Note du SoilChroniqueur (Seblack) : 8/10

C’est près de quatre ans après leur deuxième album, sorti alors par le label français Debemur Morti, que nous revient Hegemone, formation originaire de Pologne et officiant dans un post-black teinté de fortes influences sludge.
Quatre ans c’est long, très long même, en une époque où la « durée de vie » d’un album, même bon, semble de plus en plus courte.
Toutefois dans cette culture, de plus en plus dominante, de l’abondance et de l’oubli, il y a des groupes qui préfèrent encore prendre leur temps. D’une parce qu’ils n’ont peut-être pas le choix et pas la possibilité de sortir un album tous les ans. De deux, parce qu’ils préfèrent peut-être aussi laisser mûrir leur musique et peaufiner leurs compositions afin d’obtenir un résultat le plus proche possible de leurs exigences. Hegemone semble de ceux-là et à l’écoute de Voyance, on comprend vite que l’on a affaire à des morceaux et un album méticuleusement construits et travaillés. Globalement les titres sont assez longs, oscillant entre sept et dix minutes. Chacun est traversé par des atmosphères différentes, des cassures de rythmes, des variations de voix qui tiennent en haleine. Il se dégage de chacune de ces compositions une profonde noirceur et disons le une certaine forme de spiritualité, d’invitation à l’introspection.
Le contenu de ce troisième album d’Hegemone ne dépareille donc pas avec ce que le groupe avait pu produire par le passé avec un univers immersif réclamant une certaine attention pour pouvoir pleinement l’apprécier. Si le son semble moins massif que sur leur album précédent, les atmosphères n’en restent pas moins écrasantes notamment par le chant qui évolue dans différents registres : d’un black hurlé en passant par des sonorités death caverneuses ou des phrasés plus proches du hardcore.

Musicalement, Voyance est un album où dominent des atmosphères sombres, lourdes et souvent dissonantes. De par cette lourdeur et de nombreux passages lents, il y a une forte empreinte sludge. Quand le chant death se joint à cette musique épaisse, comme dans le morceau d’ouverture, on pourrait presque penser à du funeral doom. Les lignes mélodiques des guitares ou des claviers amènent, elles, une coloration davantage post métal. L’ensemble n’est finalement pas sans rappeler des formations telles que Cult of Luna ou Amenra.
Mais là où Hegemone se démarque c’est en apportant à tout cela des influences black qui diversifient encore un peu plus la palette de noirceur de leur musique. Cela se sent notamment en concentrant son écoute sur la batterie ou sur les accélérations traversant certains des morceaux. Pour le coup cet album m’a aussi beaucoup rappelé l’univers de Throane ou de Blurr Thrower. Un black hybride donc, qui emprunte à l’ensemble des musiques sombres ses matériaux pour bâtir son univers peuplé de ténèbres.
Traverser cet album c’est cheminer péniblement dans des mondes tour à tour glacés, arides et pesants, des contrées aussi grandioses que terrifiantes dont on ne revient pas forcément indemne.
Une musique assez exigeante, donc, qu’il faut prendre le temps d’écouter pour pleinement s’y abîmer.

Tracklist :

1. Nourishment (07:33).
2. Solace (04:49).
3. Odium (05:58).
4. Sermon (09:58).
5. Abeyance (06:53).
6. Inference (06:22).
7. After Demise (08:43).

Bandcamp
Facebook
Instagram
SoundCloud
Spotify
YouTube