Bovary – Mes racines dans le désert

Le 7 juin 2018 posté par Bloodybarbie

Line-up sur cet Album


  • Petri Ravn (Guitare)
  • Gwen de Bovary (Basse, batterie)
  • Queen Thrash (Chant)

Style:

Black Metal dépressif

Date de sortie:

6 Février 2018

Label:

Nar Production

Note du SoilChroniqueur (Quantum) : 7/10

Ah, Madame Bovary… Ce bon vieux roman de notre Flaubert national n’a jamais été autant d’actualité. Pour les non-initiés, le roman raconte l’histoire d’Emma Bovary, qui rêve, comme beaucoup, d’une vie trépidante et d’aventures et qui, comme beaucoup (encore), se retrouve mariée avec un homme qui ne lui veut que du bien mais qu’elle finit par ne plus aimer, avoir une fille qu’elle ne désirait pas puisqu’elle voulait un garçon, puis qui finit par se laisser aller au désir, à la débauche, jusqu’à l’épuisement des ressources pécuniaires et personnelles, la conduisant au suicide. Quoi de plus judicieux que de faire refleurir les romans du passé, les faire se réincarner dans la souffrance actuelle ? Le groupe Bovary joue clairement cette carte dans sa démo intitulée Mes racines dans le désert et, croyez-moi, ce n’est pas pour amuser la galerie. Alors, âmes en peine, passez votre chemin et évitez les forêts Grises (clin d’œil à nos canadiens dépressifs). Moi, amateur de Black dépressif et ancien musicien de ce genre, j’ouvre les grilles d’un nouveau cimetière et vais découvrir ce nouveau cénotaphe.

Vous l’aurez deviné, le trio des Hautes-Alpes propose du Black Metal dépressif. Je dois admettre que de prime abord, ce n’est pas hyper flagrant quand on voit la pochette ! J’avais le sentiment d’avoir affaire à un (énième) groupe de punk et tous les faux quolibets juvéniles qui vont avec (surtout en parlant contemporain), notamment quand on voit la photo de groupe, les trois musiciens tournant le dos à l’objectif en regardant un paysage de montagne, avec un beau molosse bien charnu. La photo se prêterait volontiers à un groupe de punk, plus qu’à du Black dépressif ! Il est vrai que les deux styles ont un lien de parenté évident, mais la confusion est telle que je ne suis pas spécialement emballé à l’idée de me pencher sur l’écoute du CD.

Et puis, quand on se plonge dans la musique de Bovary, on comprend tout de suite que la mélancolie est de rigueur, et non l’anarchie. De fait, les roses, le décor noir, le tableau qui évoque le désespoir, les paroles sur lesquelles je m’attarderai plus bas, tout prend son sens. Le groupe pousse la provocation en mettant une citation sur le CD, à l’attention du mélomane : « Si tu ne t’es pas suicidé après l’écoute de cette démo, c’est qu’avec les copines, on a manqué notre coup. L’avantage, c’est que tu seras vivant quand on sortira l’album et tu pourras nous l’acheter ; Bisou ». Bon… je n’apprécie pas vraiment ce type de provocation car jouer sur les appels au suicide ne sont pas, à mon sens, un sujet à prendre à la légère. Notre ami Niklas de Shining qui distribue des lames de rasoir au public ne m’a jamais vraiment inspiré de sentiments bienveillants. Mais enfin, je ne vais pas vous la jouer infirmier psy de pacotille. Juste que cette citation me semble inappropriée et inutile. (De même que la photo sur le CD avec le chien et une musicienne…) Mais passons.

En revanche, je trouve le choix du titre de la démo particulièrement bien trouvé. Mes racines dans le désert met l’accent sur la vacuité de l’existence de l’auteur et son absence de repère. Vraiment, le titre est une bonne trouvaille, cela excite ma soif d’analyse ! Mais stop à la psychologie de comptoir à chichas !

La démo dure 36 minutes, on y trouve une introduction, deux morceaux bien black avec un interlude et une conclusion. D’emblée, l’introduction a le mérite de non seulement mettre dans l’ambiance, mais témoigne d’une qualité sonore étonnante ! Ce qui est même assez bluffant, c’est que le mastering des parties ambiantes est meilleur que celui des morceaux. Je dois avouer que l’introduction est marquante avec sa montée en puissance. J’insiste dessus car elle est envoutante, et surtout rend incapable de savoir si on doit être bien ou pas (un peu comme les compositions de Philip Glass dans le film Koyaanisqatsi ou Woodkid dans son album The golden Age). Puis l’aspect noir prend place petit à petit, nous laissant sur une drôle d’impression. L’interlude et l’outro sont également de bonne facture, j’adore ces parties-là !

Les morceaux, quant à eux, sonnent évidemment Black Metal dépressif et le mastering qui va avec, à savoir assez crade et malsain. Mais peut-être un peu trop… Le son est parfois trop étouffé par les basses fréquences étalées par la basse et les grosses caisses. Du coup, les morceaux paraissent saccadés par moment, c’est dommage… D’ailleurs les guitares manquent un peu de mise en avant.
Lesdits morceaux sont d’une longueur classique pour du Black dépressif pur. Par contre, l’ensemble demeure vraiment efficace, la rythmique est mélancoliforme, à savoir lente, pénible dans le sens que la lenteur rappelle le purgatoire de la vie. Un peu comme Sisyphe escaladant sa montagne, pressé d’arriver au sommet mais ne pouvant faire plus vite. On sent que le travail de composition est réel, pas jeté à la va-vite. Il y a une vraie recherche sur « comment susciter des sentiments négatifs chez celui qui écoute ? » Le talent et les idées sont là et c’est un très bon point !

Le deuxième morceau sonne bizarrement plus « pop » dans les riffs. Je vous assure que, par moment, je crois reconnaitre certains passages de groupes pop rock. Loin de moi l’idée d’émettre une critique péremptoire, mais c’est déroutant quand-même ! Cela reste un morceau intéressant, avec la même ligne directive que son prédécesseur.

Le chant féminin est de très bonne technique, la voix est suffisamment torturée pour parfois arriver à glacer le sang. On peut d’ailleurs assez facilement authentifier que la souffrance n’est pas que spectaculaire, pour « faire que de la musique » en somme. Mais seule l’interprète-auteure en validera mes propos. Cependant, je suis un peu frustré par le manque de vrai screams. Vouloir retranscrire le châtiment est bien, trop s’écarter des « codes » en est une autre. Et ce qui fait le charme du Black Metal reste le fameux scream… Un peu plus de ce dernier serait appréciable pour le prochain opus. Et l’effet reverb est trop utilisé, cela dénature le chant.
Les textes sont bien écrits, la rythmique est travaillée. Bon, je n’y vois pas grand-chose à dire : ceux-ci ne sont pas d’une grande beauté mais ne sont pas horribles non plus, ils sont classiques. Plutôt subjectifs que poétiques.

Bon il est temps pour moi de rendre les (l)armes et de donner ma conclusion. Bovary nous propose un premier CD que je trouve prometteur par les idées de composition et la volonté de trouver la quintessence en nous qui renvoie à notre propre purgatoire. Le groupe est jeune, a dû batailler pour trouver son identité musicale et enfin nous offrir cette démo. Il reste encore du travail notamment sur le mastering et quelques retouches autour de l’univers du groupe (notamment sur le graphisme du CD) pour qu’on arrive à un deuxième opus de grande qualité. Les filles, je vous promets cependant une chose : je vais vous suivre de près, et j’attends de voir comment vous fleurirez votre prochaine tombe car votre CD m’a beaucoup plu !

Tracklist :

1. Mes racines dans le désert
2. Ta vie c’est mes chiottes
3. Je ne serai plus là pour l’attendre
4. Automne
5. Outro

Facebook : https://www.facebook.com/bovaryblackmetal/

Retour en début de page

Laissez un commentaire

M'informer des réponses et commentaires sur cet article.

Markup Controls
Emoticons Smile Grin Sad Surprised Shocked Confused Cool Mad Razz Neutral Wink Lol Red Face Cry Evil Twisted Roll Exclaim Question Idea Arrow Mr Green