Line-up sur cet Album
- Wolf Hoffmann : Guitare
Style:
Guitare HeroDate de sortie:
1er Juillet 2016Label:
Nuclear Blast RecordsNote du Soilchroniqueur (Willhelm von Graffenberg) : 8.5/10
En général, quand BloodyBarbie me dit d’un album « ouaaaais, c’est excelleeeeent, c’est trop pour toaaaaa ! » – sous entendu « chronique-le ! » – c’est qu’elle veut se débarrasser du bébé pour vider l’eau du bain et remplir la baignoire du sang encore tiède de ses victimes afin de mieux s’y étendre, en buvant un verre à pied de vin rouge et répondant « Satan… » à toutes les questions qu’on pourrait lui poser.
C’est qu’elle connait assez bien mes gouts (musicaux, hein), la bougresse ! Sur le papier, ça part pas mal : Wolf Hoffmann, le gratteux d’Accept, fait un projet solo avec un album, Headbangers’ Symphony, dont les pistes ont des intitulés référencés à la musique savante… Ma foi, ça à l’air fait pour moi, en effet…
Et là, ce que je craignais arrive : des reprises de grands classiques, dans la lignée directe de tous les guitar heroes néoclassiques, dont on a vu et entendu pléthore dans les 80’s-90’s, comme Malmsteen et consorts, ou a moindre échelle avec des citations des Timo Tolki, Michael Romeo, etc. Ce n’est pas la première fois qu’il s’attaque à ce répertoire, il a déjà œuvré dans ce sens depuis quelques années déjà, et Headbangers’ Symphony est son deuxième opus dans cette veine. Ici, l’intérêt particulier qu’on peut y trouver, c’est de mieux comprendre ce qui fait la musique d’Accept, Hoffmann étant compositeur et guitariste dans ce groupe depuis 1976. Expliquer par exemple pourquoi leur célébrissime tube « Metal Heart » contient des citations de la Lettre à Thérèse… à Élise, pardon – mais en vrai, suite à une mauvaise lecture, c’était Thérèse – de Beethoven ou le thème de la Marche slave de Tchaïkovsky. Pour notre chronique analyse du jour, et histoire de refaire éventuellement votre culture-es-musique savante, je vais me coller rapidement à un track-by-track concis – ça vous évitera de passer un temps monstre avec un Shazam dubitatif pour retrouver les originaux –, sachant que le point majeur (ou mineur selon la tonalité) à relever de cet album, c’est que ce n’est pas une banale copie arrangée mais une réécriture, réarrangement et réorchestration des « grands classiques », le tout mettant en avant, bien évidemment, la guitare électrique, dans des versions écourtées souvent au thème principal de l’original, réécrit sous forme de morceaux accessibles, et pas un énième copié-collé de Sarabande de Haendel ou de Canon de Pachelbel repris sans effort créatif par un youtubeur wannabe.
« Scherzo » – en italien « plaisanterie » – est une reprise du thème du 2ème mouvement de la 9ème symphonie de Beethoven, dite « Hymne à la joie ». Vous connaissez principalement le 4ème mouvement, avec chœur – oui, je sais, c’est WTF pour une symphonie… mais bon, c’est Beethoven, hein, le mec révolutionnaire dans l’âme – qui a été choisi comme hymne européen. Et comme Beethoven emmerde les conventions, il a décidé de faire de son 2ème mouvement, théoriquement adagio dans les habitudes formelles, un scherzo, c’est-à-dire un morceau qui se veut enlevé et distrayant – ironiquement assez drôle quand on est dans une tonalité mineure (Ré, en l’occurrence), mais ça explique aussi pas mal pourquoi Beethoven est une référence classique (enfin, Romantique) parmi les metalleux. Hoffmann n’en garde ici que l’élément principal, la rythmique ternaire, pour en faire le support d’une piste de solo de guitare agrémentée de citations de l’original en décor sonore.
« Night on bald Mountain », ou « Une nuit sur le Mont Chauve » de Moussorgski. Vous connaissez certainement sa darkitude intrinsèque si vous avez le souvenir du sabbat avec les petits démons qui dansent dans la version de Fantasia. Hoffmann remplace les glissendi de violon par des slides à la gratte, ainsi que le thème principal et sa lourdeur aux cuivres par du powerchord. Le but semble être d’en faire un arrangement très teinté heavy metal (tout en restant Modeste).
« Je crois entendre encore ». Bon, là, pas besoin de traduction : c’est un air tiré de l’opéra Les pécheurs de perles de Bizet – « cocorico », dirais-je bien –, assez peu repris, vu que pas un des thèmes les plus célèbres de la musique savante. Hoffmann en propose ici une version assez proche de ce que ferait Gary Moore dans ses balades, au point que je me suis demandé si ce dernier n’en avait pas déjà fait une reprise – mauvaise pioche : pas de reprise par Moore, mais par Gilmour (Pink Floyd).
« Double cello Concerto in G minor ». Ahhh, enfin du Vivaldi. Lequel des guitar heroes néoclassiques ne s’est pas essayé à reprendre du Vivaldi, en particulier l’Été, repris pour son aspect shredder (Rondat, Alexi Laiho, Tina S. la petite prodige…) Ici, Hoffmann tape dans un autre « classique » du baroqueux italien, moins technique, piu moderato si on peut dire, où il laisse majoritairement la place à l’orchestre à cordes.
« Adagio ». Bon, là, tout le monde se dit « deux options : celui de Barber ou celui d’Albinoni… mais à tous coups, celui d’Albinoni… » Bonne pioche ce coup ci. L’éculé adagio d’Albinoni ! Hoffmann arrive à lui retirer de son caractère cul-cul en changeant la métrique binaire en 6/8, lui conférant une lourdeur épique mais moins lyrique que l’original.
« Symphony n°40 ». Là, aucune ambigüité, on va direct penser, à juste titre, à Mozart. Et Hoffmann, leurre dès l’introduction, en nous amenant dans un esprit speed mélo avec un arrangement assez typique de ceux de Royal Hunt.
« Swan Lake », le fameux Lac des cygnes, le ballet de Tchaïkovski, ramené à la lumière publique par le film barré de Darren Aronofsky. Difficile d’en faire une version qui ne perdrait pas de son intensité dramatique, et Hoffmann n’y parvient pas selon moi – la meilleure cover selon moi restant celle de The Agonist avec une version full a cappella d’Alyssa White-Glusz.
« Madame Butterfly ». Puccini, un des opéras les plus célèbres de l’univers lyrique bel canto italien. Hoffmann propose une version assez tendre pour la tragique histoire d’amour américano-nippone.
« Pathétique ». La sonate pour piano n°8, opus 13, de (une fois encore) Beethoven. Hoffmann propose ici une orchestration. Toute la subtilité et la froideur de cette sonate en perd énormément par la volonté d’en faire un morceau cadré dans des rythmiques de batterie, à mon avis il aurait dû virer tout l’aspect rythmique pour ne faire resurgir que la sensibilité guitaristique dont il est capable.
« Meditation ». Celle de Thaïs, de Massenet – re-« cocorico ». Hoffmann troque le violon solo pour une guitare solo et propose une version assez sensible sur un accompagnement arrangé pour cordes et piano.
« Air on the G string ». Bon bah, imparablement, fallait bien que l’Aria de Bach apparaisse. Le moins bien joué des morceaux sur cette galette. Étant donné que Bach et moi, c’est pas trop une histoire d’amour et que je trouve ce morceau chiant de base, je vais épiloguer en disant qu’il reste chiant, quelle que soit la version.
Wolf Hoffmann nous a donc proposé cet enregistrement, qui ressemble beaucoup à un album « petit plaisir personnel » pour rendre hommage à ses maitres, ce qui est tout à son honneur. Je trouve juste dommage pour le coup – et vous allez me taxer de « gros réac » – que la sensibilité metal ne fonctionne pas avec toute reprise, même en y tentant d’y mettre le meilleur possible.
A écouter après la valse de Chostakovitch par André Rieux, ou un best of de Rondo Venezziano… et se dire qu’on est bieeeen meilleurs connaisseurs dans le Metal, en fait.
Tracklist:
1. Scherzo (5:22)
2. Night on Bald Mountain (4: 22)
3. Je Crois Entendre Encore (4:17)
4. Double Cello Concerto In G Minor (3:31)
5. Adagio (5:45)
6. Symphony No. 40 (4:10)
7. Swan Lake (4:45)
8. Madame Butterfly (3:57)
9. Pathetique (5:14)
10. Meditation (4:04)
11. Air On The G String (2:50)
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Site officiel: http://www.wolfhoffmann.com/
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