Line-up sur cet Album
- Anxela Baltar : guitare, chant
- Violeta Mosquera : batterie, chant
Style:
Stoner / GrungeDate de sortie:
14 mai 2021Label:
Century Media RecordsNote du SoilChroniqueur (Quantum) : 8.5/10
“Une vérité est un mensonge qui a longtemps servi.” Edouard Herriot
Ah l’Espagne… Quel beau pays ! Que je n’ai jamais visité ! Oui… Sauf un été étant petit, à Benicarlo, mais j’en ai très peu de souvenirs. D’ailleurs, c’est marrant parce qu’en tapant Benicarlo sur Google Maps, je me suis aperçu que toute ma vie, j’étais dans le mensonge. Je vantais souvent que j’étais allé en vacances en Espagne, mais genre de l’autre côté du pays, limite à la frontière lusophone. Eh bien non… Benicarlo est à deux heures et demie de Barcelone. Voilà, c’était l’instant de honte à la sauce Quantum. Pour le reste, l’Espagne est un pays qui a un vivier de groupes de metal de plus en plus solides, mine de rien. J’avais déjà gouté à l’expérience pleine de romantisme de Haemorrhage, je m’étais bercé sur les voilures de Trobar de Morte, sur les tribulations de Magö de Oz, sur le frontalisme d’Angelus Apatrida, et d’autres encore. Je commence donc de plus en plus à m’intéresser à ce pays pas très loin de chez nous et qui va faire parler de lui sur notre belle scène, c’est évident. Maintenant, j’ai remarqué que nos chers confrères de Spirit of Metal n’avait pas classé de groupes espagnoles au-delà des trois étoiles sur cinq en popularité. Est-ce à dire, si l’on exclut brièvement la subjectivité de nos confrères, que l’Espagne n’a jamais fourni de grands groupes ? Étonnant constat donc. Mais je vous garantis que si mon petit doigt ne se trompe pas, il y a un groupe ici présent qui va faire parler de lui au-delà des trois étoiles. C’est le groupe Bala, et elles déboulent en puissance avec Maleza en cette année 2021 !
Bala est un groupe qui provient d’Espagne, de Galice pour être exact. Le duo féminin existe depuis au moins 2015 puisque le premier album nommé Human Flesh est sorti durant cette année. Par la suite s’en suivra sur le même label (Matapadre) et en 2017 Lume et enfin, après quatre années de prestations concert remarquées et remarquables, allant jusqu’en Amérique du Sud et au Japon, cet album qui se nomme donc Maleza. Alors, ce n’est pas vraiment un album lambda puisqu’il est le fruit de la signature chez un très gros label : Century Media Records! On peut donc supposer que les diverses prestations à travers au moins trois continents ont attiré l’attention de ce dernier, ce qui montre un vrai talent de la part de nos deux amies Anxela Baltar à la guitare et au chant, et de Violeta Mosquera à la batterie… Et au chant. D’ailleurs le duo me rappelle fortement et à bien des égards l’un de mes groupes préférés : Mantar. Même principe de composition, même principe scénique, même musique ou du moins issue d’une sous-famille commune. Autant vous dire que je suis plutôt impatient d’aller découvrir cet album qui est le troisième de Bala, et qui s’annonce sous des auspices heureux avec ce formidable label! Cela fait presque penser à un conte de fées!
Et pour commencer par « il était une fois », il faut que l’on passe par la case artwork, comme souvent. Autant vous le dire tout de go, ça va être court. Parce que la pochette n’est qu’une photographie d’une mâchoire de requin, soutenue par un bâton. Voilà, ni plus ni moins. Alors, je me suis dit « quel est le rapport avec le mot Maleza? » qui veut dire « mauvaises herbes ». Honnêtement, je n’en ai pas vu, j’ai essayé de triturer mon imaginaire pour faire un lien corrélaire entre une mâchoire de requin et des mauvaises herbes, et malgré son pouvoir incommensurable (haha), je n’en ai pas trouvé. Alors je me suis attardé sur le requin, qui est un animal bien connu, craint souvent, mais aussi paradoxalement respecté et sauvé. Finalement, on pourrait y voir une forme d’identification de la part de Bala, avec l’idée que le groupe serait craint, mais aussi respecté. Sauvé, je ne sais pas si on en est là, a priori non puisque les affaires marchent bien. Bon, en vérité, je ne sais pas du tout pourquoi le duo espagnol a employé cette mâchoire de requin pour en faire une pochette. C’est ce que j’apparente à une démarche totalement simpliste et plate, mais on peut subodorer qu’il y a un sens derrière. Mais faiblesse m’est de constater que je n’ai pas trouvé de sens. Par contre, j’ai bien aimé les teeshirts du groupe avec cette mâchoire! Comme quoi… Tout n’est pas perdu dans ce monde, venant de moi qui suis thalassophobe (Georges Pernoud, mon pire cauchemar).
Heureusement que la musique, au même titre que les charmes des deux musiciennes, montre vraiment des crocs! Pleine d’énergie, le metal a de forts accents stoner, et ce malgré l’absence étonnante pour le genre de basse. Mais comme souvent dans ce genre de duo de musiciens, il y a un effet sur la guitare qui apporte suffisamment d’épaisseur pour faire croire à la présence d’une basse. J’avoue que j’étais très tenté de faire mon Bidochon et de dire qu’un stoner sans basse, ce n’est pas un stoner! Mais bon, elles sont parvenues à me faire changer mon fusil d’épaule. Il y a une sacrée débauche d’énergie qui contraste d’ailleurs avec le côté limite plan-plan du stoner, plus lourd que rapide. En cela, je pense qu’il doit y avoir des influences grunge derrière, ou peut-être limite un peu -core. Cela donne un format hybride que l’on pourrait presque dénommer « alternatif » si j’aimais ce mot. J’ai surtout été très surpris de la durée moyenne des morceaux, excédant rarement trois minutes, et je dois dire qu’au vu de l’énergie proposée, c’est plutôt une bonne chose! Cela évite l’essoufflement, et la lassitude de tant de brutalité, j’aime bien aussi cette perspective que l’on trouve rarement dans ce style. En tout cas j’aime beaucoup, Les filles font la part belle à de l’intelligence, un cerveau bilame qui fonctionne super bien. Le stoner proposé est riche, efficace et intéressant à tout point de vue! Je comprends l’élan autour du groupe désormais.
Mais le très gros point fort de l’album, c’est sans hésitation la production. Le boulot qui est fait sur ce troisième album Maleza est un modèle du genre! Je vous jure, c’est incroyable. Le son de la guitare est tellement bien retouché qu’on croirait qu’il y a un ensemble instrumental classique guitares au pluriel et basse. J’ironisais un peu en parlant que le stoner n’est rien sans la basse, je me suis évidemment et comme souvent d’ailleurs trompé, Bala est en train de nous le démontrer royalement. La batterie est tranchante, un peu forte de café par moment mais je prends acte que c’est sûrement l’effet voulu de mettre un peu de rythme brutal dans les compositions qui, je le rappelle, sont relativement courtes. Donc, il faut que ça envoie du pâté vite et bien! Autant avoir une batteuse qui défonce, comme ici. Je suis de fait ébahi par la qualité du spectre sonore, qui est tout simplement époustouflant et contribue pour plus de la moitié selon moi à la réussite du groupe bicéphale. Un modèle du genre stoner, qu’on vous dit! Pour paraphraser La Grande Tour de Pise qui Émane jusqu’à la Ceinture de Kuiper Chris Metalfreak (NdMetalfreak : ce serait donc là que se situerait le septième ciel ?) !
Maintenant, il faut tout de même reconnaître quelque chose dans Maleza. Et cela ne va pas forcément plaire à tout un chacun. Je trouve que les pistes sont parfois trop répétitives. J’ai en tête les riffs endiablés du groupe de stoner hollandais Pendejo qui sont à peu près de la même trempe, le côté plan-plan en moins. Mais le souci c’est que dès que je fais défiler les morceaux de Maleza, j’ai pratiquement tout le temps le même morceau de Pendejo qui me revient. En d’autres termes, mon imagination bloque intempestivement sur une seule référence à chaque chanson de Bala, ce qui, vous en conviendrez je crois, n’est pas gage de bonnes références. Cela n’enlève en rien qu’elles sont plaisantes à l’extrême, et que j’aime beaucoup cet album dans tout ce qu’il a de plus intense. Mais j’aurais vraiment adoré Maleza si les riffs variaient un peu plus, même un tout petit peu plus. On sent qu’il y a des influences profondément ancrées et qu’il sera compliqué d’en déloger les deux musiciennes, mais en écoutant ce troisième album, je ne fais pas forcément de souci pour Bala. Il faudra prendre quelques risques sur un prochain album, c’est tout. Mais le reste est suffisamment solide!
Alors, oui! Elles sont deux. Mais bonté divine elles envoient sec nos comparses espagnoles! C’est fou tout le bien qu’on peut faire en étant seulement deux aux commandes, vous ne trouvez pas? Le duo peut se targuer d’être composé de deux femmes très talentueuses, qui vont faire l’effet d’une méga bombe sur la scène metal parfois machiste, il faut bien l’admettre. On retrouve donc une solide maitrise des deux instruments batterie et guitare, et je comparais tout à l’heure le groupe Bala avec Mantar, mais cela va au-delà de tout quand on s’aperçoit que la disposition scénique est exactement la même, ainsi que tout l’attirail de pédales d’effets. Il en faut vous me direz pour combler le vide, mais quand je vois la maitrise notamment de la guitariste / chanteuse, je suis encore plus sur le popotin gavé de croutons à l’ail – mon secret d’écriture. En plus d’avoir des compositions intéressantes, les musiciennes sont plus qu’excellentes. Joli constat en tout état de cause.
Concernant les deux chants, un saturé et un clair, la confusion règne un peu parce que je trouve qu’il faudrait là encore apporter quelques variations. Les deux musiciennes chantent chacune dans un registre technique différent, c’est un fait. Les alternances et utilisations des voix sont intelligentes et à point nommées, rien à redire dessus. Mais comme les compositions plus haut, les chants manquent quand-même un peu de changement. On tourne en rond, clairement. Les deux voix sont parfois presque identiques (le côté grunge) à ne plus reconnaître qui chante comment… C’est probablement le point faible principal du groupe Bala, qui mériterait plus particulièrement sur les parties chant d’évoluer, sinon de prendre quelques risques au lieu d’aller dans le précautionneux à outrance. Techniquement parlant, je me contenterais d’un pauvre « ça va », mais plus histoire de dire que j’ai ni aimé ni détesté les chants. Disons qu’ils ne m’ont fait aucun effet sincère.
Point cardinal ou point final de cette chronique, mes propos vont surtout se concentrer sur le ressenti général du troisième album de Bala, nommé Maleza et qui ne mérite pas que l’on fasse des jeux de mots dessus. Tout simplement parce que cet album est très bon, plein de promesses et confirme en amont le potentiel qui émanait des deux amies espagnoles avant de signer chez les chantres de Century Media Records! Talent indéniable mais qui manque parfois encore un peu d’allant et de prise de risque. Pourtant, le stoner de Bala est bien plus énergique que la moyenne, le duo fonctionne à merveille et ne souffre d’aucun manque instrumental, ce qui pourrait amener le groupe loin, très loin! Mais pour ce faire, il faudrait davantage, selon moi, d’expérimentation et de variation. Mais en tout cas, ce Maleza est un album que je recommande, et Bala est un groupe que je vais suivre de près, à n’en pas douter que cette filature ne sera pas sans résultat positif à l’avenir.
Tracklist :
01. Agitar
02. Hoy No
03. X
04. Mi Orden
05. Cien Obstaculos
06. Quieres Entrar
07. Rituals
08. Bessie
09. Una Selva
Laissez un commentaire