Intervieweuse : Bloodybarbie
Interviewé : Andrew (guitare)
Traduction : Willhelm von Graffenberg
Suite à la sortie du nouvel album « Feel The Misery » de My Dying Bride en été 2015 (chronique : http://www.soilchronicles.fr/chroniques/my-dying-bride-feel-the-misery), nous avons interviewé Andrew (guitare) pour en savoir plus sur le groupe et l’album.
Salut Andrew, je devais vous rencontrer en face à face au Party San l’année dernière mais je n’ai pas pu m’y rendre et j’ai annulé l’interview, comment ça s’est passé?
Salut Bloodybarbie. Et bien c’était notre première fois là-bas, le festival était vraiment bien, on n’est pas restés longtemps vu qu’on a pris l’avion le jour même pour venir jouer et on est rentrés le lendemain : ça craint, mais c’est souvent comme ça pour les concerts. Heureusement que le public était excellent, mais on a eu beaucoup de problèmes de son pendant le concert, on a fait de notre mieux pour faire avec et j’espère que ça ne s’est pas trop ressenti.
Vous aviez aussi assuré d’autres festivals l’été dernier, lequel avez vous préféré le plus?
On a fait le Graspop, le Wacken, le Rock Off en Turquie entre autres. Pour être honnête, je pense que je me suis le plus amusé au Party San ; la majorité des festivals sont ennuyeux, les groupes doivent se préparer pour jouer donc on ne peut pas vraiment se lâcher… bon, certains groupes le font mais pas nous ! Le Party San, c’était pareil, mais une fois sur scène et que j’ai vu que c’était le bordel, nous voulions juste que le show se termine comme rien ne fonctionnait proprement sur scène. Le personnel du Party San comprenait tout de travers, donc c’était le chaos dans nos moniteurs, ça relevait de la blague à un point que je percevais le concert au même niveau de blague. Malgré tout, j’ai apprécié puisqu’on continué à jouer même dans l’adversité : alors que l’orga semblait vouloir nous gâcher le concert, on a fait un concert pas si mal que ça. Merci à vous, orga du Party San, mais svp ne le refaites plus jamais !
Quel est votre ressenti envers ce douzième et nouvel album ? D’ailleurs, il me fait beaucoup penser à “Turn Loose the Swan”, est-ce dû au retour de Calvin ?
Si tu le dis, mais sans tirer la couverture, la part du lion de l’album a été écrite avant son retour. Il a eu un impact positif sur l’album, sans aucun doute et a contribué à quelques riffs mais cet album allait sonner tel quel dans tous les cas.
Quant à mon ressenti, le terme que j’utilise actuellement (venant de Mags, notre ingé son), c’est ‘’breached birth’’ (NdT : naissance violée). Mes sentiments sont bruts, ceux du soulagement de la libération et de l’accomplissement : face à toute adversité une fois de plus, nous avons abouti à un résultat positif. J’ai dû lutter simultanément avec des conneries dans ma vie (des trucs tellement ridicules que je ne peux évoquer ici, mais que ma thérapeute ajoutera au livre qu’elle est en train d’écrire, si elle ne s’est pas étouffée de rire avant). Sinon, c’est quand même un super album (mon opinion peut différer de la vôtre, chers lecteurs).
Peux-tu évaluer cet album de ton propre sentiment et point de vue ?
Comme d’habitude, on pense qu’un nouvel album est le meilleur qu’on ait fait. Mais on sait que c’est une fausse idée. Après avoir écouté celui-là, je me suis dit que c’est l’album le plus grandiose qu’on ait fait, je pense que je dirais la même chose pour le prochain album.
D’un point de vue musical, je peux voir à quel point il est différent. Il y a plus d’énergie sur quelques passages que sur certains de nos albums, les riffs sont plus directs ce qui m’a permis de jouer avec quelques bandes son d’ambiance, c’était amusant de voir comment ça a pris forme. Mais par-dessus tout, je pense que c’est un album puissant et je suis fier de ce qu’on a accompli.
Pourquoi Calvin Robertshaw a-t-il décidé de revenir dans le groupe après cette longue période d’absence, pourquoi a-t-il quitté MDB d’ailleurs ?
Il a fait un burn out/ras-le-bol de l’industrie de la musique après avoir fait 34.788% de l’album. Il a pris beaucoup sur lui pour cet album, et je ne suis pas sur que c’était sage de revenir en arrière. On a d’abord pensé que c’étaient 6 mois de repos et de recul pour recharger ses batteries comme convenu mais même après cette période, il n’était pas prêt à revenir, on a essayé de le convaincre mais sa décision était prise. Après, on a fait avec et j’ai écrit l’album The Light at the End of the World qui marque la 2ème phase de My Dying Bride.
Calvin est revenu alors qu’Hamish nous quittait pour se concentrer sur son groupe Vallenfyre ; c’était évident que Hamish le mettait en priorité par rapport MDB, donc son départ n’a surpris personne. Heureusement, Calvin était déjà entrain d’écrire depuis un an ou deux pour lui-même (quelques riffs qu’on lui a pris d’ailleurs), donc une fois que j’ai été informé pour Hamish, c’était juste évident de lui demander de revenir avec nous et, dieu merci, il était intéressé et a accepté donc tout va bien.
Peux-tu nous parler de l’aspect philosophique de « Feel The Misery » et de ce qu’il représente pour toi ?
Oui ! Mes paroles ont la consonance des chansons folk anglaises, très simplistes et innocentes, avec les mêmes mélodies mais l’idée générale était de faire des chansons sur la manière dont les gens sont devenus creux, sans valeur morale. On nous apprend que la seule façon d’aller de l’avant, c’est d’écraser son semblable (ce qui n’est pas le cas), diviser pour mieux régner à travers la religion et les politiques, prêcher le sermon de la banalité à travers la télévision et les médias, ce qui fonctionne bien d’ailleurs. Et le pire, c’est que ça fonctionne : nous n’avons plus aucune notion d’Humanité. Ce morceau, sans être trop politique, est un coup de gueule face à ce monde, non pas que ça va l’améliorer ou changer quelque chose puisque les gens s’en foutent mais au train où vont les choses, tout ça arrivera assez vite.
Peux-tu nous résumer la thématique et les références qu’on trouve dans cet album ?
Le sexe est un thème principal, 2 morceaux lui sont consacré, et pour le reste, comme d’habitude la mort et la religion.
Peux-tu commenter l’artwork?
Il est lié à un seul morceau, le morceau éponyme ! L’artwork est essentiellement une version résumée de ce que j’ai dit plus haut, focalisé sur l’aspect religieux. L’icône religieuse féminine centrale représente toutes les religions, supposées apporter la paix et l’amour, mais derrière sa façade, il n’y rien d’autre que l’enfer qui n’attend que de s’ouvrir devant nous. Sa main gauche l’offre généreusement au monde.
Qu’est-ce qui t’a inspiré pour écrire cet album, est-il facile pour toi de trouver l’inspiration ?
Je n’ai pas vraiment une inspiration particulière, genre ce moment où tu t’écrierais « Eureka ! » Ca fait plus de deux ans que je travaille sur cet album, j’ai donc eu tout le temps de voir où il me menait. Eu égard à mon ancienneté MDB, je connais les tendances de la musique de MDB, ce qu’on peut et ce qu’on ne peut pas faire pour que le tout concorde. La seule exception pour cet album, c’est que je n’ai pas eu à en discuter ou me concerter avec les autres pendant que j’écrivais. J’y ai rassemblé toutes mes idées sans compromis, ça a permis à mes idées de s’écouler sans être interrompues par d’autres que je n’aurais certainement pas appréciées.
Combien de temps avez-vous mis pour composer et enregistrer l’album ?
Deux ans pour le composer et 6 mois pour l’enregistrer, tout compris.
Quel était la partie la plus difficile en ce qui concerne cet album ?
Le sortir ! Comme tu le sais peut-être, la première version sortie n’était pas ce que MDB avait prévu, et on a eu que plus tard la bonne version.
Avez-vous changé quelque chose dans votre façon de mixer et d’enregistrer pour cet album comparément aux précédents ?
Le principal changement a été d’enregistrer à Academy Studios (notre ancien spot) et de mixer à Futureworks. D’habitude, on enregistrait et on mixait à Futureworks mais à cause du planning de chacun, on a enregistré à Academy une fois de plus et ça s’est bien passé !
Est-ce Dan Mullan est devenu le batteur officiel de MDB où bien il est encore batteur de session ?
Dan est en fait le batteur de Thine and Blasphemer, on ne fait que l’emprunter.
Je me suis toujours demandé si jouer et réussir à faire du Doom implique d’être dans un état émotionnel spécial, un état de dépression peut-être ? (rire)
Non pas du tout ! Le Doom n’est relié à la dépression comme tu dois certainement le savoir ; tu n’écoutes pas le doom pour ça, tu l’écoutes pour son côté bien lourd, cet aspect authentiquement (ou le plus authentique possible) triste, il aspire le poison hors de vous si vous avez le bon feeling avec le morceau.
Etre dépressif n’aide pas du tout et n’aide pas pour l’écriture, si je n’étais pas bien ou déprimé je n’aurais pas pu écrire un morceau ni même me prendre la tête à allumer un ampli ! Vous devez être dans un bon état d’esprit pour dépeindre une telle misère.
Comment se passe la composition au sein du groupe ?
Sur cet album, j’ai écrit la majorité des morceaux, vu j’écris vite de la musique lente quand je me retrouve seul dans le noir. Ensuite, j’envoie des mails/liens FTP au groupe et ils commentent et apprennent les morceaux. Puis on rentre en studio pour tester les morceaux et voir s’ils sonnent bien musicalement parlant, résoudre les potentiels problèmes… Une fois que tout le monde est satisfait, on les enregistre. Une fois que tous les instruments sont enregistrés, je rajoute le chant.
Comme tu es le fondateur du groupe, comment vois-tu MDB depuis le début jusqu’à ce jour ?
On est toujours entrain de se battre pour sortir de l’underground, je t’en dirais plus une fois qu’on en sera sorti.
Quel était le plus grand obstacle que tu as rencontré durant ta carrière ?
Quand on a débuté, le plus grand obstacle était d’avoir du matos qui tiendrait pendant le concert et permettrait de payer l’essence qui nous permettrait de revenir à Cardiff. A ce jour, notre matos fonctionne plutôt pas mal et le carburant n’est plus un problème.
Le groupe a beaucoup évolué au fil des années, comme on pouvait s’y attendre. Nous ne sommes plus de jeunes trous-du-cul qui rêvent de devenir célèbres… nous sommes désormais de vieux trous-du-cul qui rêvent de devenir célèbres !
Je me suis toujours demandé pourquoi vous avez choisi un tel nom pour le groupe ?
A la base, on voulait un nom qui tienne à l’épreuve du temps, il fallait qu’on choisisse avec sagesse. Le groupe avait deux options, soit My Dying Child ou My Dying Bride.
Qu’auriez-vous choisi ?
Quelles étaient les influences initiales du groupe ?
Dead Can Dance ont joué un grand rôle à nos débuts, Portishead et aussi The Prodigy, dont Calvin était un grand fan !
Si tu devais choisir quelques groupes pour partager une tournée, lesquels tu choisirais ?
Black Sabbath et Judas Priest font parti de ceux qui ont trotté dans ma tête. On a joué – enfin, il faut lire « jouer » comme « fait la première partie ou servi de faire valoir dans des fests » – avec des groupes connus mais jamais Black Sabbath ou Judas Priest. Il font parti de notre « to do list » et ses cases à cocher, mais au vu de leur notoriété de rois du Metal, ça serait surtout putain de cool et rendrait putain de jaloux nos potes.
Quelle est votre position en Angleterre, vous jouez beaucoup là-bas ?
Aucune. La Grande Bretagne est difficile d’accès pour nous, on a quelques fidèles là-bas mais pas beaucoup ! Donc on ne reçoit pas les mêmes propositions de grands concerts comme à l’étranger… à l’exception du Damnation Festival à Leeds : c’est un grand festival qui regroupe beaucoup de groupes anglais à part égale de groupes étrangers ; on y a joué deux fois et on a été bien accueillis, je vous recommande fortement ce fest.
Comment est la scène doom/gothique là-bas ?
Aucune idée, je ne savais même pas s’il y’en avait une !
Est-ce que certains d’entre vous sont endorsés ?
Les micros EMG ! Je les utilise depuis 1989… Les cordes Elixir… Tout se trouve sur notre site. Pour les autres [membres], j’ai peur de dire des bêtises www.mydyingbride.net
Quel est ton meilleur et ton pire souvenir ?
Ha, ha, le meilleur souvenir pour moi, c’est notre tour manager, je l’ai volé à l’Italie ! Le pire c’est…probablement elle également, en fait ! Yin etYang, Karma, juxtaposition, paradoxe, appelle ça comme tu veux.
Vous êtes un des rares groupes qui soient restés aussi longtemps avec leur label, quel confort avez-vous trouvé chez Peaceville Records ?
Ils nous laissent libres de faire ce qu’on veut et on apprécie. Ils n’ont pas de grandes attentes commerciales à notre encontre. Ils savent qu’ils ont signé My Dying Bride et ne se plaignent pas quand on sort des albums comme Feel the Misery or A Map of all our Failures etc. Ils le prennent tel quel et le comprennent aussi.
Est-ce que l’un d’entre vous a des side projects ?
Oui, c’est le cas de Dan, Thine est son groupe principal et Blasphemer son side project, avec MDB en parallèle, et il en a assurément d’autres. Pour les autres, je ne sais pas trop…
Que penses-tu des plateformes Deezer et Spotify?
Ainsi va la vie, les gens obtiennent de la musique gratuitement et les groupes doivent payer pour enregistrer leurs albums, comment ne pas voir du mal dans tout ça ! Ils prétendent payer les groupes, mais je peux t’assurer que le seul gagnant dans l’histoire ce sont ces plateformes !
Qu’aimes-tu dans la vie en dehors de la musique?
J’aime le révisionnisme et les trucs ésotériques. J’aime la vérité latente et je me considère comme un théoricien du complot (ce qui deviendra d’ici peu un crime à part entière en Grande-Bretagne à force que nos maîtres érodent toute liberté de pensée) qui serait plus facile à assumer si les théories du complot avaient cessé de s’avérer. Le Bâtiment 7, ça vous parle ? [NdT : référence au bâtiment 7, autre appellation du World Trade Center]
Comment définis-tu une vie parfaite pour toi ?
Avec suffisamment de paix et de calme, et une mousse. Tiens, ça me fait penser aux hobbits !!!
Avez-vous prévu quelque chose pour les 25 ans de MDB ?
Malheureusement non, l’album n’est pas sorti à temps pour nous permettre d’organiser les concerts comme il se doit, et on a préféré ne pas s’engager dans autre chose que la sortie de l’album, ce qui est finalement arrivé, deux fois même !
Question difficile : qu’est-ce qui a fait que vous soyez au top de la scène gothique/doom ?
C’est une course qu’on a gagnée parce qu’on était seuls à y participer. On s’est rués et avons franchi la ligne d’arrivée 25 ans après avoir commencé accidentellement.
Quels sont tes morceaux préférés du nouvel album?
Les morceaux de 1 à 8 – que j’aime vraiment beaucoup. Aucun morceau préféré… Je pensais que oui… mais en fait non !
Quel genre de musique aimes-tu ? Quels sont tes groupes préférés ?
J’aime le Black Metal et old school. Je dirais : Belphegor, Iron Maiden, Gorgoroth, Judas Priest, Deathspell Omega, Dio, etc.
Quel est votre meilleure audience actuellement ?
Je dirais à l’heure actuelle la Roumanie. Avant c’était 50/50 avec la Hollande et la Belgique. Mais les choses ont change, ce qui me convient parfaitement vu que la Roumanie est un pays cool à visiter et où jouer. Ce pays a une mauvaise presse en Angleterre, mais c’est surement une astuce pour nous empêcher, nous, crétins, de le découvrir et découvrir toute sa splendeur.
Je te laisse finir avec ta citation favorite ?
He’s not the messiah. He’s a very naughty boy! [NdT : ce n’est pas le Messie, c’est juste un gros enfoiré]
Il y en a une autre que j’aime bien, qui représente bien les aléas du groupe et qui en est devenu le titre d’un morceau.
We started out with nothing, and we’ve still got most of it. [NdT : on a commencé avec rien, et ça, on l’a toujours.]
1 Commentaire sur “My Dying Bride”
Posté: 19th Juin 2016 vers 23 h 51 min
[…] Interview de My Dying Bride: http://www.soilchronicles.fr/interviews/my-dying-bride […]
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