans cet ensemble musical viril et bourrin. Je ne suis pas spécialement friand de ce style de chant sur le stoner, mais encore une fois j’ai été agréablement surpris. Sur la technique vocale en elle-même, je n’oserais pas redire ou médire d’un chanteur qui exerce son art depuis 1995 de toute manière, question de respect. Mais ne vous inquiétez pas ! Le chant est top niveau maitrise et techniquement parlant.
C’est le moment de terminer la chronique ! Dozer aura attendu quinze putain de longues années pour nous sortir un album, le sixième de la fratrie, nommé « Drifting in the Endless Void« . Quinze longues années pour les suédois qui auront semblé en errance totale, allant jusqu’à ce fameux vide infini qui est le moteur conceptuel de cet album. Et pourtant. On parle souvent en psychologie du sursaut d’orgueil, cet élan vital et salvateur qui vous sort de votre catatonie cataleptique pour simplement vous refaire vivre. Dozer avait besoin d’une bonne dose, si j’ose dire sans jeu de mot, de cet élan vital pour nous faire revenir ce stoner ou stoner rock qui faisait sa renommée. Une musique tout simplement pétillante, bourrine et mélodique à la fois, avec cet essence existentiel du stoner qui, loin de s’américaniser encore une fois, explore plus l’identité de Dozer dans ses tréfonds mystérieux. Une franche réussite sur tous les plans ou presque, m’offrant ce qui s’apparente pour le moment à ma sortie de l’année dans le genre stoner. Bravo ! Quel retour fracassant !
Tracklist :
1. Mutation/Transformation 07:31
2. Ex-Human, Now Beast 04:29 vidéo
3. Dust for Blood 04:41
4. Andromeda 05:13
5. No Quarter Expected, No Quarter Given 05:32
6. Run, Mortals, Run! 06:44
7. Missing 13 08:34
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